juin 1792 (journée du 20),
manifestation révolutionnaire parisienne hostile à Louis XVI, antérieure de sept semaines à la chute de la monarchie.
La guerre déclarée en avril 1792 contre la Prusse et l'Autriche est alors mal engagée du côté français ; l'anxiété domine à Paris, et on crie, non sans raison, à la trahison et contre le « comité autrichien ». Dans ce contexte, le ministère jacobin (girondin) choisit la fermeté avec le vote de trois décrets : la déportation des prêtres réfractaires (27 mai), le licenciement de la garde constitutionnelle du roi (29 mai), la levée de 20 000 fédérés pour former un camp près de Paris (8 juin). Mais, le 11 juin, le roi met son veto aux décrets des 27 mai et 8 juin, s'attirant les remontrances du ministre Roland ; le 13, il congédie le ministère, qu'il remplace par des feuillants. Les girondins optent alors pour la démonstration de force, comptant sur l'agitation de quartiers populaires - qui prévoient une manifestation pour l'anniversaire du serment du Jeu de paume -, et sur la bienveillance de Pétion, le maire de Paris. Le 20 juin, des milliers de sans-culottes armés venus des faubourgs Saint-Antoine et Saint-Marcel portent des pétitions à l'Assemblée législative, puis envahissent sans difficulté les appartements du roi aux Tuileries, réclamant le retrait du veto et le rappel des ministres. Pendant plusieurs heures, Louis XVI fait face au cortège et aux imprécations populaires, devant coiffer le bonnet phrygien et boire à la santé de la nation. Mais il ne cède pas. Cette journée achève de diviser l'opinion et l'Assemblée, dont elle révèle face aux assauts populaires la fragilité et la paralysie, que seules la violence et l'illégalité semblent pouvoir résoudre.
juin 1832 (journées des 5 et 6),
mouvement insurrectionnel parisien. Le 5 juin 1832, une foule considérable assiste aux funérailles du général Lamarque, un député d'opposition très populaire, ancien général d'Empire.
Vers 17 heures, après les discours d'adieux, une échauffourée oppose des groupes de manifestants à des dragons, à hauteur du pont d'Austerlitz. Les premiers coups de feu entraînent une panique générale tandis que des groupes d'insurgés attaquent des postes de garde et érigent des barricades dans toute la partie est de la capitale. Les forces de l'ordre réagissent d'abord timidement, malgré une écrasante supériorité numérique ; puis la détermination du préfet de police Gisquet et du maréchal Lobau, ainsi que l'arrivée à Paris de Louis-Philippe en début de soirée coupent court aux hésitations du ministre de l'Intérieur Montalivet ou à l'attentisme du ministre de la Guerre Soult. Après les combats meurtriers de la nuit, notamment aux alentours de la place Maubert ou au passage du Saumon (dans le quartier Montmartre), les insurgés sont contenus au petit matin autour des rues Saint-Martin et Saint-Denis, ainsi qu'au faubourg Saint-Antoine. Les forces de l'ordre reprennent le contrôle de la situation avec le soutien d'une grande partie de la Garde nationale face à des insurgés mal organisés et mal armés. Les chefs de l'opposition au régime - Carrel, Laffitte, La Fayette - et les dirigeants des sociétés populaires désavouent l'insurrection qui les a pris au dépourvu. C'est le 6 juin vers 17 heures que les derniers insurgés sont écrasés au cloître Saint-Merri par les troupes de ligne.
Le régime de Juillet profite mal de cette victoire : la proclamation malencontreuse de l'état de siège au mépris de la Charte, puis l'application maladroite de la mesure discréditent les vainqueurs. Les procès mettent en lumière quelques fortes personnalités, tels le tailleur Victor Prospert, l'ex-commissionnaire Charles Jeanne, la marchande des quatre saisons Louise Bretagne. Dans une ville alors ravagée par le choléra et fragilisée par de graves difficultés économiques, les insurgés semblent avoir obéi à des motivations mêlées : rejet des souffrances quotidiennes, haine à l'égard d'un ministère considéré comme traître à la patrie et à la liberté, volonté de revivre les grandes heures de juillet 1830. Le régime et ses adversaires ne parviennent pas à tirer profit de l'événement et de ses conséquences, d'où l'oubli rapide dans lequel tombent ces deux journées. C'est surtout par le biais de la littérature que l'événement reste vivant : Victor Hugo en fait le cadre des combats des Misérables. Les morts de Gavroche, d'Enjolras ou du père Mabeuf sur les barricades de juin 1832 sont comme l'écho lointain des trois-cent cinquante victimes de ce terrible affrontement.
juin 1940 (appel du 18),
appel à la résistance lancé par le général de Gaulle sur les ondes de la BBC.
Le 18 juin 1940, à Londres, le général de Gaulle demande aux Français de refuser l'armistice et de poursuivre le combat. Bien qu'inconnu du grand public, de Gaulle s'est fait remarquer par des théories novatrices dans les années trente et est devenu, le 6 juin 1940, sous-secrétaire d'État à la Défense nationale dans le gouvernement de Paul Reynaud. Il y défend les positions « bellicistes » et se trouve chargé de diverses missions de liaison avec les Britanniques. Le 17 juin, après la démission de Reynaud, alors que Pétain s'apprête à annoncer la demande d'armistice, de Gaulle quitte Bordeaux en compagnie du général britannique Spears. Churchill, espérant susciter une résistance française, ouvre les ondes de la BBC à ce général sans notoriété, mais susceptible de convaincre les chefs militaires de l'empire.
L'appel du 18 juin exprime avant tout le refus patriotique de la défaite. En ce sens, il illustre le nationalisme du général de Gaulle de 1940, nourri autant par la lecture de Maurras que par celle de Barrès et de Michelet. Mais le texte est aussi politique : de Gaulle ne dénonce pas seulement l'armistice, il condamne les chefs militaires qui, ayant « formé un gouvernement », se sont « mis en contact avec l'ennemi ». Dès le 18 juin 1940, le combat de la France libre est donc clairement politique. La faute de Pétain, et bientôt celle du gouvernement de Vichy, réside dans la signature de l'armistice : refuser la défaite signifiera donc combattre l'État français. Le texte écarte toute idée de décadence nationale et impute l'entière responsabilité de la débâcle aux chefs militaires. Cette antinomie entre la nation, « saine dans ses profondeurs », et les élites qui ont failli permettra à de Gaulle de dénier toute légitimité à Pétain et de se poser en seul représentant de la volonté nationale.