Revue des Deux Mondes,
publication fondée en août 1829. Elle se veut d'abord le « journal des voyages » et un « recueil de la politique, de l'administration et des mœurs ».
Reprise deux ans après sa création par François Buloz, elle devient bimensuelle. Par la contribution d'académiciens, d'universitaires et d'hommes de lettres, le directeur-gérant en fait le point de ralliement de la monarchie constitutionnelle et de la bourgeoisie libérale. La Revue des Deux Mondes publie dès lors tous les auteurs romantiques restés les plus célèbres (de Chateaubriand à Hugo) ; Sainte-Beuve et Gustave Planche y critiquent les pièces de Scribe ou de Dumas, les romans de Stendhal, Mérimée, Heine et Tourgueniev, tous publiés dans la revue. En 1855, plus de 10 000 abonnés y découvriront les poèmes d'un inconnu, Charles Baudelaire.
Après la révolution de février 1848, Buloz définit sa revue comme « un grand centre littéraire » : le gouvernement romantique de Lamartine sert ses intérêts, et il s'enorgueillit d'ouvrir la Revue des Deux Mondes à des préoccupations sociopolitiques. Sous l'Empire, il manifeste une opposition de moins en moins feutrée et conquiert un large public en confiant chaque rubrique à des spécialistes : les beaux-arts à Delacroix puis à Henri Regnault, les sciences à Littré, Taine et Claude Bernard ; la politique et l'économie à Victor Cousin, Guizot, Quinet ; l'histoire à Renan et Michelet. Prenant la succession de son père en 1877, Charles Buloz conserve la même ligne éditoriale.
Mais l'arrivée de Ferdinand Brunetière, en 1893, oriente la Revue des Deux Mondes vers un catholicisme violemment antidreyfusard, qui se transforme, au XXe siècle, en un conservatisme et en un traditionalisme de droite. Brunetière publie essentiellement « les œuvres ayant une haute portée morale et sociologique, même religieuse », tels les romans psychologiques de Paul Bourget, les articles de Bédier et de Sorel, et ce jusqu'à sa mort en 1906. Après une ouverture vers le centre qui lui coûte un nombre non négligeable d'abonnés, la Revue des Deux Mondes est reprise en 1915 par René Doumic, qui en fait la porte-parole des intellectuels, des hommes politiques et des militaires de droite, et le flambeau du nationalisme. La revue atteint en 1939 sa plus large diffusion (93 pays). Après une interruption de quatre ans à la Libération, les directeurs successifs ont poursuivi, jusqu'à nos jours la politique éditoriale de cette revue séculaire et conservatrice.
Reynaud (Paul),
homme politique (Barcelonnette, Alpes-de-Haute-Provence, 1878 - Paris 1966).
Avocat, député (de 1919 à 1924 et de 1928 à 1940), plusieurs fois ministre à partir de 1930 dans les gouvernements d'André Tardieu et de Pierre Laval, il entre en 1938 dans le cabinet d'Édouard Daladier, chargé d'abord des Sceaux, puis des Finances. Il succède au chef radical le 21 mars 1940 comme président du Conseil, dans une situation de crise du pouvoir. Sa réputation est alors celle d'un homme de droite capable de prises de position fermes et originales quant à la nécessité de dévaluer ou d'appliquer les conceptions militaires du général de Gaulle, et qui, par ailleurs, a dû davantage affronter les foudres de sa propre famille politique que celles de la gauche. Antimunichois, il resserre les liens avec la Grande-Bretagne, organisant avec cette dernière une expédition militaire en Norvège (Narvik, avril 1940) et se montre partisan de la poursuite de la guerre après la débâcle de mai-juin. Mais, Reynaud est isolé dans un cabinet hétérogène, où il a appelé de Gaulle et ... Pétain. Il démissionne le 16 juin et cède la place au Maréchal, qui le fait emprisonner, puis comparaître au procès de Riom. Il est déporté de 1942 à 1945. Revenu à la politique, il s'engage en faveur de l'Europe, un des sujets qui, avec la politique à l'égard de l'OTAN, l'éloigne du général de Gaulle, auquel il a apporté son soutien en 1958.
