Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
S

septembre 1793 (journées des 4 et 5), (suite)

C'est le 5 au soir que la Terreur est mise à l'ordre du jour à la Convention. La partie s'est jouée à quatre : le peuple de Paris, exaspéré par la crise de subsistances, la Commune de Paris, le Club des jacobins et la Convention nationale.

L'émeute du 4 est d'abord une émeute de subsistances. En début d'après-midi, deux mille ouvriers se rassemblent en place de Grève et rédigent une pétition adressée à la Commune de Paris, réclamant que celle-ci s'occupe « des moyens que le salut public exige » pour que chacun puisse se procurer du pain. Les pétitionnaires refusent d'entendre les promesses du maire Pache lorsque le procureur de la Commune, Chaumette, s'écrie : « C'est ici la guerre des riches contre les pauvres. » Hébert, second de Chaumette, appelle le peuple à un rassemblement massif le lendemain, autour de la Convention.

Le 5 septembre au matin, les manifestants rédigent un texte qui réclame l'établissement de l'armée révolutionnaire pour organiser le ravitaillement en donnant « force à la loi ». Ce texte doit être lu devant les conventionnels en présence du peuple. Or, une députation du Club des jacobins, soutenue par des délégués des 48 sections parisiennes, se présente également devant la Convention et exige la mise à l'ordre du jour de la Terreur. Si les conventionnels entendent cette injonction, préparée par Hébert et Royer, ils n'y mettent pas vraiment le même contenu que les pétitionnaires : ces derniers espèrent que le salut public sera incarné par l'armée révolutionnaire, alors que les conventionnels entendent mettre en œuvre une justice sévère afin que le peuple ne soit pas tenté de se faire justice lui-même.

septembre 1870 (révolution du 4),

révolution qui mit fin au Second Empire et dont sont issues la proclamation de la IIIe République et la création du gouvernement de la Défense nationale.

La guerre.

• Consolidé par le plébiscite du 8 mai 1870, le régime impérial n'était pas menacé à court terme par l'opposition républicaine. Mais la guerre contre la Prusse crée une situation nouvelle : l'impératrice est nommée régente ; Napoléon III quitte son palais de Saint-Cloud pour prendre le commandement d'une armée promise à une victoire facile. Or, les défaites se succèdent à partir du 6 août. L'empereur ayant été jugé responsable des revers, le commandement est confié à Bazaine, dès le 12. Et, c'est aux souvenirs de 1792 que l'opposition comme le gouvernement font alors appel pour inciter les Français à résister à l'invasion. Si la Saint-Napoléon, le 15 août, est à peine célébrée, si la foule manifeste son mécontentement à Paris dès le 9 août, lors de la convocation des Chambres, c'est l'annonce de la capitulation de Sedan, le 3 septembre, qui achève de saper la légitimité morale du régime.

Défaite militaire et révolution politique.

• Affichée à Paris et dans les grandes villes de province dès le matin, la nouvelle de la défaite provoque des réactions de colère. À Lyon, l'hôtel de ville est occupé dès 8 heures, le drapeau rouge arboré et la République proclamée par un Comité de salut public. À Marseille, la foule se porte à la préfecture, réclame la libération de prisonniers politiques, décapite une statue de Napoléon III ; le soir, le conseil municipal proclame la République et un Comité de salut public est, là aussi, constitué. À Bordeaux, la foule jette la statue de Napoléon III dans la Garonne. À Paris, enfin, aux manifestations mouvementées du 3 au soir sur les boulevards succède, le 4, vers midi, un rassemblement place de la Concorde, à l'occasion de la séance extraordinaire du Corps législatif. La foule, dans laquelle se trouvent de nombreux gardes nationaux, réclame la déchéance de l'Empire et la République. Elle envahit le Palais-Bourbon puis la salle des séances, pendant que les députés discutent dans les bureaux trois propositions allant de l'instauration d'une régence au vote de la déchéance. Ne parvenant pas à obtenir l'évacuation des lieux, Gambetta se résout à proclamer « révolutionnairement » la déchéance de l'empereur au nom du suffrage universel. Avec Jules Favre, il entraîne ensuite la foule à l'Hôtel de Ville pour y proclamer la République et former un gouvernement provisoire, le « gouvernement de la Défense nationale ». Dans le même temps, les Tuileries, d'où s'est enfuie l'impératrice, sont envahies par la population. Sur les grilles du palais comme dans les rues de Paris, les symboles de l'Empire sont détruits. À Paris comme dans les grandes villes républicaines, le nouveau régime est salué avec enthousiasme et fêté par des chants et la plantation d'arbres de la liberté.

La mémoire de l'événement.

• Mais Paris est assiégé dès le 19 septembre. En janvier 1871, la défaite puis, en mai, la Commune de Paris sont l'occasion d'une remise en question de la « révolution » du 4 septembre. La majorité monarchiste de l'Assemblée élue en février décide une enquête parlementaire sur les actes du gouvernement de la Défense nationale qui fait le procès du 4 septembre. La célébration de l'événement est interdite. Dans la presse, de vifs débats opposent partisans et détracteurs de la révolution républicaine, accusée d'avoir provoqué la Commune et la perte de l'Alsace-Lorraine. Le choix des républicains modérés en faveur du 14 juillet, devenu fête nationale en 1880, marginalise le 4 septembre. Il faut attendre le cinquantenaire de 1920 pour que le souvenir en soit célébré ... le 11 novembre ! Le « second Sedan » de 1940 altère encore le souvenir de l'événement. La crise de la IVe République conduit cependant de Gaulle à en mobiliser le symbole : il présente son projet de Constitution le 4 septembre 1958, place de la République.

Sergents de La Rochelle (affaire des Quatre),

épisode politique et judiciaire lié aux complots de la charbonnerie contre la Restauration (mars-septembre 1822).

Les quatre sergents - Bories, Pommier, Goubin et Raoulx - faisaient partie d'une « vente » militaire de la charbonnerie, créée en 1821 dans le 45e régiment d'infanterie en garnison à Paris. En mars 1822, le régiment est transféré à La Rochelle, où les quatre hommes sont dénoncés par des camarades, après de nombreuses imprudences. Les interrogatoires révèlent les réunions secrètes, la structure du mouvement de la charbonnerie, et le projet de soutenir le complot - avorté - du général Berton à Saumur (février 1822). Le procès est l'événement politique du mois d'août 1822. Les avocats des sous-officiers, membres importants de la société secrète, obtiennent la rétractation de leurs aveux pour protéger les chefs (Manuel, La Fayette) et sauver l'organisation. Malgré l'insuffisance des preuves, le gouvernement et le procureur général de Marchangy saisissent l'occasion de faire un exemple adressé à la France et à l'Europe. Les quatre sergents, ayant obtenu à la demande l'un d'eux (Bories) de rester solidaires, sont condamnés à mort, et guillotinés le 21 septembre 1822. L'affaire illustre l'échec de la stratégie insurrectionnelle de la charbonnerie, même si l'opposition libérale exploite le procès contre le gouvernement. Mais la rigueur de la sentence et la mort courageuse d'hommes jeunes suscitent une grande émotion, surtout à Paris. Ils deviennent aux yeux du peuple des martyrs de la cause de la liberté.