immigration (suite)
Par ailleurs, des mesures destinées à décourager les candidats à l'immigration ou à rasséréner un électorat tenté par l'extrémisme engendrent des contradictions, des drames humains propres à émouvoir l'opinion et à alerter les défenseurs des droits de l'homme. Même si elle met en avant l'autonomie de l'individu, la nécessité, de 1993 à 1997, pour les enfants nés en France de parents étrangers nés hors du pays, de demander la nationalité française entre 16 et 21 ans est perçue par beaucoup comme discriminatoire. De même, en 1997, le contrôle administratif rigoureux de l'hébergement des étrangers déclenche un mouvement de contestation. De nouvelles lois de 1998 à 2006 subordonnent l'obtention d'une carte de résident à des critères d'intégration. Surtout, au-delà des lois, c'est leur application qui pose problème : lorsqu'elles créent des situations familiales inextricables ou mettent en danger de mort certains demandeurs d'asile déboutés.
Des difficultés économiques particulières s'y ajoutent. Les mutations de l'économie, dont la robotisation, entraînent la suppression de nombreux postes de travail occupés par des immigrés - le chômage touchant le quart d'entre eux. Malgré un glissement vers le secteur tertiaire, qui emploie désormais 25 % des immigrés ayant un emploi, et le fait que mieux vaut chômer dans un pays riche que dans un pays pauvre, cette évolution contribue à une stagnation des effectifs : 3,4 millions d'étrangers en 1975, 3,6 millions en 1982, 3,3 millions en 1999, plus 300 000 ou 400 000 clandestins, impossibles à recenser exactement, d'où d'ailleurs exagérations et fantasmes. Les entrées légales n'ont pas totalement cessé, et restent de l'ordre de 100 000 par an - un peu moins depuis 1993 -, relevant à 80 % du regroupement familial, et compensées par un nombre de naturalisations sensiblement équivalent. Ces dernières reflètent une assimilation lente mais réelle, qui se lit par exemple dans les mariages mixtes, plus nombreux même depuis 1987 dans le cas des Marocains et des Algériens que dans celui des Portugais, ou dans la convergence rapide entre la natalité des groupes immigrés et celle des autochtones, puisque les Algériennes immigrées ont en moyenne 9 enfants en 1968 et 3,2 en 1990, contre 5,4 pour celles restées outre-Méditerranée.
S'il est vain de prétendre tirer des leçons de l'histoire, on peut noter que, depuis un siècle et demi, les vagues migratoires ont toujours paru poser des problèmes insurmontables en temps de crise ; des problèmes qui sont oubliés lorsque les difficultés économiques s'estompent, et que le besoin de main-d'œuvre est criant. Sauf à croire la France engagée dans un déclin irréversible la privant de ses capacités d'absorption, on peut supposer qu'il en sera ainsi encore une fois. Les prévisionnistes annoncent même qu'un retour à la prospérité impliquerait pour l'avenir un nouvel appel massif à l'immigration, ne serait-ce que pour compenser la diminution de la population active liée à la dénatalité.