roi de France de 1380 à 1422 (Paris 1368 - id.1422), fils de Charles V et de Jeanne de Bourbon.
La jeunesse
• . Charles VI n'a pas 12 ans à la mort de son père, en 1380. Ses oncles paternels, les ducs Jean de Berry, Philippe le Hardi, duc de Bourgogne, et Louis d'Anjou, maîtres du Conseil royal, décident de ne pas respecter les conditions de succession établies par Charles V dans l'édit du Bois de Vincennes : ils font sacrer Charles VI avant sa majorité, afin de ne pas subir la tutelle d'un régent. Ils se partagent ensuite le pouvoir et les revenus issus du Trésor royal. Ainsi, ils commencent par réprimer les émeutes antifiscales qu'a encouragées l'abolition des prélèvements directs (fouages) décidée par Charles V sur son lit de mort. Puis ils ordonnent leur rétablissement. À partir de 1382, et plus encore après la mort de Louis d'Anjou en 1384, Philippe de Bourgogne domine véritablement le Conseil. C'est lui qui fixe le mariage du jeune roi avec Isabeau de Bavière (1385), une alliance plus favorable à la diplomatie bourguignonne qu'à la politique royale.
Cependant, le 3 novembre 1388, Charles VI, âgé de 20 ans, décide de gouverner lui-même, congédie ses oncles, et rappelle les anciens conseillers de son père, tels Bureau de La Rivière, Jean de Montaigu ou Olivier de Clisson. Ces légistes, bientôt désignés par le sobriquet de « marmousets », continuent la politique de Charles V. Ils réforment l'administration royale, réduisent les dépenses de l'État, notamment les pensions versées aux princes et à l'aristocratie, et suppriment les impôts directs. Très attachés au service de l'État, ils accordent aussi une grande importance à la manifestation de la puissance royale, comme en témoigne la cérémonie d'entrée de Charles VI dans Paris, le 22 août 1389, et trouvent un appui sûr en la personne du jeune frère du monarque, le duc Louis d'Orléans (1370-1407). Mais, en août 1392, le roi est frappé d'une crise de folie qui vient compromettre la poursuite de cette politique.
Le roi fou
• . De 1392 à 1415, il connaît, successivement, des périodes de démence et des phases de rémission plus ou moins longues. L'épisode du « bal des Ardents », en 1393, semble l'avoir beaucoup choqué, mais c'est seulement après 1415 qu'il perd complètement la raison. Ses sujets lui demeurent vigoureusement attachés, mais des troubles éclatent, car les populations recherchent des boucs émissaires, ce qui provoque une nouvelle expulsion des juifs du royaume en 1394.
La défaillance de l'autorité royale entraîne le retour des ducs Jean de Berry et Philippe de Bourgogne, qui s'opposent au frère du roi, Louis d'Orléans, pour le contrôle du Conseil et des finances royales. En 1393, lors d'une rémission, Charles VI remet le pouvoir à Louis d'Orléans en lui confiant la régence, et accorde la tutelle du dauphin à la reine et à ses oncles. Cependant, en 1403, il revient sur sa décision : il octroie le pouvoir à la reine, qui doit s'appuyer sur les ducs et le Conseil, et ordonne le sacre du dauphin. Ce revirement exacerbe la rivalité entre Philippe de Bourgogne et Louis d'Orléans, qui est assassiné en 1407 sur ordre du nouveau duc de Bourgogne, Jean sans Peur. Ce crime plonge le royaume dans la guerre civile : les Bourguignons s'opposent désormais aux Orléans, bientôt appelés « Armagnacs ».
L'antagonisme entre les deux partis facilite la reprise des hostilités avec l'Angleterre en 1412, et la révolte cabochienne de 1413. La victoire anglaise d'Azincourt (1415), puis la conquête de la Normandie (1417) et l'assassinat de Jean sans Peur achèvent de diviser le royaume. En 1420, le duc de Bourgogne, allié aux Anglais, détient Charles VI et la reine ; le 17 janvier, il obtient que cette dernière fasse signer au roi l'ordonnance qui prononce la déchéance du dauphin Charles, leur fils. Et, le 21 mai, par le traité de Troyes, Charles VI donne sa fille Catherine pour épouse à Henri V d'Angleterre, fait de celui-ci son fils adoptif, et le désigne comme unique héritier.
Lorsque Charles VI meurt, le 22 octobre 1422, il laisse un royaume meurtri et une couronne âprement disputée. Dans le contexte de la guerre de Cent Ans, son règne apparaît comme le moment du plus grave abaissement du royaume et du pouvoir royal face aux ambitions princières et à l'envahisseur anglais.