Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Saint-Jacques (chemins de), (suite)

Très fréquenté pendant le Moyen Âge, le pèlerinage décline à la fin du XVsiècle. Les chemins désertés par les pèlerins subissent aussi les conséquences des relations difficiles entre les monarchies française et espagnole à l'époque moderne. Ce n'est qu'à la fin du XIXsiècle, au moment où se définit le catholicisme social, que les chemins de Saint-Jacques connaissent à nouveau une importante fréquentation. En 1989, le site a accueilli les quatrièmes Journées mondiales de la jeunesse.

Saint-Just (Louis Antoine Léon),

homme politique (Decize, Nièvre, 1767 - Paris 1794).

Saint-Just, acteur majeur du Gouvernement révolutionnaire, n'a pas 27 ans lorsqu'il monte sur l'échafaud, le 10 thermidor an II (28 juillet 1794). Il vient d'écrire : « Je méprise la poussière qui me compose et qui vous parle, on pourra la persécuter et faire mourir cette poussière ! Mais je défie qu'on m'arrache cette vie indépendante que je me suis donnée dans les siècles et dans les cieux. » Naît alors le mythe de l'« archange de la Terreur ». Mais derrière la légende, ces quelques phrases sont à prendre à la lettre. L'idée d'indépendance est en effet fondatrice de sa philosophie politique, où l'action est indissociable des principes qui donnent sens à la vie.

La découverte d'une société rurale communautaire.

• Saint-Just a d'abord grandi dans la maison bourgeoise de son grand-père maternel, dans le Nivernais, puis, à partir de 1776, à Blérancourt, où son père, capitaine de cavalerie, a hérité de biens de sa famille de fermiers picards. Rebelle, il fugue dès sa sortie du collège de Soissons ; sa mère le fait arrêter pour un vol et obtient contre lui une lettre de cachet. Pendant ses six mois de détention, il écrit huit mille vers de satire des institutions politiques et religieuses. Mais c'est le spectacle de l'organisation des communautés villageoises de Picardie qui fonde ses conceptions philosophiques. Dans le manuscrit De la nature, de l'état civil, de la cité ou la règle de l'indépendance du gouvernement, Saint-Just donne une expression rétrospective de la société rurale (Miguel Abensour). Le régime agraire de Picardie, pays de champs ouverts, reposait sur la propriété et l'exploitation collective des biens communaux, sur un jeu de contraintes collectives et de droits d'usage limitant la propriété privée, à l'origine d'une forte discipline sociale, d'une solidarité remarquable. Les idées de Saint-Just sur l'homme de droit social, producteur au sein d'un groupe humain plus vaste et qui l'englobe, l'idéal d'une société non déchirée, lieu d'harmonie et d'égalité, en sont directement issues. L'union nécessaire et naturelle doit prévaloir sur l'union volontaire. Saint-Just prend part activement aux conflits contre la réaction seigneuriale et l'usurpation des biens communaux, puis, à partir de 1789, soutient et partage les combats des paysans contre les privilèges. À 25 ans, en septembre 1792, il est élu pour représenter ces paysans à la Convention nationale.

Puissance du discours, radicalité de l'engagement.

• Il s'associe d'emblée aux montagnards, et se fait connaître en prononçant le 13 novembre 1792 un grand discours lors du procès de Louis XVI, dont il réclame la tête. Il développe alors une conception radicale des liens de civilité et démontre que le roi doit être jugé non pas en citoyen mais en ennemi étranger, selon les règles du droit des gens. La Convention découvre un orateur jeune, enflammé et convaincant.

Le 30 mai 1793, il entre au Comité de salut public et participe à la rédaction de la nouvelle Constitution, mais c'est comme acteur du Gouvernement révolutionnaire qu'il donne toute la mesure de son engagement. Représentant en mission aux armées du Rhin et du Nord, il organise les victoires de Landau et Fleurus. Rapporteur attitré du Comité de salut public, il joue un rôle fondamental dans la « crise des factions » ; il prononce le discours du 23 ventôse an II annonçant que les hébertistes constituent une faction de l'étranger, puis celui du 11 germinal contre les dantonistes, enfin celui du 26 germinal an II qui referme la crise et propose de faire entrer la révolution dans les mœurs en fondant des institutions civiles. Ces institutions doivent rendre naturelle l'union des citoyens, et garantir leur indépendance - qui n'est pas l'isolement mais la possibilité de construire des relations amicales et réciproques. C'est aussi au nom de cette indépendance nécessaire que sont prononcés les discours sur les décrets de ventôse qui visent à redistribuer les richesses des ennemis de la patrie aux patriotes indigents. En effet, selon les mots de Saint-Just, « les malheureux sont les puissances de la terre ; ils ont le droit de parler en maîtres aux gouvernements qui les négligent » (8 ventôse) ; « le bonheur est une idée neuve en Europe » (13 ventôse).

C'est dans les Fragments d'institutions républicaines que Saint-Just tente de fixer les conquêtes révolutionnaires, mais la conscience de l'action impossible, d'une révolution glacée, le hante : « Le jour où je me serai convaincu qu'il est impossible de donner au peuple français des mœurs douces et énergiques, sensibles et inexorables pour la tyrannie et l'injustice, je me poignarderai. » Les 9 et 10 thermidor, lors de sa chute, Saint-Just est resté silencieux.

Saint-Médard (convulsionnaires de),

nom donné à des jansénistes illuminés en proie à des phénomènes de transes au XVIIIe siècle.

Le diacre François Pâris meurt en 1727 après avoir mené une vie pieuse, conforme au jansénisme. La rumeur que des miracles se produisent sur la tombe du « saint » homme, au cimetière Saint-Médard, à Paris, se répand très vite. Les pèlerins s'y pressent nombreux et sont témoins de phénomènes extraordinaires : certains d'entre eux sont saisis de spasmes convulsifs, prédisent l'avenir ou guérissent de leur paralysie, telle Melle Hardouin, en août 1731. Au début, certains prêtres y voient un signe de Dieu en faveur du jansénisme. Bientôt l'hystérie s'empare des convulsionnaires : des femmes se soumettent en hurlant à des supplices divers... Les manifestations jansénistes deviennent trop voyantes. L'enquête du parlement et l'intervention de l'archevêché de Paris conduisent à la fermeture du cimetière par ordonnance royale (janvier 1732) ; les parlementaires qui soutiennent le jansénisme sont exilés. En février, un pamphlet est affiché sur la porte du cimetière : « De par le Roi, défense à Dieu de faire miracle en ce lieu ». Pourtant, les réunions des convulsionnaires se poursuivent en secret et redoublent d'intensité : les femmes « se faisaient fouetter sans qu'il y parût le lendemain ; on leur donnait des coups de bûches sur leur estomac bien cuirassé, bien rembourré, sans leur faire de mal [...] ; enfin comme tous les arts se perfectionnent, on a fini par leur enfoncer des épées dans les chairs, et par les crucifier » (Voltaire, Dictionnaire philosophique, article « convulsions »). Ce phénomène collectif, qui se poursuit jusque dans les années 1780, s'inscrit dans la lutte entre la monarchie et les jansénistes menée depuis Richelieu : il constitue la dernière expression notable et publique de ce courant de dévotion, l'application de la bulle Unigenitus (1713) l'ayant déjà considérablement affaibli. L'unité religieuse, tant recherchée par Louis XIV depuis la révocation de l'édit de Nantes (1685) et la destruction de Port-Royal (1711), semble enfin rétablie. Pourtant, le jansénisme ne s'éteint pas, un esprit de résistance perdurant durant tout le XVIIIe siècle.