Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
O

opportunisme,

nom donné à la pratique politique des républicains de gouvernement qui prônent, dans les années 1880, une action modérée pour établir définitivement la République.

Les opportunistes ne se sont pas définis comme tels : le qualificatif est attribué par les radicaux à un ensemble de forces politiques du centre et du centre gauche, portées au pouvoir, essentiellement entre 1879 et 1885. Ces partis sont au nombre de trois : en premier lieu, le Centre gauche de Jules Dufaure, dont l'importance décroît vite à l'Assemblée, mais qui conserve une influence dans la presse et les milieux d'affaires ; ensuite, la Gauche républicaine de Jules Ferry et Jules Grévy ; enfin, l'Union républicaine de Léon Gambetta, plus proche des radicaux.

Ces partis sont divisés sur bien des points ; mais ils se rassemblent autour d'une conception de l'action politique - pragmatique et à l'abri des poussées radicales des extrêmes -, dans le but de consolider la victoire de la République acquise après la crise du 16 mai 1877 : quand Ferry propose de « limiter avec soin le champ des réformes pour le parcourir plus sûrement », il répond à Gambetta, qui revendique une « politique de transactions, car seules les transactions peuvent amener des résultats ». L'un et l'autre entendent donc gouverner au centre, face aux deux périls, monarchique et d'extrême gauche.

Ils s'accordent sur le mode de gouvernement, mais, plus profondément, il existe une idéologie opportuniste, héritière du positivisme, pour laquelle l'histoire se résume à une longue marche de la barbarie vers la civilisation, et à la victoire de la science sur l'ignorance. L'opportunisme exprime une conception de la société, de l'État et de la nation, dont les maîtres mots sont ordre et progrès, liberté et laïcité, mais aussi rayonnement de la France dans le monde. Cette philosophie imprègne l'ensemble de l'œuvre législative accomplie entre 1879 et 1885.

En effet, c'est sous les gouvernements opportunistes que sont votées les grandes lois de la IIIe République. Lois de libéralisation, d'abord : liberté de la presse, liberté syndicale et droit de tenir des réunions, libertés municipales (désormais, le conseil a le droit d'élire son maire). Politique scolaire, ensuite : gratuité, laïcité et obligation de l'enseignement primaire, les objectifs avoués étant de séculariser l'État et la vie sociale, de combattre l'influence et l'autorité du clergé. Politique coloniale, enfin : pour assurer la « mission civilisatrice » de la France dans le monde, un argument fort auquel même Gambetta, l'homme de la « revanche », se ralliera.

L'opportunisme ne saurait donc se résumer à un ambigu art du possible. Il a la cohérence d'un programme, qui s'exprime tant dans les discours que dans l'action des républicains de gouvernement.

or.

Même si les historiens d'aujourd'hui tempèrent la fameuse formule de Fernand Braudel selon laquelle « les chapitres de l'histoire du monde se rythment à la cadence des fabuleux métaux », l'or n'en a pas moins une grande importance en Europe occidentale jusqu'au début du XXe siècle.

En France comme dans le reste de l'Europe, l'or joue un rôle historique en tant que monnaie plutôt que parure ou fétiche, bien que ces trois éléments soient intimement liés.

Après la chute de l'Empire romain d'Occident, le métal jaune disparaît de la circulation monétaire pendant plusieurs siècles et est mis à l'abri dans les trésors publics et privés, en particulier religieux. Il est vrai que l'Occident produit peu d'or, et que celui-ci est mobilisé par les dépenses somptuaires. Par la suite, quelques pièces tel l'écu de Saint Louis (à l'imitation du florin de Florence et du ducat vénitien) circulent pour certaines grosses transactions, mais l'or reste marginal, ce qui limite les échanges commerciaux avec l'Europe méditerranéenne et Byzance, et cloisonne l'activité économique en une marqueterie de communautés étanches les unes aux autres.

Vers la fin du XVe siècle, l'or réapparaît de façon significative en Europe occidentale. L'or africain des Portugais d'abord, puis l'or sud-américain, débarqué à Séville, sont transformés en pistoles, qui circulent dans toute l'Europe, malgré l'interdiction d'en exporter. La France en reçoit sa part grâce à ses exportations de produits manufacturés vers l'Espagne. Le fabuleux métal gagne la table des rois (salière de Cellini et vaisselle d'or de François Ier), mais il stimule aussi le commerce international, en France, en Italie, en Europe du Nord. « Notre or est tout en emploi et en commerce », remarque Montaigne. On observe ainsi une corrélation entre la disponibilité d'or et d'argent et la croissance économique. L'or n'est jamais, à lui seul, le moteur de la croissance, mais il en est l'une des composantes. De même, la frappe du métal précieux est une conséquence du développement économique et non une cause.

Au XIXe siècle, l'étalon or est incontesté et la monnaie stable, soutenue par la production massive des mines californiennes, australiennes, sud-africaines, sibériennes. L'or est salué comme « la monnaie universelle », et la France est révérée comme « une nécropole de métaux précieux ». La loi de germinal (1803) définit le franc comme l'équivalent de 4,5 grammes d'argent dans un rapport de 15,5 à l'or - soit 0,29 gramme d'or -, une convertibilité qui reste valable jusqu'en août 1914, lorsque la guerre sonne le glas de l'or-monnaie et ouvre le temps de l'or-refuge. La question de l'or devient alors secondaire au regard des conceptions nouvelles de la monnaie, même si le fabuleux métal est toujours massivement thésaurisé par les Français, qui, plus que les autres, semblent conserver pour lui une étrange passion : les petits épargnants chérissent le napoléon, et la Banque de France détient toujours le quatrième stock d'or du monde, pour des raisons qui semblent échapper à une stricte logique économique.

Oradour-sur-Glane,

village martyr de la Haute-Vienne dont la population a été assassinée par les nazis le 10 juin 1944.

Les 7 et 8 juin 1944, la division « Das Reich » (Waffen SS), stationnée dans la région de Montauban depuis le mois d'avril, reçoit l'ordre de faire mouvement vers le front de Normandie. Sur son chemin, elle a aussi pour mission d'aider la Wehrmacht dans la lutte qui l'oppose aux nombreux maquis du Sud-Ouest et du Massif central. Dirigées par le général Lammerding, les unités de la division « Das Reich » se sont déjà illustrées par leur cruauté sur le front de l'Est ; en France, elles ont reçu le renfort de soldats alsaciens, les « malgré-nous », enrôlés de force dans la Wehrmacht comme dans la Waffen SS en vertu du décret du 25 août 1942. Face à la détermination des maquis FTP et des combattants de l'Armée secrète, Lammerding choisit la terreur : le 8 juin, il fait pendre 99 otages à Tulle. L'horreur atteint son paroxysme à Oradour-sur-Glane, où Dickmann, chef du 1er bataillon, ordonne à ses hommes de commettre un massacre, d'autant plus arbitraire que ce bourg du Limousin ne constitue guère un foyer de la Résistance : le 10 juin, 642 civils, presque toute la population d'Oradour, à laquelle s'ajoutent 44 réfugiés lorrains, sont assassinés ; les hommes sont fusillés au fond du garage et dans les granges, les femmes et les enfants, brûlés dans l'église.