Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
A

Afrique du Nord (débarquement d'),

débarquement des troupes américaines sur les côtes de l'Algérie et du Maroc, le 8 novembre 1942, dans le cadre de l'opération « Torch ».

En juillet 1942, Churchill impose à Roosevelt le principe d'un débarquement en Afrique du Nord. À cause de l'anglophobie et de l'hostilité à la France libre de l'armée vichyste d'Afrique, il est décidé que l'opération sera dirigée par les Américains, sans en informer de Gaulle.

Afin de susciter le ralliement de l'armée d'Afrique, les Américains tentent d'obtenir la caution d'un chef prestigieux. Weygand, ancien délégué général en Afrique du Nord du gouvernement de Vichy, s'étant désisté, ils placent leurs espoirs dans le général Giraud, récemment évadé d'Allemagne. Dans le même temps, le consul Robert Murphy noue des contacts avec la Résistance d'Afrique du Nord, notamment avec le groupe des Cinq, réunion de personnalités le plus souvent issues de l'extrême droite. Pourtant, les équivoques ne sont pas levées : Giraud croit que les Américains lui confieront le commandement de l'opération, et il réclame un second débarquement en Provence. L'opération « Torch » se déroule sans réelle coordination avec la Résistance locale. Les tentatives insurrectionnelles des conjurés, menées dans l'improvisation, échouent, et, à Casablanca, Oran et Alger, les Alliés se heurtent aux forces de Vichy. Les combats cessent à Alger dès le 8 novembre au soir, mais ils continuent au Maroc jusqu'au 11. En outre, une série de facteurs imprévus bouleverse le plan américain. On découvre - un peu tard - que Giraud n'a aucune autorité sur les officiers vichystes d'Afrique du Nord, qui lui reprochent sa « dissidence ». En revanche, il apparaît que l'amiral Darlan, ancien dauphin du maréchal Pétain, présent fortuitement à Alger, est le seul à pouvoir les convaincre. Dans un premier temps, Darlan ordonne aux forces de Vichy de repousser les « assaillants » ; mais, constatant la supériorité de ces derniers, il se résout à négocier. Pragmatique, Roosevelt décide alors de traiter avec lui. Les accords Darlan-Clark du 22 novembre placent l'Afrique du Nord sous une quasi-occupation américaine et offrent le pouvoir à Darlan. Celui-ci, tout en maintenant la législation de Vichy, entraîne l'empire (l'A-OF se rallie rapidement) dans la guerre contre les forces de l'Axe. Il se prévaut de l'« accord intime » que, le 13 novembre, le maréchal Pétain lui signifie par télégramme. En fait, il semble que le fameux télégramme (cosigné par Pierre Laval) se rapporte à la situation des jours précédents et approuve la première attitude de Darlan. Du reste, en public, Pétain désavoue fermement l'amiral.

Le 11 novembre, en réaction au débarquement, les Allemands envahissent la Tunisie et pénètrent en zone sud, anéantissant le semblant de souveraineté de Vichy et provoquant, le 27, le sabordage de la flotte française basée à Toulon, désarmée depuis l'armistice. La position de Darlan est difficilement tenable : les gaullistes et les résistants sont scandalisés par l'intronisation de ce dignitaire de Vichy ; le ralliement de l'armée d'Afrique est fragile, et l'opinion américaine reste hostile. Finalement, le 24 décembre 1942, Darlan est assassiné par un jeune résistant, Bonnier de La Chapelle. Giraud devient alors haut-commissaire de l'Afrique du Nord et, poursuivant la politique de Darlan, refuse, dans un premier temps, tout accord avec les gaullistes.

Afrique-Équatoriale française (A-ÉF),

groupement de quatre colonies, puis de territoires d'outre-mer de la République française en Afrique centrale (1910-1958).

Les explorations de Savorgnan de Brazza dans le bassin du Congo sont à l'origine d'une considérable extension des possessions françaises en Afrique équatoriale, qui se limitaient jusque-là à la colonie du Gabon. En 1887, Brazza est nommé commissaire général au Congo avec Brazzaville pour résidence, la colonie du Gabon étant confiée à un lieutenant-gouverneur dépendant de son autorité. Le 29 décembre 1905 est fondée une troisième colonie, l'Oubangui-Chari (ancienne région du haut Oubangui). Quant au territoire militaire du Tchad, créé en 1901, après la destruction de l'empire de Rabah, il ne recevra le statut de colonie qu'en 1920. En 1909, Martial Merlin prend le titre de gouverneur général du Congo français, et un gouvernement général de l'A-ÉF est enfin institué en 1910. Chaque colonie a à sa tête un lieutenant-gouverneur subordonné au gouverneur général.

En vertu de l'accord franco-allemand du 4 novembre 1911, consécutif à la deuxième crise marocaine, le territoire de la Fédération est amputé d'une bande d'environ 100 kilomètres de large (275 000 kilomètres carrés au total) au profit de la colonie allemande du Cameroun. Ce découpage implique un véritable démembrement de l'A-ÉF, qui se trouve partagée en trois tronçons. Mais, dès 1916, le Cameroun, conquis par les forces franco-britanniques, est ramené à ses frontières antérieures à 1911. La Fédération s'étend alors sur 2,5 millions de kilomètres carrés. Sa conquête n'a pas rencontré de véritable résistance en zone forestière, mais les opérations de pacification se sont poursuivies assez longtemps aux confins du désert, notamment au Tchad, où elles ne prennent fin qu'en 1924. Certaines populations musulmanes soutenues par la confrérie sénoussie ont même opposé une résistance tenace à la colonisation.

L'A-ÉF, cendrillon de l'empire colonial ?

• Dans le domaine sanitaire, la puissance colonisatrice introduit quelques progrès notables : création de l'institut Pasteur de Brazzaville en 1905, campagnes de vaccination antivariolique, succès du docteur Jamot dans la lutte contre la maladie du sommeil. L'hôpital de Lambaréné (Gabon), fondé par Albert Schweitzer en 1913, a pu à bon droit être considéré comme une réalisation remarquable. Toutefois, en 1938, l'A-ÉF ne compte encore que 80 médecins. Dans le domaine scolaire, les réalisations demeurent insignifiantes, sauf dans le Sud. On assiste en même temps à un prosélytisme actif des missions chrétiennes (surtout parmi les populations des régions forestières du Sud) : en 1939, on dénombre dans la Fédération 300 000 catholiques et 80 000 protestants. Les cultes syncrétistes africains (matsouanisme, kimbanguisme) font parallèlement de nombreux adeptes.