Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
A

Astérix, (suite)

Chauvine et critique, cette bande dessinée pleine de clins d'œil graphiques et textuels offre un parfait reflet du « Gaulois moderne » : aussi a-t-elle connu un grand succès également au cinéma - huit dessins animés de long métrage sont réalisés de 1967 à 2006- et hors de l'Hexagone ainsi que deux films (Astérix et Obélix contre César, 1999 ; Astérix et Obélix : mission Cléopâtre, 2001). Le dernier album (Le ciel lui tombe sur la tête), paru en 2005, a été vendu à près de huit millions d'exemplaires en Europe, dont près de 3,2 millions en France. Un parc d'attractions consacré au petit monde d'Astérix a été ouvert en avril 1989 à Plailly, dans l'Oise.

Astier de La Vigerie (Emmanuel d'),

journaliste, résistant et homme politique (Paris 1900 - id. 1969).

Jusqu'en 1939, cet homme issu d'une vieille famille aristocratique est d'abord un dandy et un dilettante : officier de marine sans vocation, il se tourne par la suite vers le journalisme. Il collabore ainsi à Vu ou encore à Marianne.

La défaite de 1940 marque une étape déterminante de sa vie : d'emblée opposé au régime de Vichy, il bascule de la réaction vers la gauche. Après avoir fondé le mouvement de résistance La Dernière Colonne, il met en place Libération-Sud, avec Jean Cavaillès et les époux Aubrac. Il participe, sous la houlette de Jean Moulin, à la création des Mouvements unis de Résistance, qui rassemblent Combat, le Franc-Tireur et Libération. À Alger, à l'automne 1943, il est nommé commissaire à l'intérieur du Comité français de libération nationale (CFLN) par le général de Gaulle. Comme beaucoup de résistants, il est évincé du gouvernement peu de temps après la Libération.

Commence alors la dernière étape de sa vie publique : compagnon de route du Parti communiste, il est député jusqu'en 1958, et surtout directeur du quotidien Libération. Lâché par le Parti communiste, le quotidien disparaît en 1964. Emmanuel d'Astier de La Vigerie, qui s'est rapproché du gaullisme, anime jusqu'à sa mort une courte émission mensuelle à la télévision.

Son destin illustre la diversité sociopolitique des chefs de la Résistance, la liberté de leurs engagements, et leur difficulté à s'intégrer pleinement dans le jeu politique après la guerre.

Atelier (l'),

journal ouvrier fondé en 1840 par des disciples de Philippe Buchez, ancien saint-simonien.

L'Atelier fait partie d'une presse ouvrière qui se développe en France entre la révolution de 1830 et celle de 1848. Il se réclame en partie du saint-simonisme ; démocrate, il dénonce le régime et réclame le suffrage universel ; enfin, parce que l'unité sociale ne peut reposer que sur un lien spirituel, il est catholique. Mais il se fait surtout l'apôtre de l'idée d'association ouvrière : les ouvriers doivent s'unir pour produire, et recevoir ainsi le fruit intégral de leur travail.

Jusqu'en février 1848, l'Atelier est considéré comme le plus influent des journaux ouvriers, bien qu'il n'ait jamais tiré à plus de 1 500 exemplaires. Les locaux du journal tiennent lieu de club pour les ouvriers parisiens, et nombre d'« ateliéristes », qui appartiennent pour la plupart à l'élite ouvrière, jouent un rôle important sous la IIe République. En 1849, le titre se met à décliner, concurrencé par d'autres feuilles. L'élection de Louis Napoléon Bonaparte et la loi sur la presse de juillet 1850, qui impose un cautionnement trop élevé pour les publications modestes, signent sa perte.

Avec d'autres journaux, telle la Ruche populaire, l'Atelier symbolise une période où la parole fut valorisée comme une arme pour rassembler la classe ouvrière et lutter contre les bourgeois. Ces « ouviers-écrivains » voulaient affirmer l'identité propre du monde du travail par une utilisation de ce qui était jusqu'alors le privilège des puissants : le discours.

ateliers de charité,

établissements d'assistance publique, apparus à l'époque moderne, qui reposent sur des travaux d'intérêt général confiés aux plus défavorisés.

L'emploi de pauvres à des ouvrages de voirie remonte au moins au XVIe siècle, et c'est alors une peine qui réprime l'oisiveté.

Des ateliers de charité ...

• De véritables ateliers de charité apparaissent sous le règne de Louis XIV, mais ils se multiplient surtout dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. Ils répondent au souci d'assister par le travail et de fournir un salaire plus qu'une aumône. Des établissements textiles sont organisés pour femmes, enfants, vieillards, tandis que des chantiers routiers sont ouverts pour les hommes. Cette politique devient systématique à partir d'une instruction du contrôleur général Joseph Marie Terray (11 octobre 1770). Turgot, qui, intendant du Limousin, en avait établi, les favorise durant son ministère, procurant ainsi des secours aux journaliers sans emploi. Les états provinciaux, lorsqu'ils subsistent, ainsi que les assemblées provinciales, créées en 1787, soutiennent aussi la formule. Au temps de la Révolution, des ateliers de secours ont fonctionné à Paris jusqu'en 1791. On dut en rouvrir en 1808.

... aux ateliers nationaux.

• Mais c'est surtout à l'occasion de la révolution de 1848 qu'ils réapparaissent. Dans l'Organisation du travail (1839), Louis Blanc avait préconisé la création d'ateliers sociaux. Financés par l'intermédiaire de l'État, dirigés par des cadres élus, ils devaient distribuer des salaires égaux. Le reste des bénéfices aurait servi à soutenir les malades et à créer des emplois. Le Gouvernement provisoire de 1848, qui comprend Louis Blanc et l'ouvrier Albert, proclame le droit au travail dès le 25 février. Aussitôt après, il crée des ateliers nationaux, contrôlés par la commission du gouvernement qui siégeait au Luxembourg. Marie, en charge du portefeuille des Travaux publics, et Émile Thomas, directeur, les mettent en place. Dans une organisation de type militaire affluent des sans-travail, dont le nombre dépasse 100 000 dès le mois de mai et qui sont surtout employés à des travaux de terrassement, lorsqu'on ne doit pas les mettre au chômage en leur payant seulement un demi-salaire.

Les ateliers nationaux permettent à beaucoup de familles de survivre. Mais on les accuse d'être coûteux, de susciter une concurrence déloyale aux autres ouvriers, et les Ponts et Chaussées leur sont hostiles. Après les élections du 23 avril, l'Assemblée constituante accentue ces critiques, ajoutant que les ateliers nationaux sont un lieu d'agitation bonapartiste. C'était reprendre les conclusions du rapport de la commission d'enquête, dirigée par le légitimiste Falloux. Le nouveau directeur, Lalanne, établit le travail à la tâche, suspend les inscriptions, supprime le service médical. Puis le gouvernement annonce l'envoi de 5 000 ouvriers en Sologne, et invite ceux âgés de 18 à 25 ans à opter entre licenciement et engagement dans l'armée. Ces mesures contribuent à l'insurrection des 23-26 juin, que Cavaignac réprime dans le sang. Les ateliers nationaux, un symbole de la république généreuse de février, avaient vécu.