catéchisme impérial,
catéchisme unique à l'usage de tous les diocèses de l'Empire, rédigé sur ordre de Napoléon Ier et imposé par le décret du 4 avril 1806.
Approuvé par Rome, ce catéchisme, dont une première version est prête dès 1803, est publié à un moment où Napoléon est assuré, grâce au concordat de 1801, de l'adhésion du clergé catholique. Il s'inscrit dans le cadre du contrôle de l'opinion et des esprits, le texte - avec lequel nombre d'enfants apprendront à lire - mêlant pédagogie civique et ambition despotique aux leçons purement religieuses. La leçon VII, expliquant le commandement « Tes père et mère honoreras », à laquelle Napoléon lui-même met la dernière touche, est consacrée aux devoirs envers l'Empereur et sa dynastie : elle place parmi les obligations morales, à suivre sous peine de damnation éternelle, le paiement de l'impôt, le service militaire, l'amour et l'obéissance à l'égard de l'Empereur, restaurateur de la religion ; légitimant le pouvoir politique, elle assure que, Napoléon ayant été établi souverain par Dieu, dont il est « l'image sur la terre », « honorer et servir notre Empereur est donc honorer et servir Dieu même ». Et la leçon de conclure : « Il nous est défendu d'être désobéissants envers nos supérieurs, de leur nuire et d'en dire du mal. »
Bien qu'ils aient été écartés de la rédaction du catéchisme, les évêques, à une exception près, l'appliquent docilement, tandis que certaines résistances apparaissent dans les départements belges et dans ceux de l'Ouest, partisans de l'ultramontanisme. Source de conflits à partir de 1808, lors de la dégradation des relations avec le pape, le catéchisme ne survit pas à l'Empire : il est supprimé dès le 22 juillet 1814.
cathares.
Adeptes d'une hérésie dualiste exprimant leurs angoisses spirituelles, les cathares se recrutaient principalement parmi les élites urbaines.
Le catharisme n'est donc ni l'hérésie de masse ni l'expression d'une résistance régionale, dont on a si souvent parlé. En France, il apparaît dans la seconde moitié du XIIe siècle, constituant l'une des expressions les plus radicales de la contestation hérétique en un temps de mutations spirituelles et sociales. Impitoyablement combattue par l'Église, mais obligeant également celle-ci à inventer une pastorale plus souple et mieux adaptée aux nouvelles élites sociales, l'hérésie cathare disparaît aux environs de 1300, laissant place à un « catharisme imaginaire », dont la légende est encore tenace aujourd'hui.
De la mémoire du catharisme au légendaire cathare
Le circuit touristique des châteaux cathares, la « croix cathare » hissée au rang de symbole régional, la littérature célébrant avec lyrisme la geste des « parfaits » persécutés par l'Inquisition, les rêveries ésotériques sur Montségur : la mémoire du catharisme ne présente plus aujourd'hui qu'un lointain rapport avec l'histoire de cette hérésie médiévale. Mais il ne suffit pas de réfuter les mythes lorsque ceux-ci sont, en eux-mêmes, objets d'histoire. En effet, la constitution du mythe cathare est presque contemporaine des réalités historiques, qu'il tend à voiler.
Fondement du mythe, depuis longtemps enraciné dans la mémoire collective : celui du catharisme comme hérésie de masse. Les clercs luttant contre les cathares ont tout intérêt à surévaluer l'importance de la dissidence, pour mieux justifier la croisade et la répression. Autres temps, autres persécutions : les catholiques, au XVIe siècle, assimilent fréquemment la Réforme à un retour de l'hérésie cathare, l'une comme l'autre faisant courir un danger mortel à la chrétienté. Les protestants, plutôt que de combattre cet argument polémique, tentent alors de le retourner, et, ce faisant, le consolident : pour eux, les cathares sont bien un peuple soulevé contre la tyrannie des clercs, et très injustement persécuté.
Au XIXe siècle, certains penseurs libéraux reprennent à leur compte cette idée, érigeant ces hérétiques du XIIIe siècle en précurseurs de l'âge « démocratique », qui s'opposaient à l'opulence de l'Église et à l'arrogance des féodaux, tout comme d'autres, plus tard, devaient s'emparer de la Bastille. Pour les romantiques, le « renouveau cathare » va de pair avec la découverte de la poésie d'oc des troubadours, et l'on oppose alors la haute spiritualité du peuple du Languedoc, berceau des libertés, à la montée en puissance du despotisme royal. Le légendaire cathare doit beaucoup à Napoléon Peyrat, protestant libéral qui compose, en 1870-1872, son Histoire des albigeois comme une ode à un peuple assassiné. Peyrat apparaît ainsi comme « le Michelet des cathares », et sa force poétique transforme la prise de Montségur (épisode assez obscur de la lutte contre les cathares) en geste épique associant à une montagne sacrée, Montségur, une sainte, Esclarmonde de Foix, qui, « de son roc désert, regardait tristement mais fermement le Louvre et le Vatican ».
C'est à la fin du XIXe siècle que la mémoire du catharisme se charge de spiritualisme ésotérique. En 1888, le fondateur de l'ordre de Rose-Croix, Joséphin Péladan, assimile Montségur au Montsalvat de Parsifal, plaquant sur l'histoire des cathares les délires wagnériens concernant la légende du Graal. On sait où mènent de telles spéculations : en 1933, l'Allemand Otto Rahn tente d'annexer le catharisme à un germanisme païen qui ne cache pas sa dimension raciste. Toute une paralittérature se perpétue, qui, sous couvert d'ésotérisme, est l'héritière de cette fascination que le nazisme éprouva pour le légendaire cathare.
Hérésie de masse, religion occulte, mais également expression du génie de la nation occitane : c'est essentiellement après la Seconde Guerre mondiale que se développe le troisième volet du catharisme imaginaire. Resurgissent alors les rêveries romantiques concernant la répression de la culture de langue d'oc, dont le catharisme représenterait le dernier sursaut. Dans une France en proie aux déchirements de la décolonisation, l'histoire des cathares s'écrit, désormais, comme l'échec douloureux d'un mouvement de libération du Midi contre le Nord, monarchique et colonisateur. Ainsi est née la confusion actuelle entre l'hérésie médiévale (le catharisme) et son substrat régional (le « pays des cathares » - ce qui permet d'appeler « châteaux cathares » des forteresses royales où jamais ne vécurent d'hérétiques). Ce mythe cathare, utilisé par la revendication régionaliste, porté par un regain de spiritualisme ésotérique, ou habilement entretenu pour satisfaire aux exigences touristiques, empêche souvent de considérer les cathares pour ce qu'ils sont : des hérétiques des XIIe et XIIIe siècles.