Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Babeuf (François Noël, dit Gracchus),

activiste et théoricien révolutionnaire (Saint-Quentin, Aisne, 1760 - Vendôme, Loir-et-Cher, 1797).

D'origine modeste, cet autodidacte occupe d'humbles emplois avant de tenir à Roye (Somme) un cabinet de feudiste (spécialiste du droit féodal), de 1781 à 1788. Prenant conscience de l'exploitation féodale et des prétentions de l'aristocratie foncière, il dénonce l'inégalité de la répartition des terres. À partir de l'analyse du problème agraire, il conçoit un système idéologique où prime le droit à l'existence, qui évolue, avec la Révolution, vers un projet de république communautaire et égalitariste. Il publie ses réflexions, notamment dans le Cadastre perpétuel (1789), puis dans les journaux auxquels il collabore, ou qu'il édite à partir de 1789. De retour à Roye après un séjour à Paris, il dirige, entre 1790 et 1792, la résistance des paysans picards contre les impôts indirects d'Ancien Régime et les droits féodaux, et prône la loi agraire, un engagement qui lui vaut par deux fois la prison. Républicain de la première heure, il est élu administrateur du département de la Somme en septembre 1792. Cependant, accusé de faux en écriture, puis destitué, il est condamné par contumace à vingt ans de fers. En janvier 1793, il se réfugie à Paris, où il reprend contact avec ses amis cordeliers, et entre dans l'administration des subsistances. Il est arrêté en novembre 1793, puis remis en liberté le 18 juillet 1794. En septembre, il édite le Journal de la liberté de la presse, rebaptisé en octobre le Tribun du peuple ou le Défenseur des droits de l'homme, arme essentielle du babouvisme jusqu'en avril 1796. Hostile au libéralisme économique, à l'heure où l'inflation et la disette font des ravages parmi les plus pauvres, il attaque violemment les thermidoriens et effectue un nouveau séjour en prison (février-octobre 1795). À sa libération, il reprend ses réquisitoires contre le Directoire et publie dans son journal le « Manifeste des plébéiens » (30 novembre), programme politique prônant l'abolition de la propriété et l'égalitarisme dans la distribution de la production. Contraint à la clandestinité en décembre, mais toujours très actif, il plaide pour l'union des opposants, démocrates, hébertistes ou robespierristes, et est l'instigateur de la conjuration des Égaux, qui vise à renverser le Directoire. Trahis, les conjurés sont arrêtés le 10 mai 1796, et traduits devant la Haute Cour de justice à Vendôme. Le 26 mai 1797, celle-ci prononce deux condamnations à mort, dont celle de Babeuf, guillotiné le lendemain après qu'il eut tenté de se suicider.

babouvisme,

doctrine politique élaborée pendant la Révolution, principalement par Gracchus Babeuf.

S'écartant des théories utopiques du XVIIIe siècle (Mably, Rousseau, notamment), le babouvisme préconise, au nom de l'égalité et dans le cadre d'un contrôle national de l'économie, la mise en commun des biens et des travaux, et la distribution de la production en fonction des besoins de chacun. Rompant avec le mouvement montagnard, l'abolition de la propriété privée, clé de voûte du babouvisme, est cependant contraire aux aspirations des sans-culottes et des paysans. En outre, fondé sur une économie de petits producteurs et élaboré dans une conjoncture de pénurie, le babouvisme ne perçoit pas l'essor de la production industrielle. Toutefois, avec la conjuration des Égaux (1796), il inaugure un type d'organisation révolutionnaire reposant sur l'action clandestine d'un groupe restreint - sorte d'avant-garde - destiné à renverser le régime, et prévoyant l'instauration d'une dictature provisoire. Bien que très minoritaire, il sert de repoussoir au Directoire et au Consulat, permettant de liquider l'opposition démocrate et de rallier les notables effrayés par l'« anarchie égalisatrice ». Exhumé en 1828 par le livre de Buonarroti Histoire de la Conspiration pour l'égalité, dite de Babeuf, le babouvisme influence profondément la génération révolutionnaire et socialiste de 1830 à 1848, notamment Blanqui, qui fera le lien avec le marxisme.

baccalauréat.

La tradition française veut que le titre de bachelier soit, avant la licence et le doctorat, le premier des grades universitaires, nommé baccalaureatus dans le latin de la Renaissance, puis « baccalauréat » au XVIIe siècle.

Un examen académique.

• C'est en 1808 que ce grade, décerné, conformément au monopole de l'Université impériale, par des jurys constitués de professeurs des facultés des lettres et des sciences, devient la sanction des études secondaires. En vertu d'une ordonnance de 1820, il ouvre l'accès aux fonctions de l'État et aux carrières libérales : il faut être bachelier ès lettres pour pouvoir s'inscrire dans une faculté de droit ou de médecine, ou se présenter au concours d'entrée d'une grande école.

Nul régime n'a assuré aux lycées de l'État le monopole de sa préparation. Mais le statut de 1808, en vigueur jusqu'en 1849, impose aux candidats de fournir un « certificat d'études » attestant que les deux dernières années de leur scolarité ont été effectuées dans un établissement public. En réalité fleurissent, dès la monarchie de Juillet, ce qu'il devient d'usage de nommer, à partir du milieu des années 1850, des « boîtes à bachot » - les dérivés « bachotage » et « bachoter » feront leur apparition avant la fin du siècle. La liste même des questions étant fixée par un décret de 1840, l'examen tend à se réduire à un exercice de mémoire. La création d'un écrit, toujours en 1840, l'introduction de la dissertation de philosophie en 1864 et, dix ans plus tard, la séparation du baccalauréat ès lettres en deux séries d'épreuves n'ont guère atténué la tendance des programmes à l'encyclopédisme, au stérile abus de la rhétorique, des vers, du thème et du discours latins.

De réforme en réforme.

• Les réformateurs républicains élaborent une pédagogie nouvelle, dictée par le souci de mieux adapter l'enseignement aux réalités et de faire une juste place à l'expérience. En 1880, la composition française s'impose au détriment de la composition latine. En 1881 est créé le baccalauréat de l'enseignement spécial, dont le succès prouve qu'il répond à une demande sociale. Il reçoit en 1891 l'appellation de « moderne », avant que la réforme de 1902 vienne établir l'égalité avec la filière « classique ». Ensuite, il n'existe plus que des options, des séries à l'examen du « baccalauréat de l'enseignement secondaire ». Leur nombre et le contenu de leurs programmes évoluent en fonction des réformes apportées aux sections de cet enseignement. Aujourd'hui, le « bac » - diminutif apparu dès 1880 - ne peut être obtenu qu'avec une moyenne de 10 au premier groupe d'épreuves écrites et orales, ou, si elle se situe entre 8 et 10, à l'issue d'un second groupe d'épreuves orales, dites « de contrôle ». Le gouvernement de la Libération, reprenant les termes d'une circulaire de 1937, a rappelé que l'examen devait être « la vérification et non le but des études secondaires ».