Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
S

somptuaires (lois), (suite)

À travers ces lois somptuaires, le pouvoir royal cherche peut-être à empêcher l'appauvrissement de sujets dont certains sont aussi des contribuables, tout en limitant les sorties d'espèces qu'occasionne l'importation des denrées de luxe. Enfin, comme pour les lois somptuaires élaborées par d'autres États, il s'agit de mieux marquer des distinctions sociales menacées par les reclassements de la fin du Moyen Âge et de l'époque moderne.

Sorbonne,

établissement public d'enseignement supérieur dont l'origine remonte au XIIIe siècle. Alors simple collège, la Sorbonne finit par se confondre avec l'Université de Paris, avant de n'en être plus aujourd'hui qu'un des éléments.

Un prestigieux collège.

• Dès les débuts de l'Université de Paris, au XIIIe siècle, se pose le problème de l'accueil des étudiants pauvres. C'est à ce besoin que répondent des institutions charitables, les collèges, dont la Sorbonne est le plus prestigieux. Née en 1257, elle tire son nom de son fondateur, Robert de Sorbon (1201-1274). Ce dernier est issu d'une modeste famille ardennaise (il est originaire de Sorbon, près de Rethel), mais fait de brillantes études de théologie qui le mènent jusqu'au doctorat ; prédicateur apprécié, c'est un familier de Saint Louis, dont il est le confesseur et le chapelain. Fort de l'appui royal, il entreprend de rassembler les bâtiments, rentes et revenus qui permettront d'accueillir des étudiants en théologie, déjà maîtres ès arts mais sans ressources. Toutefois, la nouvelle fondation se distingue des autres collèges parisiens par ses hautes ambitions : d'une part, c'est aux étudiants de toute la Chrétienté que le collège de Sorbonne est ouvert ; d'autre part, il s'agit rien moins que de faire pièce aux établissements fondés par les ordres monastiques, et singulièrement les ordres mendiants, en offrant aux clercs séculiers le soutien matériel et pédagogique que franciscains et dominicains trouvent dans leurs couvents. Au reste, les premiers statuts insistent sur une vie collégiale, marquée notamment par les repas pris en commun.

Le nouveau collège bénéficie de nombreux dons, qui lui permettent de se doter d'une bibliothèque considérable : avec quelque 1017 volumes en 1291, c'est l'une des plus importantes de l'époque. De telles ressources font de la Sorbonne un pôle très attractif : de 16 à l'origine, le nombre des « sociétaires » (qui ne sont pas tous boursiers) passe rapidement à une trentaine ; il faut en outre leur ajouter les hôtes payants, qui, n'étant pas membres à part entière du collège ni astreints à la vie commune, profitent néanmoins de certains des avantages offerts. La Sorbonne assure en effet, grâce à des régents de qualité, une partie des enseignements jusque-là dispensés à domicile par les maîtres : les disputes qui s'y tiennent deviennent un des temps forts des études théologiques parisiennes, et l'une des épreuves de la licence de théologie (appelée pour cela « sorbonique ») doit s'y dérouler. Fait significatif, c'est dans la bibliothèque même de la Sorbonne que s'implante à Paris une innovation promise à un grand avenir : l'imprimerie (1470).

Les avatars de l'institution : du collège à l'université.

• À partir du XVIe siècle, les transformations de l'institution collégiale s'accélèrent. L'enseignement s'y ouvre largement aux humanités et, en 1542, les statuts de la faculté des arts reconnaissent que les leçons publiques ne pourront plus se faire qu'au sein des collèges, qui répartissent progressivement leurs élèves par groupes de niveau. Siège de la faculté de théologie, renforcée par de nouvelles chaires (six entre 1577 et 1625, dont une de philosophie grecque), accueillant de bril-lants étudiants formés au collège du Plessis-Sorbonne, la Sorbonne occupe une place de choix dans le paysage intellectuel de l'Ancien Régime. Au point qu'à l'ensemble disparate constitué par Robert de Sorbon, Richelieu substitue des bâtiments homogènes construits par Lemercier. Mais la Sorbonne tend progressivement à se muer en un groupe de pression ultraconservateur, dont Voltaire stigmatise la « bêtise ». Il est vrai que, disposant depuis la Réforme du pouvoir de censurer les livres, elle s'oppose aux idées nouvelles incarnées par les philosophes du XVIIIe siècle.

La suppression des collèges et facultés sous la Révolution semble condamner la Sorbonne, dont les biens, et notamment la riche bibliothèque, sont confisqués. Avec la création de l'Université napoléonienne, l'institution retrouve toutes ses chances, mais elle est désormais concurrencée dans la formation des élites par l'École normale supérieure. Entre Restauration et Second Empire, les vieux bâtiments de Richelieu accueillent par intermittence les facultés de lettres, sciences et théologie. Il faut toutefois attendre la réforme universitaire de 1877 pour assister à un véritable renouveau pédagogique et institutionnel. Dotée de bâtiments neufs et plus étendus, construits par Nénot entre 1885 et 1901, la nouvelle Sorbonne républicaine est le centre d'un réseau de revues allant de la Revue historique à l'Année sociologique, en passant par la Revue philosophique et les Annales de géographie. Mais son corps professoral tend par la suite à se scléroser, et c'est par exemple depuis une dynamique université périphérique, celle de Strasbourg, que Lucien Febvre et Marc Bloch mènent le projet des Annales, qui bouleverse le champ historiographique de l'entre-deux-guerres. Symbole d'une université encore mal adaptée à la démocratisation de l'enseignement, la Sorbonne est l'un des lieux centraux de la révolte étudiante en mai 1968. Ne disposant déjà plus du monopole de l'enseignement universitaire en région parisienne, elle est par la suite divisée en plusieurs entités, dont seulement une partie occupe encore les antiques locaux du Quartier latin.

sorcellerie.

La sorcellerie peut être considérée comme un ensemble de croyances magiques que certains êtres sont capables de mettre en action dans un but efficace, positif ou négatif.

Au Moyen Âge, elle colore fortement la culture paysanne en composant une sorte de synthèse avec le christianisme, et les élites les plus cultivées croient à l'efficacité de telles pratiques magiques. Pourtant, à partir de la fin du XVe siècle dans certaines régions de la Chrétienté, une terrible chasse aux sorcières est déclenchée. En France, les bûchers de sorcellerie flambent surtout entre 1580 et 1630. La doctrine démonologique, qui soutient l'action des juges, définit alors la sorcellerie comme une activité suscitée directement par le Démon, et les sorciers comme les adeptes d'une secte satanique organisée. Le principal résultat de la répression est d'avoir séparé nettement l'univers des « superstitions » paysannes de celui de la religion établie et de la pensée savante.