prévôt des marchands de Paris (Paris, vers 1315 - id. 1358).
Fils de Simon Marcel, échevin de Paris et drapier, Étienne Marcel est né dans une famille alliée à de puissantes branches de la bourgeoisie parisienne. Échevin de Paris en 1354, il est élu en 1355 prévôt des marchands, c'est-à-dire chef de la hanse des marchands de l'eau. Il incarne les attentes de la bourgeoisie d'affaires parisienne, qui aspire à une monarchie contrôlée par les états.
Plusieurs partis aux intérêts divergents et aux alliances fluctuantes sont en présence : ceux du roi de France Jean II le Bon, du dauphin (futur Charles V), de la bourgeoisie parisienne et du roi de Navarre Charles le Mauvais. Lors des états généraux réunis en 1355 par le roi Jean pour financer la guerre contre les Anglais, Étienne Marcel est le porte-parole du courant réformateur. Réunis plusieurs fois en 1356, les états généraux monnaient leur appui au roi, réclamant, avec Robert Le Coq, évêque de Laon et partisan de Charles le Mauvais, la déchéance des mauvais conseillers. Quand le roi Jean est fait prisonnier par les Anglais à la bataille de Poitiers le 19 septembre 1356, Étienne Marcel oppose la municipalité parisienne au dauphin. Le roi reconnaît son pouvoir, tout comme le dauphin : la Grande Ordonnance, proclamée à l'issue des états généraux de mars 1357, prévoit une réforme totale de l'administration royale et la réunion régulière des états généraux. À la fin de 1357, la libération de Charles de Navarre (arrêté à Rouen l'année précédente sur ordre du roi Jean) introduit un autre protagoniste, hostile au souverain et au dauphin.
Lorsque le prévôt des marchands laisse dégénérer une manifestation où sont massacrés les maréchaux de Champagne et de Normandie, pourtant réformateurs con-vaincus, le dauphin, qui se proclame régent, s'en remet à Étienne Marcel, mais il quitte Paris en mars 1358, laissant son adversaire coupé de la noblesse réformatrice. Il cherche à isoler la capitale et convoque à Compiègne des états, qui lui accordent des subsides. C'est alors qu'éclate, le 28 mai 1358, une jacquerie, mouvement violent de révolte paysanne contre la noblesse ; les « menées des Jacques » servent les intérêts du prévôt des marchands, mais ce dernier ne les soutient pas ouvertement, et, le 10 juin, à Mello, la jacquerie est écrasée par le roi de Navarre. Charles entre dans Paris, dont il est nommé capitaine général. La défaite du dauphin est totale ; Étienne Marcel aurait triomphé s'il n'avait commis l'erreur d'ouvrir la capitale aux mercenaires anglo-navarrais. La popularité du roi de Navarre et celle du prévôt s'effondrent ; Étienne Marcel est assassiné le 31 juillet 1358.
L'historiographie n'a pas manqué de lier l'histoire de la révolte du « bourgeois » Étienne Marcel avec celle du tiers état sous la Révolution française. Encensé par les uns, qualifié d'ambitieux par les autres, Étienne Marcel mérite d'être considéré à l'aune du XIVe siècle : avec lui prend fin la plus sérieuse tentative de réforme de la monarchie qu'ait connue la fin du Moyen Âge.