Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
B

Brétigny-Calais (traité de),

traité conclu entre le roi de France Jean II le Bon et le roi d'Angleterre Édouard III (8 mai-24 octobre 1360).

Les négociations de 1360 s'inscrivent dans des temporalités multiples : vieille rivalité franco-anglaise, rôle pacificateur de la papauté, temps court de la crise des années 1356-1358...

Depuis sa défaite à Poitiers (19 septembre 1356), le roi Jean II, prisonnier des Anglais, cherche à obtenir sa libération : pourparlers et accords avec Édouard III se succèdent, tandis que le dauphin Charles (futur Charles V), qui a pris le titre de régent du royaume, affronte des crises politiques. Dans ces tentatives de paix, la papauté adopte sa posture traditionnelle de médiateur : ses légats ménagent les rencontres qui aboutissent aux préliminaires de paix de Brétigny (8 mai), confirmés par les deux rois à Calais (24 octobre).

Le traité de Brétigny-Calais reprend des points déjà discutés, même si la position d'Édouard III est en retrait par rapport à ses revendications antérieures, à cause, principalement, des difficultés de son expédition militaire en France lancée à l'automne 1359. Depuis les débuts de la guerre de Cent Ans, opérations militaires et négociations s'entremêlent ainsi.

Tandis que le roi d'Angleterre renonce à la couronne de France et s'engage à évacuer les forteresses qu'il tient sur le territoire du roi de France, ce dernier lui cède, en pleine souveraineté, une grande Aquitaine (de la Loire aux Pyrénées), les comtés de Guînes et de Ponthieu, ainsi que Calais, et se soumet au paiement d'une rançon de 3 millions d'écus en versements échelonnés. À Calais, les articles relatifs aux renonciations des deux rois (à la couronne, d'une part ; à la souveraineté sur les territoires cédés, d'autre part) sont insérés dans un accord séparé qui prévoit l'échange de ces renonciations au plus tard en novembre 1361 après les transferts des terres ; des otages garantissent le paiement de la rançon.

L'application des accords, complétés par un traité d'alliance, doit transformer une relation féodale en un voisinage d'alliés, mais elle reste un outil politique des deux côtés, où se mélangent « zèle et lenteurs, bonne volonté et nonchalance » (Édouard Perroy pour Charles V), selon les moments et les enjeux. Les renonciations ne sont jamais échangées, et Charles V, en usant de son droit de souveraineté, relance le conflit en 1368-1369. Le traité reste pour autant une référence discursive, de part et d'autre. Il ne clôt pas « les malheurs de la guerre », déversant sur le pays des bandes de soldats sans emploi.

Breuil (Henri, abbé),

ecclésiastique et préhistorien (Mortain, Manche, 1877 - L'Isle-Adam, Val-d'Oise, 1961).

Fils d'un magistrat, Henri Breuil, ordonné prêtre en 1900, a mené des travaux importants dans le domaine de la préhistoire et, plus particulièrement, de l'art préhistorique. Après avoir enseigné à Fribourg, en Suisse (1905-1910), puis à l'Institut de paléontologie humaine, à Paris (à partir de 1910), il est élu à la chaire de préhistoire du Collège de France en 1929, puis à l'Académie des inscriptions et belles-lettres en 1938. Il a consacré ses recherches aux plus anciennes industries humaines du nord de la France et de Belgique (clactonien, acheuléen, tayacien) et au paléolithique supérieur du Périgord. Mais ses travaux les plus connus portent sur le relevé, le classement et la datation de l'art rupestre du paléolithique supérieur, par l'étude de nombreuses grottes peintes (il a découvert celles des Combarelles). Il s'est intéressé également à l'art des monuments mégalithiques et à l'art rupestre d'Éthiopie et d'Afrique du Sud.

Briand (Aristide),

homme politique (Nantes 1862 - Paris 1932).

Onze fois président du Conseil, poste qu'il cumule le plus souvent avec celui de ministre des Affaires étrangères (dont il est chargé également dans plusieurs cabinets), Aristide Briand est une figure centrale de la IIIe République, de 1906 à 1932. Ses idées ont marqué ses contemporains qui, à l'image de Jean Jaurès, ont apprécié ou critiqué le « briandisme ».

Un socialiste fervent.

• Issu d'un milieu provincial modeste, Aristide Briand monte à Paris en 1883. Jeune avocat, socialiste de tendance anarchiste, il échoue une première fois aux élections législatives de 1889, sous l'étiquette radical révisionniste. Proche de Fernand Pelloutier en 1890-1892, il anime le journal la Démocratie de l'Ouest et milite en faveur de la grève générale. Il en fait adopter le principe par la Fédération nationale des syndicats en 1894, à Nantes. Opposant au Parti socialiste de France dominé par Jules Guesde, il contribue à fonder, sous l'impulsion de Jaurès, le Parti socialiste français en 1902. Député de Saint-Étienne de 1902 à 1919, il s'éloigne de la SFIO, créée en 1905, et devient, dès 1910, une figure de proue du groupe des socialistes indépendants, véritable « pépinière de ministres ». Rapporteur de la loi de séparation des Églises et de l'État, votée en juillet 1905, il est bientôt chargé de son application. Ministre de l'Instruction publique, des Beaux-Arts et des Cultes de 1906 à 1909, il préconise vis-à-vis des catholiques une « politique d'apaisement », comme il le déclare à Périgueux en 1909. Remarquable orateur, habile à se constituer des clientèles parlementaires, Briand anime, en 1909-1910, un « courant réformiste laïque » de centre gauche, qui vise à restaurer la paix sociale.

De juillet 1909 à la guerre, onze gouvernements se succcèdent, dont les quatre premiers cabinets Briand. Adversaire déclaré de la SFIO depuis qu'il a réprimé durement une grève de cheminots en octobre 1910, Briand dépose un projet de loi qui porte le service militaire à trois ans, en janvier 1913. Fondateur du groupe de la Fédération des gauches, ministre de la Justice en 1914, il redevient président du Conseil d'octobre 1915 à mars 1917, avec, pour la première fois, le portefeuille des Affaires étrangères. Le retour aux affaires de Clemenceau le tient écarté du pouvoir jusqu'en 1921. Élu député de la Loire-Inférieure en 1919, il le reste jusqu'en 1932. Le 16 janvier 1921, il forme un nouveau gouvernement, de centre gauche, et reprend les Affaires étrangères.