Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
M

Midi viticole (révolte du),

révolte des vignerons qui éclate en 1907 dans les Pyrénées-Orientales, l'Aude, l'Hérault et le Gard.

Depuis la crise du phylloxéra (1863-1880), le vignoble du Midi a été reconstitué avec des plants américains, très productifs. De surcroît, les vins algériens et les vins frelatés par sucrage lui font une rude concurrence. La surproduction qui s'ensuit entraîne un effondrement du prix de l'hectolitre, qui passe de 18 francs en 1891 à 10 francs en 1907. Nombre de petits propriétaires travaillent dès lors à perte, tandis que les ouvriers agricoles sont contraints d'accepter des salaires de plus en plus bas. Le chômage se développe, qui touche un cinquième des ouvriers. Les saisies se multiplient chez les petits propriétaires endettés depuis l'épidémie de phylloxéra. Or les revendications des vignerons ne sont guère entendues : une loi réprimant les fraudes sur la qualité du vin a bien été votée en 1905, mais elle n'est pas appliquée. Si bien que la mobilisation de toutes les catégories sociales, déclenchée au café de Marcelin Albert à Argelliers (Hérault), se généralise au début de 1907. Dès le 31 mars, 600 personnes se réunissent à Bize (Aude), et le nombre des manifestants ne cesse de grossir : ils sont 80 000 à Narbonne le 5 mai, 170 000 à Perpignan le 19, et plus de 500 000 à Montpellier le 9 juin. Sous des allures de fêtes dominicales conduites par les maires, ces marches permettent de faire entendre le cri d'alarme lancé par tous les viticulteurs. Mais, en réponse à la grève de l'impôt organisée à l'instigation du maire socialiste de Narbonne, le docteur Ernest Ferroul, le gouvernement de Clemenceau procède à des arrestations et envoie des troupes. Une fusillade éclate à Narbonne le 20 juin, faisant six morts parmi les civils, tandis qu'à Agde les soldats du 17e régiment de ligne se mutinent et refusent de prendre les armes contre les manifestants. Dès lors, des divisions se font jour au sein du mouvement, car les royalistes, d'abord favorables aux vignerons, se refusent à cautionner les débordements et s'inquiètent quand la préfecture de Perpignan est incendiée le 21 juin. La révolte prend alors de plus en plus un caractère régionaliste et appelle à la défense du Midi contre les barons de l'industrie sucrière du Nord. Le gouvernement cède finalement sur trois points : les dirigeants du comité d'Argelliers qui avaient été arrêtés sont libérés ; le 29 juin est votée une loi soumettant à une surtaxe les sucres servant à la chaptalisation des vins ; les vignerons n'auront pas à acquitter les arriérés d'impôts accumulés depuis 1904. Par ailleurs, la protestation est canalisée par les cadres légaux qu'offre la loi de 1884 sur les syndicats : en septembre 1907 est constituée la Confédération générale des vignerons du Midi, où chaque membre dispose d'un nombre de voix proportionnel à la surface de vignoble qu'il possède.

Milice,

principale organisation de lutte contre la Résistance, créée en 1943 par le régime de Vichy.

Instituée par la loi du 30 janvier 1943, la Milice, dirigée par Joseph Darnand, est placée sous l'égide du maréchal Pétain et sous l'autorité de Laval, chef du gouvernement. Expression de la tendance la plus radicale du régime, la Milice s'affirme véritablement au tournant de 1943 et de 1944, lorsque Joseph Darnand et son second, Philippe Henriot, entrent au gouvernement, et que les Allemands autorisent son action en zone nord. Aux miliciens sont dévolues trois fonctions principales : la propagande, le renseignement et la répression, assumée par les troupes de la Franc-Garde, formées souvent de jeunes déclassés. Menée en étroite collaboration avec l'occupant, la répression est amplifiée par l'action des forces de l'ordre régulières, soit près de 80 000 hommes placés sous la responsabilité directe de Darnand : en 1944, le régime de Vichy est devenu un « État milicien ». Les miliciens, qui ont institué des cours martiales, s'en prennent aux réfractaires au STO, aux résistants, aux juifs et aux communistes. Ils s'attaquent ainsi aux maquis des Glières (mars 1944) et à celui du Vercors (juin 1944), et exécutent plusieurs personnalités de gauche : Maurice Sarraut, Victor Basch, Jean Zay et Georges Mandel. Symboles de la trahison, les miliciens sont l'objet de sévères représailles après la Libération : Henriot a été abattu par un groupe de résistants dès le 28 juin 1944, Darnand est fusillé le 10 octobre 1945. Néanmoins, l'ex-milicien Paul Touvier, longtemps protégé par certains ecclésiastiques et gracié par Georges Pompidou (1971), n'est condamné à la réclusion perpétuelle pour complicité de crime contre l'humanité qu'en avril 1994.

milice royale,

troupe auxiliaire créée par l'ordonnance du 20 novembre 1688.

L'obligation de défendre le royaume incombe depuis toujours à la noblesse, mais l'arrière-ban féodal n'apporte que des hommes sans préparation ni équipement (aussi renoncera-t-on à ce mode de recrutement en 1694). En outre, des milices locales, formées d'habitants requis, existent déjà sur les frontières, en Béarn, Roussillon, Languedoc, Provence et Boulonnais, et suppléent les troupes régulières dans les garnisons. Mais, avec la guerre de la Ligue d'Augsbourg (1688-1697), Louvois doit faire face à des besoins accrus en termes d'effectifs. Désormais, chaque paroisse élit un homme (tiré au sort, après 1692), célibataire entre 20 et 40 ans, qu'elle équipe et solde. Sous le commandement de gentilshommes de la province, les miliciens s'entraînent les dimanches et fêtes ; s'ils sont appelés hors de la province, le roi les entretient. Le service dure deux ans, mais, de fait, seul un tiers des effectifs est libéré chaque année. La milice fournit de 60 000 à 70 000 hommes, tenant garnison, puis engagés au feu en Catalogne et dans les Alpes. Licenciée une fois la paix venue, la milice est reformée pendant la guerre de la Succession d'Espagne (1701-1714), et la durée du service est alors portée à trois ans. Elle disparaît en 1713, avant de réapparaître en 1726 comme institution permanente, même en temps de paix.

D'emblée, cet essai de service militaire est impopulaire. Les paroisses s'arrangent pour recruter d'anciens soldats, puis pour se débarrasser des indésirables en les désignant comme miliciens.