Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
O

Ordonnance de réformation du royaume, (suite)

Presque toutes ces mesures sont reprises dans l'ordonnance générale de 1256 et dans les Enseignements du roi à son fils aîné. De nouvelles enquêtes menées vers 1260 prouvent leur fréquente application. L'Ordonnance de réformation du royaume témoigne ainsi de la dimension « morale » de la politique royale après l'échec de la croisade. Incapable de délivrer les Lieux saints, Louis IX cherche à assurer son salut et celui du royaume en gouvernant en roi « juste et chrétien ».

Ordonnances (Grande et Petite),

ordonnances au moyen desquelles sont mises en place, au printemps 1445, les unités de base de l'armée permanente conçue par Charles VII.

Afin d'apporter une solution durable au problème du mercenariat et d'instituer un outil militaire susceptible de mener à bien la reconquête du royaume, le roi enjoint aux bandes de soldats de se disperser et retient à son service, moyennant des gages régulièrement versés, quinze puis dix-huit compagnies. Chaque compagnie est formée de cent lances, une lance comprenant elle-même un homme d'armes, deux archers et trois servants montés. L'élément clé de la réforme est cependant moins d'ordre militaire qu'administratif. De telles unités ne sont guère novatrices sur le plan tactique, mais par leur discipline elles vont constituer une force décisive dans les campagnes de la fin de la guerre de Cent Ans ainsi qu'un outil de police permettant à la monarchie de tenir le royaume sous son contrôle, à partir d'un système de garnisons, et d'y faire respecter l'ordre. L'image traditionnelle selon laquelle les compagnies d'ordonnance constitueraient la première armée permanente en Europe est en partie simpliste, mais la portée de l'innovation est toutefois bien réelle, puisqu'en professionnalisant l'activité militaire et en offrant à la noblesse une carrière rémunérée au service du prince, elle rompt avec la tradition médiévale de la guerre et constitue un instrument décisif de la genèse de l'État moderne.

ordonnances de juillet 1830,

ordonnances prises par Charles X dans le but de réduire à l'obéissance une opposition victorieuse lors des élections du 23 juin 1830.

Prenant prétexte d'un article contenu dans la Charte de 1814 - « Le roi [...] fait les règlements et ordonnances nécessaires pour l'exécution des lois et la sûreté de l'État » -, Charles X et son entourage (Polignac, Chantelauze, Peyronnet) accentuent le tournant réactionnaire du régime et fomentent un véritable coup d'État : le 25 juillet, quatre ordonnances sont signées et paraissent le lendemain matin dans le Moniteur universel. La première bafoue la liberté de la presse, les autres visent à saper les fondements de la monarchie constitutionnelle. La Chambre est dissoute, de nouvelles élections sont prévues pour septembre et les pouvoirs de l'Assemblée sont considérablement réduits par la diminution du nombre de députés et d'électeurs issus de la bourgeoisie censitaire. Des milliers de commerçants, de négociants ou d'industriels se trouvent ainsi exclus de l'électorat. La stratégie se révèle toutefois désastreuse. Les promoteurs des ordonnances, qui avaient espéré que ces mesures brutales prendraient les oppositions de court, trouvent en face d'eux un front homogène et déterminé : autour d'Adolphe Thiers, de Casimir Perier et de Jacques Laffitte se rassemblent les chefs de l'opposition, des centaines de journalistes, de typographes et d'étudiants. Les protestations et les rassemblements du 26 juillet donnent le signal de l'insurrection. En s'attaquant à la Charte de 1814, Charles X précipite sa chute.

ordres (société d'),

nom donné à la société d'Ancien Régime, présentée traditionnellement comme l'héritière des trois ordines du Moyen Âge : le clergé (premier ordre), destiné à la prière ; la noblesse (ou second ordre), destinée au métier des armes ; et le tiers (ou tiers état), voué au travail de la terre pour subvenir à ses besoins et à ceux des deux autres ordres par le biais des impositions fiscales et des prélèvements en nature.

Un système plus souple qu'il n'y paraît.

• Souvent, la société d'ordres n'est regardée que comme un ensemble de trois castes rigides, qui se serait effondré dans la nuit du 4 août 1789. À tort. En effet, le clergé se recrute aussi bien dans la haute noblesse (prélats, cardinaux, archevêques, évêques, princes de l'Église, abbesses) que dans la moyenne bourgeoisie (chanoines, voire abbés) ou dans le peuple aisé des campagnes (curés, vicaires, religieuses). La noblesse, quant à elle, est une véritable nébuleuse car, à la différence du clergé, il n'y a point de date d'entrée individuelle dans l'ordre. Les diverses catégories de nobles se chevauchent, s'interpénètrent : noblesse de cour, qui peut être ancienne ou récente ; noblesse urbaine - de robe, le plus souvent -, donc issue de la riche bourgeoisie qui achète des offices ; noblesse rurale, vivant de la terre. L'ancienneté établit des distinctions au sein du second ordre : noblesse d'extraction chevaleresque, qui remonte aux croisades ; noblesse de simple extraction dont les aïeux sont connus depuis les XVe et XVIe siècles seulement ; noblesse récente des anoblis. Se superposent ensuite les critères de l'illustration et de la fortune, assez souvent diamétralement opposés à ceux de l'ancienneté du nom.

La suprématie de la gloire et de la fortune.

• Plus une famille est ancienne, plus les hommes riches et célèbres qui lui ont procuré sa noblesse sont éloignés dans le temps. Les anoblis tels les marins Jean Bart, Duquesne, Duguay-Trouin sont, quant à eux, des gloires de leur époque ; connus et fortunés comme Ducasse, ils comptent aux yeux du roi plus qu'un vieux gentilhomme dont l'extraction chevaleresque remonte au XIIe siècle ! En effet, à la notion d'ancienneté, que beaucoup croient - à tort - primordiale, le roi préfère celle d'illustration : noblesse célèbre de par ses services dans l'armée, l'Église ou la robe. De surcroît, l'argent détenu par les individus ou les familles bouleverse encore davantage cette vieille notion de société d'ordres. Certes, le noble est un privilégié qui jouit de droits (chasse, pêche) mais pas de toutes les exemptions fiscales : s'il est dispensé de la taille, impôt roturier, il paie en revanche capitation et dixième, créés en 1695 et en 1710. Et nombre de bourgeois le dépassent en fortune. Il est même des coqs de villages (le riche laboureur de La Fontaine) plus pourvus en terres et troupeaux que le hobereau famélique.