loi votée en 1850 qui organise la liberté de l'enseignement confessionnel et congréganiste.
Le contexte de son élaboration.
• La question scolaire est pour les républicains de 1848 une question décisive. Hippolyte Carnot dépose le 30 juin un projet de décret relatif à l'obligation et à la gratuité de l'enseignement primaire. Les conservateurs, qui rendent les instituteurs responsables des risques de révolution, font du retrait de ce projet l'une des conditions de leur soutien à Louis Napoléon Bonaparte. À peine élu, celui-ci leur donne satisfaction. Dans le ministère du 20 décembre, le comte de Falloux, qui est ministre de l'Instruction publique, représente, plus encore que les légitimistes, les évêques. Pour préparer la nouvelle loi, il nomme une commission dont la présidence est confiée à Adolphe Thiers. Naguère voltairien et anticlérical, celui-ci veut désormais confier l'instruction primaire à l'Église. Ce revirement trahit la grande peur qui a saisi les bourgeois après les journées de juin 1848. Mais, pour le catholique libéral Montalembert ou le philosophe Victor Cousin, qui sont membres de la commission, ce serait violer le principe de la liberté que d'attribuer au clergé ce monopole. Le projet de loi est mis en discussion au début de l'année 1850, alors que Louis de Parieu est ministre de l'Instruction publique. Le 15 janvier, Victor Hugo prononce contre le texte un de ses plus célèbres discours. La loi est votée le 15 mars par 399 voix contre 237.
Loi cléricale ou loi de compromis ?
• La liberté de l'enseignement est moins réglementée que jamais. Aucun titre n'est exigé des maîtres : ainsi, le brevet de capacité peut être remplacé par la qualité de ministre d'un culte ou par un certificat de stage, ce qui favorise les Frères ; pour l'enseignement féminin, une lettre d'obédience remise aux religieuses par leur supérieure et attestant leur appartenance à une congrégation peut suffire. « Le résultat, résume Charles Seignobos, fut de couper la jeunesse française en deux fractions élevées dans un esprit opposé. » Si elle place l'instituteur sous la surveillance tracassière du curé, la loi n'entraîne pas la fermeture des écoles normales. Elle ne rompt pas davantage avec les fondements du monopole de l'Université, hérité du Premier Empire. En ce qui concerne l'enseignement secondaire, l'article 69 prévoit que « les établissements libres peuvent obtenir des communes, des départements ou de l'État un local et une subvention, sans que cette subvention puisse excéder le dixième des dépenses annuelles de l'établissement ». C'est cette disposition que François Bayrou, ministre de l'Éducation nationale dans le gouvernement d'Édouard Balladur, a en vain tenté d'abroger en 1993, provoquant une grande manifestation des défenseurs de l'école publique, le 16 janvier 1994. Cet épisode (paradoxal, puisque c'est alors le camp laïc qui défend une loi réputée cléricale) permet ainsi de vérifier que la loi Falloux n'est pas un texte absolument réactionnaire, mais le fruit d'un compromis, inacceptable pour les républicains et cependant en deçà des prétentions extrêmes du clergé.