Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Prieur-Duvernois (Claude Antoine),

dit Prieur de la Côte-d'Or, militaire, scientifique et homme politique (Auxonne, Côte-d'Or, 1763 - Dijon 1832).

En 1782, il entre à l'École du génie de Mézières, où Monge est son professeur. Il en sort avec le grade de lieutenant en second en 1784, et passe par différentes villes de garnison. Parallèlement, il se rend périodiquement à Dijon pour travailler avec son cousin Guyton de Morveau, célèbre chimiste - l'égal de Lavoisier, à l'époque. En 1790, il s'inscrit au Club des jacobins de Dijon, et, l'année suivante, est élu député de la Côte-d'Or à la Législative. Il siège à gauche, dans la Montagne, et se lie avec Carnot. Constamment en mission, rarement à la tribune et se consacrant surtout à des tâches techniques, il est pourtant élu par son département à la Convention. Il vote la mort du roi (janvier 1793). Au printemps, Prieur est envoyé en mission auprès de l'armée des côtes de Cherbourg. Après les journées des 31 mai et 2 juin 1793, il est arrêté avec Romme, à Caen, par les autorités ralliées à la Gironde, et n'est libéré qu'à la fin du mois de juillet. En août, il entre avec Carnot au Comité de salut public ; il y est en charge des armes et des poudres, et coordonne la recherche et ses applications militaires avec Berthollet, Fourcroy, Chaptal et Monge. Après l'élimination des robespierristes, le 9 thermidor an II (27 juillet 1794) - à laquelle il ne prend aucune part -, Prieur est maintenu dans ses fonctions jusqu'en octobre 1794 et siège alors au Comité d'instruction publique, qui couvre la culture, l'enseignement, les sciences, les techniques, la recherche. Avec le chimiste Fourcroy, il est à l'origine de la création de l'École centrale des travaux publics, qui, en septembre 1795, deviendra l'École polytechnique. Il contribue également à l'unification des poids et mesures. Cependant, le technicien qu'il est ne supplante pas totalement le politique. En effet, Prieur compte parmi ceux qui s'inquiètent du processus de rupture dans lequel la Convention s'engage en l'an III. C'est ainsi qu'il prend la défense des montagnards décimés par des purges successives, risquant lui-même d'être décrété d'accusation après les journées de prairial an III (mai 1795). Il est difficilement élu aux Cinq-Cents, où il siège jusqu'en 1798. Mais n'étant pas réélu, il fonde alors une fabrique de sulfate de cuivre et est réintégré dans l'armée. Il prend sa retraite, avec le grade de colonel, en 1808. À la Restauration, il est exclu de l'académie de Dijon.

Prince noir (chevauchée du),

célèbre chevauchée de troupes anglaises menées par Édouard, prince de Galles, à travers le sud du royaume de France, en 1355, pendant la guerre de Cent Ans.

Alors que négociations et affrontements se succèdent depuis 1350 entre le roi de France Jean le Bon et le roi d'Angleterre Édouard III, le fils aîné de ce dernier débarque à Bordeaux avec quelques troupes, en septembre 1355. Les contemporains de ce jeune prince de 25 ans l'appellent « prince d'Angleterre », « Édouard de Woodstock », ou encore, par anticipation, « Édouard IV » (le surnom de « Prince noir » lui sera attribué plus tard - pour la première fois, au XVIe siècle, par un chroniqueur anglais). Il s'est déjà distingué à la tête d'un corps de cavalerie lors de la bataille de Crécy (1346) ; les victoires anglaises de Poitiers (1356) et de Najera (1367) rehausseront encore son renom.

À l'automne 1355, il décide de traverser le sud du royaume d'ouest en est, et, fort de sa cavalerie anglaise grossie de contingents gascons, il parcourt pendant deux mois le Languedoc jusqu'à Carcassonne et Narbonne, semant la terreur sur son passage, pillant et brûlant de nombreuses villes, en Gascogne française et en Armagnac. Certains faubourgs de Toulouse sont incendiés. Le comte d'Armagnac reste sur la défensive, sans intervenir. Les troupes du Prince noir reviennent à Bordeaux en décembre 1355, chargées d'un butin considérable.

principautés territoriales,

ensembles politiques nés au Moyen Âge, unis à la couronne de France par des liens d'allégeance plus ou moins fermes selon les périodes. L'affirmation de l'État monarchique conduit à leur disparition.

L'apparition des principautés territoriales.

• Malgré des signes de déclin, la royauté carolingienne conserve l'essentiel de son autorité dans l'ensemble du royaume jusqu'à l'avènement du roi robertien Eudes, en 888. Vers cette époque achèvent de se constituer les premières principautés territoriales : la Bourgogne avec Richard le Justicier, l'Aquitaine sous Guillaume le Pieux, la Flandre sous Baudouin II. Après le retour des Carolingiens, Charles le Simple (898/922) abandonne à Robert, frère d'Eudes, l'autorité sur les comtés de Neustrie, et au chef normand Rollon les pays de Rouen et d'Évreux. À l'avènement de Louis IV d'Outre-Mer, en 936, l'affaiblissement de la royauté est plus manifeste encore : le nouveau roi ne possède ni comtés ni places fortes importantes. La plupart des comtés de la France du Nord sont contrôlés par Herbert II de Vermandois et par Hugues le Grand. La principauté constituée par Herbert ne lui survit pas. En revanche, Hugues le Grand est investi, en 943, du ducatus Franciae, qu'il transmet à son fils Hugues Capet. À la mort de Louis V, en 987, celui-ci devient roi des Francs. Aussi a-t-on pu dire que le duché des Francs avait absorbé la monarchie.

À cette époque, la situation des principautés territoriales est très hétérogène. La Bretagne jouit d'une indépendance de fait. Son allégeance envers le roi des Francs a un caractère de principe. La Normandie est tenue par les descendants de Rollon, et la Flandre, par ceux de Baudouin II. En revanche, à partir de 952, le duché de Bourgogne tend à se désagréger. En 989, le comte d'Aquitaine, Guillaume Fierebrace, est qualifié par le roi de dux Aquitanorum. Mais, en Aquitaine, à côté du duché poitevin existe un duché de Gascogne - comprenant au Xe siècle le Bordelais, un marquisat de Toulouse, un marquisat de Gothie, un comté de Rouergue - qui au XIe siècle sera englobé dans un important comté de Toulouse.

Ces principautés territoriales sont issues de la persistance de groupes ethniques (Bretons, Gascons, Aquitains, Flamands) et de l'action des magnats (les plus importants des comtes), qui s'efforcent de s'emparer de tous les éléments de puissance normalement détenus par le roi. Mais, d'une part, il n'y a jamais eu rupture ouverte et totale avec le pouvoir royal, les magnats continuant à prêter l'hommage au souverain ; d'autre part, ces principautés constituent un frein à la désagrégation des pouvoirs : elles résistent aux vicomtes, châtelains, barons, possesseurs de fiefs haut-justiciers qui tendent à l'autonomie. Certaines, comme la Normandie ou la Flandre, sont dotées d'institutions en avance sur celles de la royauté.