Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
I

Institut Pasteur, (suite)

En 1886, soutenu par l'Académie des sciences, Pasteur lance le projet d'un « établissement vaccinal contre la rage », qui verra le jour grâce à une souscription internationale. Cet institut de droit privé, reconnu d'utilité publique, devra s'autofinancer. Recherche fondamentale, applications hospitalières, formation des savants, sont trois de ses objectifs prioritaires. Les succès qu'enregistre l'Institut Pasteur sont multiples et rapides : traitement de la diphtérie, identification du bacille de la peste (1894), découverte des oligoéléments (1900), etc. Mais les dates marquantes sont celles de la réalisation des vaccins. En 1894, après avoir identifié la diphtérie, Émile Roux, Martin et Chailloux inventent la sérothérapie. Albert Calmette et Camille Guérin mettent au point le BCG en 1921. En 1927, Laigret découvre le vaccin contre la fièvre jaune, et Pierre Lépine, celui contre la poliomyélite en 1954. Ces avancées scientifiques capitales, liées à la vocation première de l'Institut, ne doivent pas faire oublier ses innombrables apports à la microbiologie appliquée (pharmacologie). Par ailleurs, l'action de l'Institut en Afrique (notamment par le biais des campagnes de vaccinations) illustre la dimension inter-nationale de ses missions, relayées aujourd'hui par la trentaine de centres de recherches en bactériologie, immunologie, épidémiologie et virologie associés à celui de Paris. Tous ces éléments expliquent l'aura d'un institut pionnier qui fait figure de modèle pour la recherche en biologie médicale, et dont le nom et l'histoire, auréolés de huit prix Nobel, symbolisent la révolution essentielle de la prophylaxie et des thérapies médicales au XXe siècle.

instituteurs.

Régent, précepteur, gouverneur, pédagogue, maître d'école, instituteur : la diversité de ces termes n'indique pas seulement un changement de condition professionnelle, elle reflète aussi une transformation sociale et des choix politiques.

L'évolution des mots et de la fonction.

• Le « régent » appartient à l'histoire scolaire de l'Ancien Régime. Mais, dans le Maître d'école (1955), Pierre Gamarra rappelle qu'au début du XXe siècle, dans les villages de Haute-Garonne, l'instituteur « demeurait lou régent ». Au Moyen Âge et au début de l'époque moderne, le maître était « institué », comme Gargantua fut « institué par un sophiste en lettres latines ». Il se voyait ainsi confier « l'institution des enfants », c'est-à-dire l'apprentissage des rudiments. Mais c'est pour l'enfant noble que Montaigne réclamait « un conducteur qui eût plutôt la tête bien faite que bien pleine ». Dans son Émile (1762), Rousseau considère qu'« il y a des métiers si nobles qu'on ne peut les faire pour de l'argent sans se montrer indigne de les faire ; tel est celui de l'instituteur ». C'est pourtant la double et lente conquête d'un statut et d'une indépendance garantis par l'État qui a donné à l'office d'enseignement primaire les traits qui distinguent la fonction d'instituteur. Dans le rapport qu'il présente en avril 1792 à l'Assemblée législative, Condorcet donne ce nom au citoyen qualifié pour assurer l'instruction du premier degré, qui « doit être universelle ». La Convention inscrit le mot dans la loi : l'article 1er du texte adopté le 12 décembre 1792 stipule que « les personnes chargées de l'enseignement dans les classes primaires s'appelleront instituteurs ». La féminisation du terme, comme celle du métier, ne s'impose que peu à peu : en 1782, l'auteur anonyme d'un Essai sur l'éducation des hommes et particulièrement des princes par les femmes parlait encore de la « femme-instituteur ».

Un métier suspect aux yeux des conservateurs.

• Quel que soit son titre, l'instituteur est, avant les lois Ferry, un individu de basse condition, mal payé, soumis aux notables et qui, chantre, bedeau, catéchiste, doit se consacrer avant tout au service de l'Église. Dans l'Histoire d'un sous-maître (1872), Erckmann et Chatrian ont laissé l'inoubliable portrait d'un fils de facteur qui, en 1816, juge « la profession d'instituteur la meilleure et la plus honorable de toutes », mais qui, lassé par les humiliations que lui cause son état, finit par y renoncer. Guizot et des libéraux de la monarchie de Juillet s'efforcent d'améliorer la formation des maîtres dans des écoles normales. Mais, sous la IIe République, le parti de l'Ordre redoute de voir « ces détestables petits instituteurs laïques », que Thiers voulait remplacer par des Frères, entretenir dans le pays des foyers de révolution. C'est pourquoi la loi Parieu, votée le 11 janvier 1850, deux mois avant la loi Falloux, accorde aux congréganistes des facilités d'accès à la fonction - la qualité de ministre d'un culte ou, pour les religieuses, une simple lettre d'obédience peuvent tenir lieu de brevet de capacité -, et permet aux préfets de révoquer les « mal-pensants ».

Un rôle public reconnu.

• Sous la IIIe République, l'État assure aux instituteurs et aux institutrices indépendance et considération. Mais il tarde à leur donner le traitement qui, pour Péguy, éditeur de Jean Coste, le pauvre instituteur de village d'Antonin Lavergne, comme pour les pionniers du syndicalisme enseignant, est dû au rôle civique et moral qu'ils tiennent dans la société. Les « primaires » - le mot est à la fois brandi comme un drapeau par les défenseurs de la « communale » et raillé par les détracteurs de ceux en qui Léon Daudet voit « les vrais maîtres de la cité moderne » - sont pourtant exclus, dans leur grande majorité, des études secondaires et supérieures. Dans la France contemporaine, marquée par de nouveaux problèmes sociaux, le souci de revaloriser l'enseignement primaire a incité l'État à allonger la durée de la formation des maîtres, assurée depuis 1991 dans des Instituts universitaires, et à remplacer le titre d'instituteur par celui de « professeur d'école ».

intellectuels

Dans son sens le plus général, le terme « intellectuels » désigne ceux qui, dans une société, participent à la création culturelle ou aux progrès du savoir, ainsi que ceux qui contribuent à diffuser et à vulgariser les fruits de cette création et les acquis de ce savoir.