Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
D

décolonisation (suite)

Cette « coopération » est qualifiée de « néocolonialisme » par certains auteurs marxistes ou tiers-mondistes. En effet, la France a conservé des départements et des territoires d'outre-mer (sauf les Comores et Djibouti, émancipés en 1975 et 1977), et une vaste zone d'influence en Afrique (étendue à l'ancien domaine belge : Zaïre, Rwanda et Burundi). Mais la rentabilité et la nécessité de ces survivances de l'empire restent discutées : la France dépend beaucoup moins de ses anciennes colonies que celles-ci ne dépendent d'elle.

Décorations (affaire des),

scandale qui éclate en novembre 1887, et conduit à la démission du président de la République, Jules Grévy, le 2 décembre.

Alors qu'en 1886 il a été réélu pour un nouveau septennat, Grévy, premier président de conviction républicaine de la IIIe République, est éclaboussé par un scandale auquel est mêlé son gendre Daniel Wilson, homme d'affaires, député et sous-secrétaire d'État aux Finances, convaincu d'avoir fait accorder la Légion d'honneur à des fournisseurs complaisants. À la Chambre des députés, une interpellation de Clemenceau fait tomber le cabinet Rouvier, le 19 novembre 1887. En excluant la démission qui désamorcerait le scandale, Grévy le mue en crise politique. Contre le président, qui fait valoir son irresponsabilité devant eux, les parlementaires, impuissants à le renverser, bloquent le fonctionnement des institutions par leur refus de former un nouveau gouvernement. Grévy finit par se démettre, le 2 décembre 1887. En 1879 déjà, un président de la République avait démissionné, le monarchiste Mac-Mahon, opposé au Parlement républicain depuis le 16 mai 1877. C'est donc la deuxième fois que l'institution parlementaire affirme sa prééminence politique de fait sur le président de la République : la fonction présidentielle tend à être cantonnée à « l'inauguration des chrysanthèmes », même si le chef de l'État continue à exercer une influence officieuse sur les affaires du pays.

défaite de 1940,

déroute des armées alliées face à l'offensive lancée à l'ouest par Hitler le 10 mai 1940.

Depuis le 3 septembre 1939, la France et la Grande-Bretagne sont en guerre contre l'Allemagne. Les deux démocraties disposent d'atouts économiques et militaires considérables, mais elles souffrent d'un manque de cohésion politique et diplomatique, et, surtout, d'une conception périmée de la guerre.

Les choix stratégiques.

• La France opte pour la guerre défensive, comme l'a illustré la construction de la ligne Maginot à partir de 1928. Ce choix, qui répond au souci d'éviter la répétition des hécatombes de 1914-1918, permet de dégager un compromis acceptable pour une classe politique très divisée et pour une opinion largement pénétrée par le pacifisme. Surtout, la stratégie défensive est le fruit de la pensée fossilisée d'un état-major - dirigé par Maurice Gamelin - qui demeure prisonnier de l'héritage de 1918 (front continu, suprématie de l'infanterie et de l'artillerie), et refuse de considérer le rôle moderne des blindés ou de l'aviation tactique. Dès avant la guerre, cette orientation a contribué à ruiner le système français élaboré dans les années vingt, et fondé sur des alliances de revers à l'est : le destin de la France est désormais lié à celui de la Grande-Bretagne.

Le choix défensif s'inscrit dans la stratégie d'ensemble des deux grandes démocraties. S'appuyant sur leurs empires coloniaux, leur écrasante supériorité navale, le soutien industriel des États-Unis et les potentialités de leurs économies propres, elles veulent contraindre l'Allemagne à une guerre longue. Étranglée par le blocus maritime, privée de matières premières, bloquée par la ligne Maginot, l'armée allemande ne pourra que s'effondrer à mesure qu'un gigantesque effort productif redonnera l'avantage militaire aux démocraties. Dans l'immédiat ne sont envisagées que des offensives périphériques destinées à affaiblir l'économie allemande. Après des projets irréalistes (opérations dans les Balkans, bombardement des champs pétrolifères soviétiques depuis le Levant), une offensive est lancée en Norvège (avril 1940) pour « couper la route du fer suédois » à l'Allemagne. La stratégie défensive n'était pas sans fondements (les Anglo-Américains ont ensuite appliqué un schéma semblable), mais elle supposait une série de conditions qui n'étaient pas réunies en 1940.

En premier lieu, la logique adoptée n'est pas poussée jusqu'à son terme, comme en témoigne l'absence de fortifications dans la région des Ardennes ou dans la plaine flamande. En outre, le programme de réarmement français souffre d'inquiétants retards, en particulier dans le domaine aérien, tandis que la Grande-Bretagne ne dispose que de maigres forces (cinq, puis dix divisions, péniblement réunies au sein d'un corps expéditionnaire en France [CEF]). Plus grave, le pacte germano-soviétique (23 août 1939) ruine l'efficacité du blocus. Enfin, la coalition alliée manque de cohésion : Français et Anglais ont formé un Conseil suprême de guerre interallié et un Comité de coordination économique, et se sont engagés à ne pas conclure de paix séparée ; mais il n'existe pas d'état-major commun, et le CEF, bien que placé sous commandement français, peut en appeler à son gouvernement. Les relations se révèlent plus imparfaites avec les Pays-Bas et la Belgique. Celle-ci, qui a proclamé sa neutralité en 1936, refuse d'engager des négociations militaires avec les Alliés, alors que les Français envisagent une poussée sur son territoire pour bloquer l'avance allemande. Finalement, les Belges acceptent le principe d'une aide française, mais aucune coordination militaire n'est mise en place.

Plans et forces en présence.

• Hitler, qui connaît la faiblesse de l'économie allemande, a tout misé sur une guerre de courte durée pour satisfaire les visées expansionnistes nazies, et a forgé une armée et une doctrine militaire (Blitzkrieg, « guerre éclair ») adéquates. Après avoir envisagé une attaque par la Belgique selon le plan Schlieffen de 1914, les Allemands décident de concentrer leurs efforts sur le point faible du dispositif français : les Ardennes (plan Manstein, mars 1940). Une attaque sera lancée à travers les Pays-Bas et la Belgique afin d'y attirer le gros des troupes alliées pendant que les blindés allemands franchiront les Ardennes, avant d'obliquer vers le nord-ouest pour prendre à revers les forces alliées.