Vaux-le-Vicomte (château de),
château construit entre 1656 et 1661, situé près de Melun (Seine-et-Marne), dont la composition d'ensemble est l'une des références du classicisme français.
Nicolas Fouquet acquiert la terre de Vaux en 1641. Pour manifester sa promotion spectaculaire - il est devenu en 1653 surintendant des Finances -, il désire y faire construire un château. Les premiers travaux dessinent les jardins, et la construction des bâtiments, extrêmement rapide, est achevée en moins de cinq ans. Fouquet reçoit à Vaux la famille royale, y donne de grandes réceptions, dont la dernière, le 17 août 1661, a lieu trois semaines avant son arrestation. L'ensemble originel est, pour l'essentiel, parvenu jusqu'à nous, les restaurations effectuées à partir du XIXe siècle ayant été facilitées par l'abondance des témoignages d'époque.
Le château proprement dit est construit par Louis Le Vau sur un plan massé, sans ailes et avec de vastes terrasses. La rotonde saillante sur la façade arrière, qui abrite un salon « à l'italienne », est une invention qui fait date. À l'intérieur, la place des escaliers, si importants dans la tradition française, est modeste : les principaux appartements sont en effet situés au rez-de-chaussée. Le travail de décoration est dirigé par Charles Le Brun, assisté, entre autres, des sculpteurs Michel Anguier et François Girardon. Le nouveau style à l'italienne domine (par exemple, dans les traitements des plafonds, assimilés à des voûtes), mais le baroque romain est ici assagi. L'iconographie, assez traditionnelle, repose sur la mythologie et l'emblématique, intégrant cependant quelques allusions contemporaines, dont un hommage allégorique à l'œuvre de Mazarin. On a reproché à Le Vau des faiblesses dans l'organisation des volumes du château. Mais la priorité allait sans doute à la composition d'ensemble du domaine, dont il partage la paternité avec le paysagiste André Le Nôtre. Cette composition se déroule le long d'un axe de 1,5 kilomètre et englobe 500 hectares, dont 70 pour les jardins, ornés d'une abondante sculpture. La perspective principale est coupée par des axes transversaux, dont celui du grand canal, avec cascade et grotte. La hiérarchie des matériaux est nette : des moellons enduits réservés aux bâtiments les plus humbles à la pierre seule retenue pour le château. L'alliance avec la brique, dont la mode est alors en train de passer, n'a plus cours que pour les dépendances. Sans précédent, cette composition sera souvent imitée par la suite. L'exceptionnelle équipe rassemblée par Fouquet passe entièrement au service de Louis XIV. Vaux annonce Versailles.
Vel'd'hiv' (rafle du),
nom donné à une opération d'arrestation massive de Juifs, menée à Paris les 16 et 17 juillet 1942 ; acte de collaboration de l'État français à la « solution finale ».
Le 16 juillet 1942, 4 500 policiers français, munis de fiches établies sur la base du recensement des Juifs effectué à l'automne 1940 par les services administratifs de la Préfecture de police en application d'une ordonnance allemande, reçoivent pour mission d'arrêter à Paris et en banlieue 27 361 Juifs apatrides - allemands, autrichiens, polonais, tchèques, russes d'origine, ou de nationalité indéterminée -, âgés d'au moins 2 ans et jusqu'à 55 ans pour les femmes et 60 ans pour les hommes. La rafle est dite « du Vel'd'hiv' », mais en fait les célibataires et les couples sans enfants sont directement dirigés vers le camp de Drancy ; seules les familles sont internées quelques jours au Vélodrome d'hiver. Cette opération policière dure deux jours et se solde par l'arrestation de 13 152 Juifs, dont près de 6 000 femmes et plus de 4 000 enfants, qui seront déportés quelques jours plus tard à Auschwitz.
D'autres rafles l'ont précédée depuis le début de l'Occupation. Le 14 mai 1941, 3 710 Juifs de Paris, polonais pour la plupart, se sont rendus à la convocation qui leur a été personnellement remise la veille à leur domicile par un policier et ont été arrêtés et internés dans les camps de Pithiviers et de Beaune-la-Rolande (Loiret). Le 21 août 1941, raflés cette fois - en trois jours - dans les rues de la capitale, 4 232 Juifs sont transférés au camp de Drancy. Le 12 décembre 1941 enfin, les Allemands arrêtent 743 notables juifs, presque tous français, qui prennent le chemin du camp de Compiègne.
Mais la rafle du Vel'd'hiv' diffère des précédentes par maints aspects : par son ampleur, par le fait qu'elle frappe aussi femmes et enfants, par le choc qu'elle produit dans l'opinion publique française et surtout par sa signification. Un mois auparavant (7 juin 1942), le port de l'étoile jaune a été imposé par une ordonnance des autorités militaires allemandes à tous les Juifs de zone occupée. Des négociations entre les Allemands et le gouvernement de Vichy ont abouti à l'accord qui a permis le déroulement de la rafle : René Bousquet, secrétaire général à la Police, qui souhaite obtenir de l'occupant l'unification de la police française sous son autorité, a accepté le 2 juillet 1942 de livrer aux Allemands 10 000 Juifs étrangers de zone « libre » et de faire procéder par les policiers français aux arrestations qu'ils projettent en zone occupée.
La rafle du Vel'd'hiv', prélude d'une série de rafles qui vont se dérouler tant en zone occupée que dans le sud du pays, symbolise le passage d'une politique de ségrégation à l'application en France de la « solution finale », et donne tout son sens à la collaboration policière qui a facilité en définitive la déportation de plus de 75 000 Juifs de France.
vénalité des offices,
système par lequel un particulier peut acheter au roi une charge publique, la vendre à un tiers, ou la léguer à ses héritiers.
D'après le jurisconsulte Charles Loyseau (1566-1627), qui juge très sévèrement ce système, l'office est considéré comme une « dignité ordinaire avec fonction publique ». Il est donc autant une marque d'honneur qu'une fonction, et est délivré de manière irrévocable et permanente. En principe, le roi est le seul dépositaire de la puissance publique. En réalité, il s'en considère comme le propriétaire, pouvant en vendre une part. De plus, il permet le trafic privé des charges - entre les titulaires des offices et leurs successeurs - en échange de la perception de taxes supplémentaires. Ce système, propre à la France d'Ancien Régime, perdure, malgré quelques réformes, jusqu'à la Révolution française.