Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Dubois-Crancé ou Dubois de Crancé (Edmond Louis Alexis),

militaire et homme politique (Charleville 1747 - Rethel 1814).

Issu d'une famille déchue de ses titres de noblesse pour dérogeance, lieutenant des maréchaux de France en 1789, il est élu député du Tiers aux États généraux et prête le serment du Jeu de paume. Patriote (il siège à gauche), membre du Club des jacobins, il est à l'Assemblée nationale constituante l'un des plus ardents défenseurs d'une « conscription vraiment nationale ». Selon lui, « tout citoyen doit être soldat et tout soldat citoyen ». Il dénonce donc le tirage au sort, « cette odieuse pratique qui est un véritable outrage » (12 décembre 1789). Élu à la Convention, il est à l'origine du principe de l'« amalgame » entre l'ancienne armée royale et les volontaires, prônant un recrutement et une organisation identiques afin de souder les deux composantes de l'armée républicaine. Il est membre du Comité de la guerre, général de brigade, commissaire auprès de l'armée des Alpes et participe au siège de Lyon insurgée (août-octobre 1793). Représentant du peuple auprès des armées de l'Ouest, il combat les Chouans (février-juin 1794). Suspect de « modérantisme » aux yeux de Couthon et de Robespierre, il doit au 9 Thermidor de ne pas être arrêté. Il entre alors au Comité de salut public, où il est en charge de la guerre. Au cours du débat sur la Constitution de l'an III, il défend le principe de l'égalité et la Déclaration des droits contre la Convention. Député des Cinq-Cents jusqu'en 1797, il devient ministre de la Guerre en septembre 1799. Hostile au coup d'État de Bonaparte, il se retire de la vie politique et militaire.

duc,

titre qui désigne, à partir du IIIe siècle, un chef militaire de l'armée romaine pourvu d'un commandement exceptionnel, dont la fonction principale est d'assurer la défense des provinces frontières de l'Empire.

Bien que l'organisation provinciale romaine ait disparu à l'époque mérovingienne, les ducs remplissent la même fonction de défense sur des territoires bien précis. Mais, au cours de la seconde moitié du VIIe siècle, on voit apparaître, dans les régions périphériques telles que l'Aquitaine, de grands personnages de l'aristocratie qui prennent le titre ducal pour signifier qu'ils exercent un commandement légitime et équivalent à celui du maire du palais. Les Carolingiens tentent de supprimer ce titre concurrent, ne lui reconnaissant que la signification de « chef militaire supérieur ». Cependant, parmi les comtes qui deviennent indépendants au Xe siècle, les plus puissants prennent le titre ducal pour marquer leur supériorité sur tous les comtes de la région, et exercent les pouvoirs souverains sur leur duché. Ils font directement hommage au roi, qui finit par reconnaître leur titre ; tous ces duchés font cependant retour à la couronne entre le XIIIe (Normandie) et le XVIe siècle (Bretagne).

Le roi peut aussi créer des duchés héréditaires, qu'il concède en apanage aux princes du sang. À partir du XVIe siècle, le titre de duc devient purement honorifique, même si les « ducs et pairs » ont le privilège de relever directement du parlement. On en comptait 43 en 1789. Il existait également des « ducs à brevet », créés par le roi à titre viager. Le titre ducal, aboli par la Révolution, fut rétabli par Napoléon Ier en 1806 : il en créa 35, dont 12 hors de France, et se réserva l'investiture de tous les duchés.

Duclos (Jacques),

homme politique (Louey, Hautes-Pyrénées, 1896 - Montreuil-sous-Bois, Seine-Saint-Denis, 1975).

Issu d'une famille paysanne pauvre, apprenti pâtissier monté à Paris en 1912, mobilisé en 1915 et fait prisonnier en 1917, le jeune Duclos est profondément marqué par l'expérience de la Grande Guerre. Sa vie militante débute en 1919, à l'Association républicaine des anciens combattants (ARAC), et se poursuit au Parti communiste, auquel il adhère dès 1920. Ses dons de propagandiste et son éloquence chaleureuse lui assurent une promotion rapide : membre du comité central dès 1926, député de la Seine de 1926 à 1932, il accède au bureau politique en 1931. Obéissant aux directives de l'Internationale communiste, il milite avec ardeur pour la formation du Front populaire, à partir de 1934 ; élu à nouveau député en mai 1936, devenu vice-président de la Chambre, il joue un rôle clé dans le fonctionnement de la coalition au pouvoir, tout en appliquant, sans faillir, la politique de stalinisation du parti. Après la signature du pacte germano-soviétique (août 1939) et la dissolution du Parti communiste en septembre, il contribue, en tant que responsable du PCF clandestin, de 1940 à la Libération, à mettre en œuvre les consignes successives dictées par Moscou. Après la brève expérience de la participation communiste au gouvernement (tripartisme formé par le PCF, la SFIO et le MRP), il prend une part active dans le durcissement des années 1947-1952, jouant notamment un rôle déterminant dans l'éviction de deux dirigeants historiques du parti, André Marty et Charles Tillon. À la mort de Maurice Thorez (1964), Jacques Duclos reste le représentant de la vieille garde de l'appareil communiste, qui se montre réservée à l'égard de la déstalinisation. Candidat à l'élection présidentielle de 1969, il réalise une brillante prestation (21,5 % des voix), et exerce jusqu'à sa mort une grande influence sur la nouvelle direction du PCF et sur son chef, Georges Marchais.

Ducos (Pierre Roger),

homme politique (Montfort, Landes, 1747 - Ulm, Allemagne, 1816).

Député effacé sous la Révolution, Ducos est surtout connu pour avoir favorisé, avec Sieyès, le coup d'État des 18 et 19 brumaire an VIII (9 et 10 novembre 1799).

Cet avocat ne joue qu'un rôle local de 1789 à 1792 - il est alors procureur de la commune de Dax et président du tribunal criminel des Landes -, avant d'être élu à la Convention, où il fait partie de la Plaine, et d'entrer au Comité des secours publics. S'il vote pour la mort et contre le sursis lors du procès de Louis XVI, il se fait discret pendant la Terreur. Cependant, sous le Directoire, il s'oppose à l'élection de députés royalistes. Réélu en 1795, il siège au Conseil des Anciens jusqu'en 1798, voit ses deux réélections suivantes invalidées et reprend ses fonctions au tribunal criminel du département des Landes. Après le coup d'État du 30 prairial an VII (18 juin 1799), il entre au Directoire sur proposition de Sieyès, qu'il sert fidèlement. Le 18 brumaire an VIII, il rejoint les conjurés et démissionne du Directoire, permettant ainsi le vide institutionnel. Sa docilité lui vaut d'être choisi comme l'un des trois consuls provisoires, avec Sieyès et Bonaparte. Sans envergure politique, il est par la suite couvert d'honneurs, devient sénateur en 1800, grand officier de la Légion d'honneur en 1804 et comte de l'Empire en 1808. En 1815, il se rallie à Napoléon et siège à la Chambre des pairs. Sous la seconde Restauration, il est proscrit comme régicide. Il meurt dans un accident, près d'Ulm.