épisode de la Seconde Guerre mondiale qui fait suite à l'offensive allemande du 10 mai 1940 et se prolonge jusqu'au 22 juin.
Entre 6 et 7 millions de Français, désemparés par la débâcle de l'armée française, quittent alors le nord du pays et la région parisienne, se jetant sur les routes dans le plus grand désordre pour échapper à l'avance de l'armée allemande. Le terme « exode », employé à l'époque pour désigner la fuite des populations civiles, renvoie à la sortie des Hébreux hors d'Égypte. Il souligne l'ampleur du phénomène et la gravité du traumatisme vécu par les populations.
Les étapes d'une fuite en avant.
• Il faut d'abord mettre à part un premier mouvement, organisé celui-là, qui vise, compte tenu de l'expérience de la Première Guerre mondiale, à mettre à l'abri d'une occupation ennemie les administrations, les industries et une partie de la population civile. Un plan d'évacuation a été élaboré, qui attribue à chacun une zone de repli dans le centre et l'ouest de la France, et qui commence à être appliqué dès l'automne 1939. Mais les opérations militaires, qui débutent le 10 mai 1940, et les défaites françaises donnent à ce mouvement une ampleur considérable et un aspect anarchique.
Les Belges et les Luxembourgeois se sont mis en marche à la fin mai et sont suivis, au début du mois de juin, par les habitants du nord de la France. Ensuite, la grande masse des réfugiés - au moins 2 millions de personnes - est constituée par les habitants de la région parisienne, qui prennent la route le 10 juin à l'annonce de la rupture de la ligne Weygand, censée protéger la capitale. Les voies menant à la Loire, « parée des plus grandes vertus stratégiques » (Jean-Pierre Azéma), sont encombrées par des équipages hétéroclites, des files ininterrompues qui avancent sous la menace de l'aviation allemande et où se mêlent population civile et lambeaux d'armée en déroute. La destruction progressive des ponts sur la Loire afin de freiner l'armée ennemie accroît encore le désordre : le 17 juin, le fleuve devient infranchissable et les populations ont le sentiment d'être prises au piège. Dans la même période, l'annonce de l'entrée en guerre de l'Italie provoque dans le Sud-Est un exode d'une moindre ampleur.
Drames individuels et effondrement collectif.
• Moment terrible où se jouent un nombre incalculable de drames individuels, l'exode voit s'exprimer une grande variété de comportements, qui vont de la solidarité à l'égoïsme le plus étroit. À côté de l'accueil chaleureux de certains, les témoignages ne manquent pas sur d'autres qui profitent du passage de populations en détresse pour monnayer leurs services. Dans les zones abandonnées, les scènes de pillage se multiplient, et qui ne sont pas toujours le fait de l'armée allemande.
Cet exode massif et anarchique est alimenté par des peurs ancestrales et par des rumeurs sur la brutalité des envahisseurs, par le souvenir des guerres de 1870 et de 1914, et par les images d'actualité qui ont présenté l'invasion de la Pologne et de la Tchécoslovaquie ainsi que les destructions de la guerre d'Espagne. Les bombardements allemands, soigneusement ciblés, accentuent la panique. L'exode se nourrit en outre du désarroi des populations, qui constatent la faible résistance de l'armée française, l'incapacité du gouvernement - qui lui-même se replie à Tours, puis à Bordeaux - à régler la situation, la défaillance des autorités civiles qui déménagent avant même les habitants au lieu d'en encadrer le flux, et la démission des élites économiques, politiques et intellectuelles qui ont fait leurs valises dès la fin du mois de mai.
Ce moment de panique collective, révélateur de la décomposition générale du pays, de son manque de préparation psychologique et, finalement, de son refus de la guerre déjà si perceptible au moment des accords de Munich, permet de mieux comprendre pourquoi la chute de la République et l'installation du régime de Vichy sont si facilement acceptées. Pour beaucoup, l'armistice apporte un soulagement, la nouvelle de sa signature marquant d'ailleurs le signal du reflux.