troupe dramatique instituée en 1680, et, par métonymie, la salle Richelieu au Palais-Royal qui, depuis 1799, est son principal lieu d'exercice.
Au milieu du XVIIe siècle, le paysage théâtral parisien compte (à l'exception des comédiens-italiens) trois troupes : les Comédiens du roi, installés à l'hôtel de Bourgogne, dans les anciens locaux des Confrères de la Passion ; la Troupe du roi, au Marais, héritière de comédiens ambulants arrivés de Rouen en 1629, avec Corneille dans leurs bagages ; et l'Illustre Théâtre de Molière, devenu « Troupe du roi au Palais-Royal » en 1665. À coups de débauchages d'auteurs et de comédiens, elles se disputent les faveurs des spectateurs, jusqu'à ce que la volonté centralisatrice de Louis XIV vienne y mettre bon ordre.
De la tutelle des politiques...
• Celle-ci s'exerça en deux temps : en mai 1673, quelques mois après la mort de Molière, ordre est donné à sa troupe de se fondre avec celle du Marais dans le nouveau théâtre de la rue Guénégaud ; sept ans plus tard, le 16 août 1680, du camp de Charleville, le roi exige la fusion de la troupe de l'hôtel de Bourgogne avec celle de l'hôtel de Guénégaud. Le 21 octobre, une lettre de cachet officialise la naissance de la Comédie-Française, « composée des acteurs et actrices dont la liste sera arrêtée par sa majesté » : vingt-sept comédiens sont ainsi regroupés autour de La Grange, premier « doyen » de la Compagnie. En échange du monopole - « défense [est faite] à tous les autres comédiens français de s'établir dans la ville et faubourgs de Paris » - et des pensions, le pouvoir impose à la troupe de jouer tous les jours, exerce un contrôle sur le répertoire et les distributions via l'intendant des menus plaisirs ou la dauphine. Au fil des décrets et des textes réglementaires, au gré des déménagements, en fonction de la personnalité des comédiens, une véritable microsociété s'organise, reflet des soubresauts de l'histoire. Ainsi, la tourmente révolutionnaire, qui supprime les pensions et autorise la multiplication des scènes, fait-elle éclater la troupe, traversée par les oppositions politiques. Reformée en 1799 (ses membres signent un acte de société le 17 avril 1804), elle retrouve sous l'Empire un quasi-monopole, que le décret de Moscou (15 octobre 1812) vient confirmer : les sociétaires deviennent les « comédiens ordinaires de l'Empereur ». Détentrice du répertoire classique - qu'incarne Talma et que fera renaître Rachel -, la salle Richelieu laisse échapper, malgré quelques mémorables soirées (telle la première d'Hernani, le 25 février 1830), nombre de créations romantiques au profit d'autres scènes ; le public, comme le rappelle Musset en 1840, semble bouder les lieux : « J'étais seul l'autre soir au Théâtre-Français. [...] L'auteur n'avait pas grand succès. Ce n'était que Molière. »