Rhin (Confédération du),
réunion d'États allemands autour de la Bavière, du Wurtemberg et du grand-duché de Bade, sous la protection de l'« Empereur des Français », entre 1806 et 1813.
Dans sa lutte contre une Autriche affaiblie, Napoléon cherche à se constituer une clientèle auprès des princes de l'Allemagne du Sud et des confins rhénans. Outre une active politique matrimoniale - Jérôme Bonaparte épouse Catherine de Wurtemberg, et Eugène de Beauharnais la fille du roi de Bavière -, il obtient la création, le 16 juillet 1806, d'une Confédération du Rhin (Rheinbund), qui compte à l'origine seize États. Cet acte entraîne la disparition du Saint Empire romain germanique (6 août 1806) et, dès 1808, le Rheinbund comprend 38 États, soit presque toute l'Allemagne, à l'exception de la Prusse. Ce système est pour Napoléon une simple alliance diplomatique, qui peut mettre à sa disposition une armée de 63 000 hommes ; il constitue une marche militaire, une « zone tampon » entre la France et l'Autriche, la Prusse et la Russie. Certes, l'Empereur souhaite que les membres de la Confédération se dotent d'institutions inspirées de celles de la France, mais il n'intervient pas dans les affaires intérieures des États. Enfin, aucune institution fédérale n'est créée. Le Rheinbund n'est pas davantage une union douanière et les produits allemands ne bénéficient d'aucune préférence en France. Cette construction se désagrège d'ailleurs rapidement, au lendemain de la défaite française à la bataille de Leipzig (octobre 1813).
Loin d'être une préfiguration de l'unité allemande, la Confédération du Rhin est néanmoins à l'origine d'une politique de modernisation des institutions (centralisation, sécularisation des biens de l'Église, etc.). Après 1814, la plupart des États allemands se doteront d'une Constitution et la Rhénanie deviendra le foyer du libéralisme et du nationalisme allemands.
Ribemont-sur-Ancre,
important sanctuaire celtique belge du IIIe siècle avant J.-C., auquel succéda un vaste ensemble gallo-romain.
Situé sur une pente dominant la rivière Ancre, le sanctuaire de Ribemont (Somme) se compose principalement, comme celui de Gournay-sur-Aronde et bien d'autres, d'un fossé quadrangulaire d'environ 50 mètres de côté, lui-même entouré d'un enclos elliptique plus vaste. Ce fossé atteint 5 mètres de largeur et 4 mètres de profondeur ; il était sans doute doublé d'une palissade et d'une levée de terre. Les éléments qu'on y a mis au jour témoignent de complexes rituels liés à la guerre. À l'extérieur ont été retrouvés les restes d'une soixantaine d'hommes en armes décapités, qui avaient sans doute été dressés en guise de trophées, avant de se décomposer ; ils portaient de nombreuses traces de blessures. À l'intérieur, dans chacun des deux angles déjà étudiés par les archéologues, étaient dressées des sortes d'« autels » quadrangulaires, de près de 2 mètres de côté, faits de membres humains empilés. Enfin, divers restes humains étaient dispersés le long du fossé, certains étant volontairement fragmentés. Au total, plus d'un millier de corps ont déjà été recensés, alors que les fouilles demeurent très partielles. La position du sanctuaire, à la périphérie du territoire des Ambiens et à la limite des territoires de deux autres peuples belges, suggère qu'il devait jouer un rôle fédérateur, sans doute à l'occasion de combats menés en commun. Il n'est cependant pas aisé de distinguer, dans le traitement des corps, entre ceux des ennemis tués et exposés, et ceux de guerriers morts au combat et honorés.