Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
B

bière.

Les Gaulois adoraient le vin - qu'ils se procuraient à haut prix chez les marchands marseillais ou romains - mais ils ne produisaient que de la cervoise.

Cette bière sans houblon était fabriquée à la maison par les femmes, et devait être consommée rapidement. Des documents carolingiens des VIIIe et IXe siècles mentionnent déjà le houblon, mais il n'est encore qu'une des substances aromatiques que l'on ajoute à la cervoise pour en corriger le goût douceâtre : gentiane, sauge, lavande, coriandre, absinthe, poix extraite de la sève de résineux, lui font concurrence. Puis, vers la fin du XIVe siècle, il est employé systématiquement, ayant l'avantage de combattre certaines fermentations nuisibles, d'aider à la clarification de la bière et de permettre sa conservation.

La bière, à cette époque, est fabriquée par des professionnels, les brasseurs, qui sont apparus à partir du Xe siècle, et qui se sont constitués en corporations au XIIIe. Du moins dans les pays germaniques, car, en France, cette boisson a longtemps été reléguée aux frontières du royaume par le vin. En Alsace même, les paysans ont bu le vin de leur vigne jusqu'au XVIIIe siècle, laissant la bière, qu'il fallait acheter, aux gens des villes. À Paris, l'une des rares villes de France où l'on en fabriquait, la consommation n'était, à la veille de la Révolution, que de 9 litres par personne, contre 120 litres de vin. Mais, depuis lors, dans toute la France, la consommation de bière augmente, tandis que, dans les dernières décennies du XXe siècle celle de vin a baissé : en 1976, les plus de 20 ans consommaient déjà 71 litres de bière pour 104 de vin.

biface,

outil préhistorique en pierre, de forme ovale ou triangulaire, façonné sur ses deux faces, utilisé à partir de - 500 000 ans environ.

Autrefois appelé « coup-de-poing », le biface est caractéristique des civilisations du paléolithique inférieur et du début du paléolithique moyen de l'Afrique et de l'Eurasie. D'une longueur qui varie entre 5 et 30 centimètres, il est considéré comme le premier outil réellement symétrique, après les galets grossièrement taillés des périodes antérieures. Ce souci de symétrie témoigne de recherches esthétiques nouvelles, qui dépassent les nécessités fonctionnelles de l'objet. Néanmoins, certaines des civilisations du paléolithique inférieur, comme le clactonien ou le tayacien, n'ont pas utilisé le biface, alors que cet outil est caractéristique de l'acheuléen et, ultérieurement, d'une partie du moustérien.

Le biface est façonné « directement », en enlevant successivement à la pierre, par percussion, une série d'éclats, jusqu'à lui donner la forme souhaitée. Par la suite, au paléolithique moyen, ce sont les éclats eux-mêmes qui servent d'outils. Bien que l'imagerie populaire représente souvent le biface grossièrement emmanché pour former une hache, il semble qu'il ait surtout servi d'instrument tranchant, destiné à être tenu par l'un de ses côtés, souvent dépourvu de tranchant pour cette raison. Les bifaces n'existent plus dans l'outillage du paléolithique supérieur, celui d'Homo sapiens sapiens, qui, en France, apparaît vers - 30 000 ans.

Billaud-Varenne (Jean Nicolas),

homme politique (La Rochelle 1756 - Port-au-Prince, Haïti, 1819).

Fils et petit-fils d'avocat au siège présidial de La Rochelle, il fréquente un collège de l'Oratoire, puis étudie la philosophie et le droit avant de devenir à son tour avocat, en 1778. Inscrit au barreau du parlement de Paris en 1784, il écrit des brochures révolutionnaires, publiées en 1789, dans lesquelles il dénonce la superstition et le despotisme ministériel, et se montre admirateur de Montesquieu et de Rousseau.

Électeur de Paris dans la même section que Danton, Desmoulins et Marat, il adhère, en 1790, au Club des jacobins, où il intervient souvent, et songe à la République dès l'arrestation du roi à Varennes. Membre de la Commune insurrectionnelle de Paris en août 1792, puis substitut du procureur Manuel, il est élu député de Paris à la Convention, où il devient l'une des principales figures montagnardes et demande la mise en accusation des girondins. Le 6 septembre 1793, au lendemain de la journée qui voit la Terreur mise à l'ordre du jour, il entre au Comité de salut public. Ce représentant des sans-culottes, privilégiant le droit à l'existence et l'égalité, est l'un des artisans du gouvernement révolutionnaire et se distingue par son intransigeance politique. S'il opte pour l'élimination des hébertistes et des dantonistes, il est un acteur déterminant de la journée du 9 thermidor an II (27 juillet 1794) - qui voit la chute des robespierristes -, sans doute par hostilité au renforcement du pouvoir exécutif au sein du Comité dominé par Robespierre. Cependant, devant les progrès de la réaction thermidorienne, il démissionne du Comité le 1er septembre 1794 et devient l'une des cibles du nouveau pouvoir, qui, cherchant à décapiter l'opposition montagnarde, le dénonce comme « terroriste », responsable de la Terreur ou encore des massacres de septembre 1792. Sans attendre les conclusions de la commission constituée le 27 décembre pour enquêter sur sa conduite et sur celle de Collot d'Herbois, Vadier et Barère de Vieuzac, la Convention profite de la journée du 12 germinal an III (1er avril 1795) pour décréter leur déportation immédiate.

Déporté en Guyane, Billaud-Varenne rédige ses Mémoires (publiés en 1893) et refuse l'amnistie votée après le coup d'État du 18 brumaire, qu'il désavoue. Lorsqu'en 1816 la Guyane redevient française, il refuse l'administration de Louis XVIII et quitte Cayenne pour s'installer en Haïti. Entré dans la légende dès 1795, extrémiste sanguinaire pour les uns, proscrit sublime pour les autres, il demeure l'un des personnages les plus mal connus de la Révolution et l'une de ses figures les plus controversées.

billets de confession (affaire des),

crise religieuse et politique survenue sous le règne de Louis XV. Au XVIIe siècle, on exigeait des protestants convertis, pour leur donner les derniers sacrements, un billet attestant qu'ils s'étaient confessés.

 En 1746, l'évêque d'Amiens refuse les sacrements aux suspects de jansénisme qui ne présentent pas un billet d'un confesseur adhérent à la bulle Unigenitus. En 1752, l'archevêque Christophe de Beaumont veut appliquer cette méthode à la capitale. Rendue publique par la presse janséniste, l'affaire enflamme l'opinion. Le parlement de Paris condamne pour refus de sacrements des curés des diocèses de Paris, Troyes, Orléans et Chartres, qui ont laissé mourir sans viatique des fidèles renommés pour leur piété. Les magistrats dénoncent la tyrannie épiscopale et l'inquisition cléricale. Les remontrances du parlement de Paris au roi, en avril 1753, énoncent que « l'autorité des successeurs des apôtres est un ministère et non un empire ». Confronté à la grève des magistrats, Louis XV exile le parlement à Pontoise en mai ; toutefois, certains parlements de province (Rouen, Rennes, Aix...) poursuivent l'agitation. Finalement, le roi rappelle les exilés en septembre 1754, tout en imposant le silence sur les affaires religieuses. À l'occasion de la contestation janséniste, la crise révèle les progrès d'une conception nouvelle des rapports entre Église et pouvoir laïc, qui place l'autorité spirituelle sous la tutelle des juges.