Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
C

commission royale, (suite)

La nomination de commissaires en tant qu'envoyés extraordinaires répond à la nécessité dans laquelle se trouve souvent le roi de passer par-dessus une administration ordinaire, composée d'officiers propriétaires de leur charge, qui lui obéit mal, avec lenteur ou réticence. Au XVIIe siècle, les lettres de commission se multiplient. Elles définissent généralement des missions ponctuelles, mais qui peuvent être spectaculaires, visant à marquer la présence du roi en tous lieux et dans tous domaines : rédaction des coutumes locales ; surveillance de l'application de décisions royales controversées ; tribunaux extraordinaires établis pour juger de cas spéciaux ayant trait aux Finances (les chambres de justice) ou aux turbulences nobiliaires (les Grands Jours). Par ailleurs, certaines fonctions n'existent que sous la forme de commissions : contrôleur général des finances, lieutenant général de police. Mais le vocabulaire peut être trompeur : en dépit de leur nom, les commissaires de police, tout comme les commissaires des guerres, sont des officiers.

Pour mener à bien les tâches d'autorité assignées par commission, le roi doit faire appel au personnel administratif disponible : tous les commissaires sont recrutés parmi les officiers - membres des cours souveraines (pour les tribunaux spéciaux), officiers des finances, ou maîtres des requêtes. Nommés par le roi, payés par lui, révocables à tout moment, ils sont tiraillés entre leur milieu, leur statut d'origine et leur mission extraordinaire qui les place au-dessus des autres officiers. Mais le loyalisme monarchique l'emporte le plus souvent.

Parallèlement aux commissions ponctuelles, la monarchie met en place, à partir de 1630, des commissaires chargés d'une mission de plus en plus étendue : les intendants de justice, de police et des finances, ou commissaires départis du Conseil, deviennent, sous le règne de Louis XIV, les principaux représentants du pouvoir central dans les provinces.

On emploie aussi l'expression de « commission extraordinaire » pour désigner les bureaux du Conseil royal chargés de juger rapidement certaines affaires d'aliénation de droits, de liquidation de dettes, etc. Il en va ainsi de la commission des réguliers de 1766, destinée à combattre les abus dans les ordres religieux.

communal (mouvement),

évolution historique à l'issue de laquelle certaines villes du royaume de France accèdent, aux XIe et XIIe siècles, à l'autonomie politique.

Le mouvement d'émancipation urbaine est une forme particulière de la normalisation et de la mise par écrit des droits seigneuriaux (vers 1050-vers 1150) par l'octroi de chartes de franchises. C'est à l'issue d'une conjuration (au sens propre, un serment collectif) que les bourgeois, prenant souvent appui sur des sociabilités antérieures (confréries, guildes des marchands), confèrent aux villes une personnalité juridique et politique. Celle-ci est consacrée par une charte de commune, qui fixe le partage des pouvoirs entre le corps de ville et les seigneurs, et ce, dans un idéal de concorde qui rapproche le mouvement communal du mouvement de paix.

La conquête de l'autonomie urbaine s'effectue parfois au prix d'une véritable insurrection (c'est le cas au Mans en 1070, à Cambrai en 1076, à Laon en 1112). Mais, le plus souvent, c'est à la faveur d'un compromis que les communautés urbaines obtiennent leurs privilèges. Tout est affaire de rapport de force : certains privilèges sont achetés au seigneur, d'autres lui sont arrachés. Et il est vrai que les seigneurs ecclésiastiques (qui condamnent le serment des laïcs) sont plus fréquemment hostiles à l'idée de commune, ce « mot nouveau et détestable » comme l'écrivait Guibert de Nogent au début du XIe siècle. Même si toutes les villes du royaume de France ne deviennent pas des communes (dans le Midi, la diffusion des consulats offre un autre modèle, collégial, de gouvernement urbain), le mouvement communal est globalement encouragé par les rois de France, surtout depuis le règne de Louis VI. Et, dans la seconde moitié du XIIe siècle, au moment où s'achève le mouvement communal, on ne le considère plus comme une transgression de l'ordre féodal.

Pourtant, le mouvement communal a pris dans la mémoire nationale un sens plus dramatique : au début du XIXe siècle, Augustin Thierry voyait dans la « révolution communale » du Moyen Âge l'acte de naissance de la bourgeoisie et des libertés publiques ; et, en 1871, la Commune de Paris se réfère à nouveau à ce passé mythique où le peuple des villes avait secoué le joug de ses maîtres. Libéraux et socialistes du siècle dernier partageaient une même conception de la commune médiévale : celle d'une démocratie urbaine arrachée à la féodalité. On sait aujourd'hui qu'il n'en est rien, et que le mouvement communal, loin d'être une rupture avec le système féodal, constitue le mode d'intégration des villes dans celui-ci.

Communauté,

groupement d'États formé, de la fin 1958 à 1960, par la République française et douze Républiques africaines et malgache, États autonomes auparavant territoires d'outre-mer (TOM).

Conformément au vœu du général de Gaulle de définir de nouveaux rapports entre la métropole et les territoires d'outre-mer, la Constitution du 4 octobre 1958 prévoit dans ses titres XII et XIII la mise en place d'une Communauté dotée de quatre institutions centrales. La présidence est exercée par le président de la République française. Un Conseil exécutif est institué, organe de coordination composé des chefs de gouvernement des États membres, du Premier ministre de la République française, des ministres français chargés des affaires communes et des « ministres conseillers de la Communauté » (qui ne sont pas membres du gouvernement français). Ses attributions devaient être précisées par une loi organique, mais celle-ci ne fut jamais votée. Le Sénat de la Communauté est l'organe législatif, composé de délégués du Parlement français et des Parlements des États membres. Enfin, la Communauté est dotée d'un organe judiciaire, la Cour arbitrale.

Les territoires d'outre-mer peuvent, sur un vote de leurs assemblées, choisir le statut d'État de la Communauté. Ils sont alors pleinement autonomes, les relations extérieures, la défense, la monnaie, la justice et l'enseignement supérieur demeurant du ressort de la Communauté. Sept territoires de l'A-OF, les quatre territoires de l'A-ÉF ainsi que Madagascar optent pour ce statut. La Guinée, en revanche, qui a massivement voté « non » au référendum du 28 septembre 1958, accède aussitôt à l'indépendance. Cinq territoires dispersés (Comores, Côte française des Somalis, Nouvelle-Calédonie, Polynésie, Saint-Pierre-et-Miquelon) choisissent de demeurer sous le régime de TOM.