Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
R

reconstruction,

nom donné à l'entreprise de relèvement de la France après la Libération. Le terme évoque la reconstruction des édifices détruits mais, dans les faits, la priorité a alors été donnée aux infrastructures et à l'industrie lourde, devant le logement.

Les infrastructures collectives et l'industrie lourde.

• La reconstruction de ces équipements, jugée prioritaire, est achevée en 1949. Après une première phase de déminage, de déblayage et de réparations (1944-1945), elle s'incarne dans la remise en état des ports de l'Atlantique et du réseau ferroviaire (9 000 kilomètres de lignes et 160 triages), dans la réouverture des canaux, dans le remplacement de milliers de ponts (au besoin, par des ouvrages provisoires), enfin dans la restauration des aéroports et des centrales électriques. À partir de 1948, l'aide Marshall permet d'accélérer cet effort, mais, comme nombre de travaux sont déjà engagés, elle favorise le rééquipement en machines plus que les infrastructures. La réédification de vastes ensembles manufacturiers anéantis sous les bombes (Peugeot, à Sochaux) n'est pas oubliée. Après l'hiver 1949-1950, l'énergie n'est plus rationnée, et le retour à un fonctionnement normal des transports contribue à la fin du rationnement des biens alimentaires et manufacturés.

Le logement.

• En 1940, 403 000 bâtiments ont été détruits ou gravement endommagés ; en 1944, 283 000 autres l'ont été du fait des raids alliés, avant le débarquement de Normandie. Au total, au 8 mai 1945, les destructions touchent 1 884 000 immeubles, dont 452 000 anéantis, et 1 432 000 sérieusement détériorés. Les destructions majeures de 1940 ont été diffuses, avec peu de « villes martyres » (à l'exception de Saint-Quentin, Arras, Cambrai, Dunkerque et Tours). En revanche, les destructions ultérieures ont affecté des régions entières, d'abord la Normandie (destruction quasi totale des villes du Calvados, de l'Eure, de la Seine-Maritime et de l'Orne) et la Somme, mais aussi le littoral varois, et nombre d'installations réparties sur l'ensemble du territoire (triages, dépôts ferroviaires, raffineries, biefs et ports fluviaux, usines de la métallurgie et de la mécanique), ainsi que plusieurs villes pivots de la défense allemande (Royan, Brest, Lorient, Saint-Dié, etc.).

La reconstruction, préparée par le gouvernement de Vichy en 1941-1943, confiée à Raoul Dautry en 1944 et à François Billoux en 1946, est néanmoins lente et tardive, faute de moyens. De 1946 à 1950, on construit 500 000 logements, dont les deux tiers pour l'habitat social des cheminots et des mineurs, pourtant assez peu atteint par la guerre. Seuls 150 000 logements remplacent vraiment des immeubles détruits. Le mouvement s'accélère en 1952 avec la loi Claudius-Petit, mais il s'intègre dans une politique plus large, rendue urgente par les besoins nés du baby-boom, de l'exode rural et de l'immigration.

Au début des années 1950, bien des communes relèvent à peine leurs ruines, mais nombre de plans de reconstruction, parfois conçus dès 1942, sont de vrais plans d'urbanisme : le tissu urbain est « aéré » pour s'adapter à la circulation automobile ; des quartiers sont spécialisés (résidence, activités commerçantes, etc.). Plusieurs de ces plans sacrifient aussi à un monumentalisme tel que l'a défendu Le Corbusier. Le béton armé, matériau de prédilection de l'architecte Perret, symbolise également cet élan dans de nombreuses villes (Amiens, Le Havre, Brest, Dunkerque...) ; ailleurs (en Normandie, à Tours), la tradition architecturale locale est mieux respectée. On peut situer au début des années 1960 la fin de la reconstruction, quand disparaissent les dernières « cités provisoires » de la Libération et de l'après-guerre dans les « villes martyres ». La vie quotidienne des Français reprend un cours normal, même si nombre d'entre eux demeurent des mal-logés.

référendum,

consultation électorale par laquelle les citoyens se prononcent par « oui » ou par « non » pour approuver ou rejeter une mesure proposée par le pouvoir politique.

Le référendum est une méthode de participation directe au gouvernement de la cité. Toutefois, en France, il a longtemps été considéré comme incompatible avec le régime représentatif, en raison des précédents historiques qu'ont été les plébiscites sous le Premier et le Second Empires, assimilés à des appels au peuple contre ses représentants.

Les aléas du référendum, de la Révolution à la III• e République.

Mode d'expression directe de la volonté générale, le référendum ne peut s'appliquer que si la souveraineté appartient au peuple. Sous la Révolution, la souveraineté est transférée du roi à la nation. Cependant, pour des raisons matérielles - un gouvernement direct n'est envisageable que si les citoyens sont en nombre restreint, comme dans les cités antiques - et surtout pour des raisons intellectuelles - l'idée que la nation ne peut s'exprimer que par des porte-parole qualifiés -, les premiers constituants n'envisagent pas plus de faire discuter que de faire ratifier la loi par l'ensemble des citoyens. En effet, selon la Constitution de 1791, la nation souveraine ne peut exercer ses pouvoirs que par « délégation » (article 3), c'est-à-dire par l'entremise de ses représentants. En revanche, la Constitution montagnarde de l'an I (24 juin 1793) prévoit des procédures de démocratie semi-directe : le peuple (les citoyens mâles réunis dans le cadre des assemblées primaires des départements) peut demander une modification constitutionnelle (article 115) et s'opposer aux propositions de lois élaborées par l'Assemblée unique (articles 57 à 60). En outre, un décret de la Convention du 21 septembre 1792 stipule qu'« il ne peut y avoir de Constitution que celle qui est acceptée par le peuple ». La Constitution de l'an I est effectivement soumise à une ratification durant l'été 1793. Mais le scrutin étant public et oral, l'abstention est importante, et seuls 11 610 électeurs osent voter « non », contre 1 801 918 qui approuvent le texte. Le principe référendaire, qui revient alors à un droit de censure populaire tant en matière constitutionnelle que législative, est donc institutionnalisé, même si le mot de « référendum » n'apparaît pas dans la Constitution de l'an I. Cependant, à peine promulguée, celle-ci est suspendue « jusqu'à la paix » et ne sera jamais appliquée.