système de recrutement pour le service militaire obligatoire, établi sous le Directoire par la loi Jourdan-Delbrel (5 septembre 1798), et fondé sur l'appel annuel d'un contingent constitué de tous les jeunes gens atteignant dans l'année l'âge fixé par la loi.
La genèse d'un service militaire obligatoire.
• Menacée de toutes parts, la Ire République a besoin de soldats. Très vite, toutefois, les volontaires ne suffisent plus. Le 23 août 1793 est donc décrétée la « levée en masse ». Si, à des titres divers, tous les Français peuvent être conduits à défendre la patrie, cette décision prévoit une « réquisition » de tous les célibataires et veufs sans enfants, âgés de 18 à 25 ans à cette date : elle permet de mobiliser plus de 800 000 hommes. Mais, l'appel n'étant pas renouvelé les années suivantes, la France ne compte plus que 365 000 soldats environ en 1797, alors que le danger persiste. Le 23 nivôse an VI (12 janvier 1798), au Conseil des Cinq-Cents, le général Jourdan propose un service militaire obligatoire. Son projet s'inspire du modèle de réquisition par classes d'âge de la levée en masse et le rend permanent : en cas de guerre, les jeunes gens âgés de 18 à 24 ans seraient enrôlés jusqu'à la fin du conflit ; en temps de paix, la limite d'âge serait abaissée à 21 ans, et le service durerait de quatre à six ans ; néanmoins, lorsque les besoins militaires seraient plus faibles, les soldats susceptibles de servir seraient désignés par tirage au sort. Cependant, le député du Tarn Delbrel s'insurge contre un tel procédé, qui lui paraît antidémocratique. Il participe alors aux travaux de préparation d'un nouveau projet. Le 19 fructidor an VI (5 septembre 1798), la loi Jourdan-Delbrel institue en France le régime de la conscription : tous les Français âgés de 20 à 25 ans doivent être « inscrits ensemble » (« conscrits ») sur les tableaux de recrutement de l'armée. Les conscrits se répartissent en « classes » selon leur année de naissance. En temps de paix, le service dure cinq ans et ne concerne que les plus jeunes de chaque classe. Les hommes mariés et les inscrits maritimes sont exemptés. Pour lutter contre l'insoumission et la désertion, tous les hommes de 20 à 25 ans doivent porter sur eux un passeport où est mentionnée leur situation militaire. Tout changement de domicile doit être signalé et seuls les conscrits en règle peuvent exercer une fonction publique ou leurs droits de citoyen.
Ce sont les municipalités qui dressent les tableaux de conscription. Mais la première mobilisation ne donne pas les résultats escomptés. Dans la première classe (an VI), 143 000 des 202 000 conscrits sont déclarés aptes par les conseils de révision (constitués de médecins et de pères de famille ayant des fils sous les drapeaux), et ils sont 93 000 à partir réellement. En 1799, malgré certaines protestations, tirage au sort et remplacement sont remis en usage : la loi du 28 germinal an VII (17 avril 1799) permet en effet aux conscrits désignés de présenter des remplaçants âgés de 18 à 20 ans. Les cinq classes de l'an VII fournissent 400 000 soldats. Comme la levée en masse de 1793, la conscription entraîne des soulèvements dans les départements de l'Ouest et ravive l'insurrection contre-révolutionnaire.
L'instrument des conquêtes de Napoléon.
• Sous le Consulat et l'Empire, les dispositions de la loi Jourdan-Delbrel restent la base du recrutement militaire, moyennant quelques adaptations. À partir de 1805, la guerre continentale reprend. L'Empereur augmente le nombre des conscrits et anticipe de plus en plus les levées. La situation s'aggrave avec les pertes énormes de la campagne de Russie en 1812. La conscription est devenue extrêmement impopulaire et, malgré la répression, les insoumis sont nombreux. De 1800 à 1814, Napoléon (surnommé « l'Ogre ») lève environ deux millions d'hommes, ce qui représente environ 36 % des mobilisables et 7 % de la population totale.
La conscription, supprimée en 1814 par la Restauration, est remplacée par un nouveau système de recrutement régi par la loi Gouvion-Saint-Cyr.