cabochienne (révolte), (suite)
La révolte cabochienne s'inscrit dans un contexte de guerre civile qui oppose les partisans de Jean sans Peur, duc de Bourgogne, et ceux de la famille d'Orléans-Armagnac. Profitant de la folie du roi Charles VI, les deux partis s'affrontent pour le contrôle du Conseil royal et des finances royales. Depuis 1408, Jean sans Peur domine Paris, où se tient la cour ; pour ce faire, il s'appuie sur le parlement et l'Université, favorables à une réforme de l'administration royale, ainsi que sur le puissant réseau des bouchers parisiens, qui cherchent à s'intégrer à la haute bourgeoisie de la capitale. Au début de l'année 1413, la crise financière est telle que le Conseil royal se résout à convoquer les états généraux de langue d'oïl afin d'obtenir leur consentement à la levée d'un nouvel impôt. Mais ses membres exigent préalablement la réforme de l'administration et de la fiscalité royales. Favorable à une telle réforme, Jean sans Peur soutient l'agitation antifiscale menée par les riches bouchers. En avril et en mai, manifestations et émeutes se succèdent ; la population parisienne s'en prend violemment aux officiers royaux et aux hôtels de la reine et du dauphin, Louis de Guyenne. Du 26 au 29 mai, les représentants des états généraux présentent enfin au roi une grande ordonnance de réforme de l'État. Il s'agit en fait d'un programme modéré, essentiellement administratif, qui ne témoigne d'aucune velléité de contrôle du pouvoir par les états. Mais cette ordonnance demeure lettre morte, car, dans les rues de la capitale, le mouvement populaire se radicalise et échappe au contrôle du duc de Bourgogne. Le 1er juillet, le prévôt de Paris, Pierre des Essarts, est exécuté et un impôt forcé sur les riches, exigé. Ces excès finissent toutefois par inquiéter les réformateurs modérés et la bourgeoisie parisienne, qui se rapprochent alors du dauphin. Le 4 août, avec l'aide de la milice bourgeoise, celui-ci parvient à s'imposer lors d'un rassemblement populaire. Les cabochiens sont aussitôt dispersés ; certains parviennent à s'exiler en terre bourguignonne. Le 23 août, Jean sans Peur préfère à son tour fuir Paris. Le 31 août, le dauphin autorise les chefs de la fraction des Armagnacs à entrer dans la capitale. L'échec de la révolte cabochienne est alors consommé.
Le premier effet de cette défaite est de discréditer le duc de Bourgogne au profit des Armagnacs. À plus long terme, la révolte compromet durablement le programme de réforme modérée proposé par les états généraux : le 5 septembre, l'ordonnance de mai, dite « cabochienne », est ainsi solennellement déchirée, et, à la fin du mois, l'administration est sévèrement épurée de ses éléments réformateurs et favorables aux Bourguignons. En définitive, la révolte cabochienne apparaît comme l'une de ces nombreuses protestations antifiscales qui témoignent de la difficile naissance de la fiscalité royale à la fin du Moyen Âge.