Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
M

Marat (Jean-Paul), (suite)

Fortunes et infortunes.

• Fort de l'autorité qu'il exerce sur le petit peuple parisien, Marat, toléré plus qu'accepté par les montagnards, est vigoureusement combattu par les girondins. En avril 1793, ces derniers parviennent à le traîner devant le Tribunal révolutionnaire, mais la manœuvre se retourne contre eux : acquitté, sorti renforcé du procès, Marat participe activement à la préparation des journées des 31 mai et 2 juin, qui mettent un terme aux prétentions girondines. Malade, il cesse de paraître à la Convention peu après, et est assassiné le 13 juillet par Charlotte Corday, partisane des girondins, défaits et exécutés. Célébré comme un martyr de la liberté, il entre au Panthéon en fructidor an II, avant d'en être chassé par les thermidoriens. Son nom reste attaché à la violence verbale et physique de la Révolution, mais aussi à ses exigences les plus radicalement démocratiques.

Marceau (François Séverin Marceau-Desgraviers, dit),

général républicain (Chartres 1769 - Altenkirchen 1796).

À 16 ans, Marceau s'engage dans l'armée royale. Il la quitte en juillet 1789, pour participer à la prise de la Bastille dans la Garde nationale de Paris. De retour dans sa ville natale, il s'engage en novembre 1791 dans le 1er bataillon des volontaires d'Eure-et-Loir, où il est élu capitaine. Il sert lors du siège de Verdun en tant que lieutenant-colonel. En septembre 1792, il demande son intégration dans l'armée de ligne et part en Vendée comme lieutenant de cavalerie. En juin 1793, capitaine de hussards, il délivre le représentant du peuple Bourbotte, retenu à Saumur par des rebelles. La Convention le fait adjudant général. Il participe à la victoire de Cholet (17 octobre 1793), où il gagne le grade de général de brigade, et, en novembre de la même année, il est général de division lorsqu'on lui confie le commandement en chef par intérim de l'armée de l'Ouest. Sous le contrôle de Kléber, Marceau fait tout pour obtenir un succès décisif avant l'arrivée du titulaire, le général Turreau, auquel il ne rend le commandement qu'après la victoire de Savenay (23 décembre). Après un congé, Marceau rejoint l'armée des Ardennes, en avril 1794. Le 26 juin, il se distingue à Fleurus, puis accompagne la progression victorieuse de Jourdan. En 1796, il administre brillamment la région de Trèves. Le 19 septembre, chargé de couvrir la retraite de l'armée de Sambre-et-Meuse, il arrête les Autrichiens à Altenkirchen, mais il y est mortellement blessé.

Marcel (Étienne),

prévôt des marchands de Paris (Paris, vers 1315 - id. 1358).

Fils de Simon Marcel, échevin de Paris et drapier, Étienne Marcel est né dans une famille alliée à de puissantes branches de la bourgeoisie parisienne. Échevin de Paris en 1354, il est élu en 1355 prévôt des marchands, c'est-à-dire chef de la hanse des marchands de l'eau. Il incarne les attentes de la bourgeoisie d'affaires parisienne, qui aspire à une monarchie contrôlée par les états.

Plusieurs partis aux intérêts divergents et aux alliances fluctuantes sont en présence : ceux du roi de France Jean II le Bon, du dauphin (futur Charles V), de la bourgeoisie parisienne et du roi de Navarre Charles le Mauvais. Lors des états généraux réunis en 1355 par le roi Jean pour financer la guerre contre les Anglais, Étienne Marcel est le porte-parole du courant réformateur. Réunis plusieurs fois en 1356, les états généraux monnaient leur appui au roi, réclamant, avec Robert Le Coq, évêque de Laon et partisan de Charles le Mauvais, la déchéance des mauvais conseillers. Quand le roi Jean est fait prisonnier par les Anglais à la bataille de Poitiers le 19 septembre 1356, Étienne Marcel oppose la municipalité parisienne au dauphin. Le roi reconnaît son pouvoir, tout comme le dauphin : la Grande Ordonnance, proclamée à l'issue des états généraux de mars 1357, prévoit une réforme totale de l'administration royale et la réunion régulière des états généraux. À la fin de 1357, la libération de Charles de Navarre (arrêté à Rouen l'année précédente sur ordre du roi Jean) introduit un autre protagoniste, hostile au souverain et au dauphin.

Lorsque le prévôt des marchands laisse dégénérer une manifestation où sont massacrés les maréchaux de Champagne et de Normandie, pourtant réformateurs con-vaincus, le dauphin, qui se proclame régent, s'en remet à Étienne Marcel, mais il quitte Paris en mars 1358, laissant son adversaire coupé de la noblesse réformatrice. Il cherche à isoler la capitale et convoque à Compiègne des états, qui lui accordent des subsides. C'est alors qu'éclate, le 28 mai 1358, une jacquerie, mouvement violent de révolte paysanne contre la noblesse ; les « menées des Jacques » servent les intérêts du prévôt des marchands, mais ce dernier ne les soutient pas ouvertement, et, le 10 juin, à Mello, la jacquerie est écrasée par le roi de Navarre. Charles entre dans Paris, dont il est nommé capitaine général. La défaite du dauphin est totale ; Étienne Marcel aurait triomphé s'il n'avait commis l'erreur d'ouvrir la capitale aux mercenaires anglo-navarrais. La popularité du roi de Navarre et celle du prévôt s'effondrent ; Étienne Marcel est assassiné le 31 juillet 1358.

L'historiographie n'a pas manqué de lier l'histoire de la révolte du « bourgeois » Étienne Marcel avec celle du tiers état sous la Révolution française. Encensé par les uns, qualifié d'ambitieux par les autres, Étienne Marcel mérite d'être considéré à l'aune du XIVe siècle : avec lui prend fin la plus sérieuse tentative de réforme de la monarchie qu'ait connue la fin du Moyen Âge.

Marchais (Georges),

homme politique (La Hoguette, Calvados, 1920 - Paris 1997).

Ouvrier spécialisé, il part en Allemagne, selon certains, comme travailleur volontaire en 1942 ou, selon d'autres, dans le cadre du STO en 1943. Il adhère en 1947 à la CGT et au PCF, et gravit rapidement tous les échelons de l'appareil du parti. Membre du comité central en 1956, du bureau politique en 1959, secrétaire à l'organisation en 1961, secrétaire général adjoint en 1970, il remplace Waldeck Rochet à la tête du parti en 1972. Son ascension s'est d'abord faite sous le contrôle de Maurice Thorez, puis, après la mort de ce dernier, en 1964, avec le soutien de Jacques Duclos et d'Étienne Fajon, qui le préfèrent à Rochet, considéré comme trop libéral. Georges Marchais signe le Programme commun avec le PS et le MRG en juin 1972 et devient député en 1973 (réélu sans discontinuité jusqu'en 1993 inclus). Il soutient François Mitterrand, candidat de la gauche unie, à l'élection présidentielle de 1974, puis prend une part prépondérante à la rupture de l'union de la gauche en 1977. En janvier 1980, reçu par Leonid Brejnev à Moscou, il approuve l'intervention soviétique en Afghanistan. Il recueille 15,34 % des suffrages au premier tour des présidentielles de 1981 et n'est pas candidat à celles de 1988, laissant André Lajoinie porter les couleurs du parti déclinant. Malgré le recul électoral du PCF et la contestation dont il est l'objet au sein du parti, Marchais demeure secrétaire général jusqu'en janvier 1994, date à laquelle il cède la place à Robert Hue.