Coulaines (assemblée de),
réunion des grands laïcs et ecclésiastiques, de la Francie occidentale autour de Charles le Chauve, en novembre 843, près du Mans.
Charles s'est vu attribuer son royaume lors du traité de Verdun, au mois d'août précédent, mais n'est pas encore reconnu partout comme souverain légitime. S'associant probablement à une initiative de l'aristocratie pour rétablir la paix dans le royaume déchiré par la guerre civile, il fait rédiger un « traité » dans lequel chaque partie - le roi, les grands laïcs et les grands ecclésiastiques - s'engage envers les deux autres. Charles se doit ainsi de protéger les biens de l'Église et de respecter ses préceptes et ses privilèges, c'est-à-dire de se comporter comme un « roi juste » et non pas comme un tyran. Aux laïcs, il promet de maintenir chacun dans son bon droit, et de ne léser personne de ses biens ni de ses charges publiques. En échange, il demande aux grands de collaborer à la bonne marche du gouvernement et de l'assister par leur aide et leurs conseils. Ce pacte « de concorde et d'amitié » est une innovation, qu'on peut interpréter comme un véritable contrat passé entre le souverain et ses sujets. C'est une particularité du royaume de Francie occidentale, où le roi reconnaît désormais des droits aux grands laïcs et ecclésiastiques, donnant ainsi de nouvelles bases au pouvoir royal.
cour
La cour de France a exercé sur ses contemporains une véritable fascination : lieu privilégié du culte royal, d'une société et d'un mode de vie élégants et raffinés, elle est devenue le modèle que tous les princes européens ont rêvé d'imiter.
Mais elle a aussi été un objet d'exécration pour le reste de la société. C'est à elle - « sangsue de l'État » par ses dépenses inconsidérées - et à ses courtisans parasites que l'on a attribué tous les maux dont souffrait le royaume. À la fin de l'Ancien Régime, on reprochait à une noblesse de cour frivole, corrompue et égoïste de s'attribuer le monopole des charges et des fonctions aux dépens de tous ceux qui eussent dû les occuper par leur mérite et leur valeur, et, donc, aux dépens des intérêts du roi et du royaume.
Une définition de la cour
La cour est d'abord la résidence du roi - le « lieu où habite un roy ou un prince souverain » (Dictionnaire de Furetière, 1690) -, de son entourage et de tous ceux qui sont à son service domestique : la Maison du roi, appelée l'« Hôtel » à l'époque médiévale, est composée de « tous les officiers et [de] la suite du prince ». Elle constitue aussi le siège du pouvoir et du gouvernement ; elle est donc synonyme de l'État royal lui-même, du « corps de l'État que le prince représente » (on parle ainsi de la « politique de la cour de France », ou d'un « ordre venu de la cour »). Par conséquent, dans cette monarchie de droit divin, elle représente le lieu par excellence où l'on célèbre le culte royal, avec tout un cérémonial qui préside aux actes les plus intimes du souverain comme aux plus grands événements.
La cour n'est pas une création du Roi-Soleil, ni même des Valois au temps de la Renaissance : elle a existé dès que des monarques ont voulu entourer leur pouvoir d'une aura de sacré, et leur personne, d'un cérémonial proche d'un rituel liturgique. Le « cérémonial français » de la monarchie des Valois et des Bourbons résulte donc de l'héritage composite de cette tradition, à laquelle deux souverains, Henri III et Louis XIV, qui avaient au plus haut point le sens de la dignité de la fonction royale, ont fortement imprimé leur marque. Parmi les règles qui rythment la vie quotidienne du roi, citons l'exemple du rituel du lever, qui observe un ordonnancement méticuleux, le roi et les « officiants » du culte royal accomplissant toute une série de gestes précis. D'après un manuscrit des Archives nationales pour l'année 1769, on distingue sept sortes d'entrées différentes dans la chambre du roi : entrée familière, grande entrée - ou entrée de la garde-robe -, premières entrées - ou entrées des brevets -, entrée du cabinet - ou grande entrée de la chambre -, entrée de la chambre, entrée après la chambre - dite aussi « entrée des annonces » -, et entrée générale. Les bénéficiaires de ces honneurs le sont par droit de charges ou par faveur accordée par le souverain. Tout autre instant de la vie quotidienne et les grands événements de la cour sont aussi strictement réglés, avec un respect méticuleux des préséances. Ce protocole n'empêche pas - dans cette société de dignités et de rangs, où chacun occupe sa place par rapport à l'« astre royal » - des querelles incessantes, dont Saint-Simon s'est fait l'historiographe passionné pour le règne de Louis XIV. Les exemples de tels incidents ne manquent pas, tant dans la cour des derniers Valois que dans celle des derniers Bourbons.
La cour forme aussi une société, avec son mode de vie, sa mentalité, ses plaisirs et divertissements : « cour se dit encore des manières de vivre à la cour. Cet homme sait bien la cour, sait faire la cour, il a bien pris l'air de cour. C'est un esprit de cour. Il sait toutes les intrigues de la cour. Cet homme n'est plus à la mode, il est de la vieille cour. On appelle aussi un air de cour, une chanson qu'on chante à la cour » (Furetière). Les Valois ont créé cette société et cette civilisation de cour. Le soir, l'on danse au son d'une « bande » de musiciens, joueurs de luth, de hautbois, de cornet et de flûte. Après le bal vient l'heure des jeux de société, où l'on risque beaucoup d'argent : jeux de cartes (tarots), de dés, d'échecs, et de multiples variétés du jeu de dames. Pendant la journée, les courtisans s'adonnent au sport. Outre la chasse, le plus prisé et le plus répandu est le jeu de paume, où excellent les souverains eux-mêmes, qui lui ont toujours réservé un emplacement dans chacune de leurs résidences. La cour pratique d'autres jeux : le mail, les boules ou les quilles. Exercices nobles par définition, les joutes et les tournois, auxquels on se prépare quotidiennement par la course à la bague ou à la quintaine, ont été quelque peu découragés par l'accident mortel dont a été victime Henri II en 1559. Au cours des deux siècles suivants, les formes de divertissement varient : le ballet de cour, où le roi se produit lui-même, triomphe sous Louis XIII et, surtout, sous Louis XIV ; puis, au XVIIIe siècle, la faveur se porte sur l'opéra et la comédie, qui compte parmi ses acteurs la reine Marie-Antoinette. Enfin, la cour est un foyer d'art et de culture ; elle exerce un mécénat durant les trois derniers siècles de l'Ancien Régime. Ce microcosme particulier constitue le royaume des courtisans, dont de véritables manuels de civilité brossent des portraits exemplaires : le Libro del cortegiano (1528, traduit en 1537), « code de la politesse et de l'élégance » humanistes, composé à la demande de François Ier, par un diplomate originaire de Mantoue, Baldassare Castiglione, a inspiré tous ceux qui lui ont succédé.