nom donné à la société d'Ancien Régime, présentée traditionnellement comme l'héritière des trois ordines du Moyen Âge : le clergé (premier ordre), destiné à la prière ; la noblesse (ou second ordre), destinée au métier des armes ; et le tiers (ou tiers état), voué au travail de la terre pour subvenir à ses besoins et à ceux des deux autres ordres par le biais des impositions fiscales et des prélèvements en nature.
Un système plus souple qu'il n'y paraît.
• Souvent, la société d'ordres n'est regardée que comme un ensemble de trois castes rigides, qui se serait effondré dans la nuit du 4 août 1789. À tort. En effet, le clergé se recrute aussi bien dans la haute noblesse (prélats, cardinaux, archevêques, évêques, princes de l'Église, abbesses) que dans la moyenne bourgeoisie (chanoines, voire abbés) ou dans le peuple aisé des campagnes (curés, vicaires, religieuses). La noblesse, quant à elle, est une véritable nébuleuse car, à la différence du clergé, il n'y a point de date d'entrée individuelle dans l'ordre. Les diverses catégories de nobles se chevauchent, s'interpénètrent : noblesse de cour, qui peut être ancienne ou récente ; noblesse urbaine - de robe, le plus souvent -, donc issue de la riche bourgeoisie qui achète des offices ; noblesse rurale, vivant de la terre. L'ancienneté établit des distinctions au sein du second ordre : noblesse d'extraction chevaleresque, qui remonte aux croisades ; noblesse de simple extraction dont les aïeux sont connus depuis les XVe et XVIe siècles seulement ; noblesse récente des anoblis. Se superposent ensuite les critères de l'illustration et de la fortune, assez souvent diamétralement opposés à ceux de l'ancienneté du nom.
La suprématie de la gloire et de la fortune.
• Plus une famille est ancienne, plus les hommes riches et célèbres qui lui ont procuré sa noblesse sont éloignés dans le temps. Les anoblis tels les marins Jean Bart, Duquesne, Duguay-Trouin sont, quant à eux, des gloires de leur époque ; connus et fortunés comme Ducasse, ils comptent aux yeux du roi plus qu'un vieux gentilhomme dont l'extraction chevaleresque remonte au XIIe siècle ! En effet, à la notion d'ancienneté, que beaucoup croient - à tort - primordiale, le roi préfère celle d'illustration : noblesse célèbre de par ses services dans l'armée, l'Église ou la robe. De surcroît, l'argent détenu par les individus ou les familles bouleverse encore davantage cette vieille notion de société d'ordres. Certes, le noble est un privilégié qui jouit de droits (chasse, pêche) mais pas de toutes les exemptions fiscales : s'il est dispensé de la taille, impôt roturier, il paie en revanche capitation et dixième, créés en 1695 et en 1710. Et nombre de bourgeois le dépassent en fortune. Il est même des coqs de villages (le riche laboureur de La Fontaine) plus pourvus en terres et troupeaux que le hobereau famélique.