Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
H

harelle de Rouen,

émeute antifiscale déclenchée à Rouen le 24 février 1382, lorsque les fermiers du fisc commencent à prélever l'aide accordée au roi Charles VI par les états de Normandie.

Pendant plusieurs jours, les émeutiers - essentiellement des ouvriers et des petits artisans - pillent les maisons des riches bourgeois et marchands, dont certains sont tués. Un mois plus tard, après la fin de la révolte parisienne des maillotins, une sévère répression s'abat sur la ville. Le gouvernement royal fait exécuter les principaux acteurs de la harelle, ordonne la destruction de certaines fortifications, ainsi que le retrait des cloches du beffroi. Rouen perd les privilèges commerciaux qui faisaient la fortune de ses marchands. Une seconde harelle secoue la ville en août 1382, lors de la levée d'une nouvelle aide. Elle est durement réprimée dans les jours suivants par des bannissements et de nombreuses amendes.

La harelle a des causes immédiates : elle éclate au moment précis du rétablissement des aides pour le financement de la guerre et apparaît comme une réaction de la population urbaine face aux exigences fiscales du gouvernement royal. Mais elle s'inscrit aussi dans le contexte plus large des révoltes urbaines survenues en Italie, en Flandre et en Angleterre dans les années 1378-1382. La harelle, comme ces autres révoltes, oppose le peuple à la bourgeoisie urbaine, et met en évidence une crise de l'économie industrielle naissante.

harkis,

terme désignant aujourd'hui tous les musulmans qui étaient restés fidèles à la France durant la guerre d'Algérie.

À l'origine, il s'appliquait uniquement aux membres de « harkas ». Créées en 1956, ces unités composées de cent auxiliaires étaient rattachées à des unités militaires françaises en Algérie. Existaient également des Groupes mobiles de protection rurale (GMPR) et de sécurité (GMS), des moghaznis (gardes armés des sections administratives spécialisées) et des groupes d'autodéfense, tous composés de supplétifs musulmans, qui s'ajoutaient aux militaires engagés ou aux appelés. En 1960, les effectifs s'élevaient à 180 000 (60 000 militaires, 120 000 supplétifs, dont 60 000 harkis).

L'armée française tirait de leur recrutement plusieurs avantages : une bonne connaissance du terrain, la possibilité de rallier une partie de la population et le moyen de combler le déficit en soldats dû aux classes creuses de 1939-1945. Quant aux raisons de l'engagement des harkis, elles sont loin d'être univoques. La nécessité de recevoir une solde semble l'avoir emporté sur les deux autres motifs souvent invoqués : désir de vengeance à l'égard du FLN, patriotisme et loyalisme à l'égard de la France.

La fin de la guerre d'Algérie entraîna le massacre de plusieurs dizaines de milliers de harkis. Le gouvernement français, qui avait d'abord refusé leur rapatriement, organisa dès le mois de juin 1962 leur accueil dans des camps militaires ou dans des cités d'hébergement. Mais, comme pour les pieds-noirs, le transfert se déroula dans des conditions d'autant plus difficiles que leur présence n'était pas plus souhaitée sur le sol algérien que sur le sol français.

Haussmann (Georges Eugène, baron),

administrateur et homme politique (Paris 1809 - id. 1891).

Issu d'une famille protestante d'origine alsacienne, Haussmann entre dans l'administration préfectorale en 1832. En tant que préfet de la Gironde, il veille à juguler toute résistance locale au coup d'État du 2 décembre 1851, et organise soigneusement le voyage du prince-président, qui s'achève en apothéose à Bordeaux, du 7 au 10 octobre 1852. Ses talents d'administrateur et sa sympathie pour l'Empire lui valent d'être nommé préfet de la Seine en juin 1853.

Haussmann se fait alors l'organisateur des grands travaux voulus par Napoléon III pour métamorphoser Paris : « Paris assaini, agrandi, embelli », tel est le mot d'ordre qui préside aux transformations urbanistiques et architecturales. Conçue comme un corps humain, la capitale est percée de larges avenues (boulevard Sébastopol et boulevard Saint-Michel, réseaux polyétoilés de la place du Trône et de la place de l'Étoile...) destinées à faciliter la progression des flux humains ; des parcs périurbains (Boulogne, Vincennes) et intra-urbains (Monceau, Montsouris) deviennent les poumons d'une ville au bâti dense, qui a doublé de superficie et absorbé 500 000 nouveaux Parisiens environ avec l'annexion, le 1er janvier 1860, de dix-huit communes limitrophes ; sur le modèle du système artériel et veineux est enfin édifié un réseau de distribution des eaux salubres - venues de l'Ourcq, de la Dhuis, de la Vanne - tandis que le réseau d'égouts est multiplié par quatre. En outre, aux préoccupations hygiénistes et militaires s'ajoutent celles d'un urbanisme de régulation, sensible à la beauté des perspectives monumentales.

Mais l'œuvre du baron Haussmann soulève bientôt de vives critiques : la vague sans précédent de spéculations, les conséquences sociales des travaux entrepris, leur coût en partie couvert par des emprunts et, pour tout dire, la mégalomanie du préfet de la Seine et de l'empereur sont dénoncés par Jules Ferry dans un célèbre pamphlet, les Comptes fantastiques d'Haussmann (1867-1868). Les maladresses du baron soudent l'opposition libérale et républicaine dans une contestation de la corruption du régime. Désavoué par Rouher en mars 1869, contraint à la démission le 5 janvier 1870, Haussmann poursuit alors une carrière au Crédit mobilier, puis à la Compagnie des entrepôts et magasins généraux, qu'il dirige jusqu'en 1891. Ses trois tomes de Mémoires, publiés en 1890, constituent un témoignage exceptionnel sur le Second Empire.

Haute Cour de justice,

organe de justice chargé, notamment, de juger le chef de l'État en cas de haute trahison et les membres du gouvernement pour les crimes et délits qu'ils pourraient commettre dans l'exercice de leurs fonctions.

Depuis la Révolution, toutes les Constitutions - hormis celle, jamais appliquée, de 1793 - ont prévu de tels organes pour soustraire les membres du pouvoir exécutif aux juridictions de droit commun. Mais leur composition n'a toutefois pas été la même selon les régimes.