Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
B

Bourguiba (Habib),

homme d'État tunisien (Monastir, sans doute en 1900 [les biographies officielles indiquent 1903]- id. 2000).

Issu de la petite bourgeoisie, il étudie le droit à Paris, rentre à Tunis en 1927 et ouvre un cabinet d'avocat en 1931. En 1932, il fonde le journal nationaliste l'Action tunisienne, s'impose comme chef de file du Néo-Destour lors de sa création en 1934, et se retrouve interné pendant vingt mois dans le Sud algérien. Libéré en 1936, il est à nouveau appréhendé au lendemain de l'émeute d'avril 1938, et transféré en France. Remis en liberté par les Allemands à Lyon, en décembre 1942, il se rend à Rome, puis regagne Tunis en avril 1943. Très surveillé, il reprend bientôt le chemin de l'exil et s'enfuit au Caire (avril 1945), où il plaide la cause de l'indépendance tunisienne. À son retour à Tunis en septembre 1949, il reçoit un accueil triomphal de ses compatriotes, qui le saluent du titre de « Combattant suprême ». Il n'en reste pas moins en butte à l'hostilité des agents du protectorat et le résident général, Jean de Hauteclocque, le fait arrêter en janvier 1952. Successivement interné en Tunisie et en France, il regagne Tunis le 2 juin 1955. Peu après les accords d'indépendance du 20 mars 1956, il est nommé chef du gouvernement, puis devient président de la République après avoir écarté le bey (25 juillet 1957). Jusqu'aux années 1980, il parvient à assurer à son pays une stabilité exceptionnelle dans le monde arabo-musulman. Atteint de sénilité, il est déposé par son Premier ministre, le général Ben Ali, le 7 novembre 1987.

bourguignon (État),

principauté s'étendant, au XVe siècle, du Jura à la Hollande, sous la domination des Valois, ducs de Bourgogne. Le duché de Bourgogne constitue le cœur historique de l'État bourguignon ; revenu à la couronne de France en 1361, il est donné en apanage par Jean le Bon à son fils cadet Philippe le Hardi, en 1363. En quelques décennies, ce dernier, mêlant habilement alliances matrimoniales et coups de force, crée une vaste zone d'influence dans le nord de l'Europe : époux de Marguerite de Flandre, il devient, en 1384, comte de Flandre, d'Artois et de Bourgogne, avec le soutien du roi de France, Charles VI, victorieux des Flamands à Rosebecke en 1382. Son fils Jean sans Peur (duc de 1404 à 1419) poursuit cette politique en imposant sa protection à la principauté de Liège (1408). Mais Jean sans Peur joue également une partie serrée à Paris, où il dispute à Louis d'Orléans, frère de Charles VI, la mainmise sur les affaires du royaume : la lutte d'influence entre Armagnacs et Bourguignons, qui s'allient tour à tour aux Anglais, se solde par son assassinat (1419).

Son fils Philippe le Bon (duc de 1419 à 1467) poursuit avec succès cette politique qui vise à constituer un État autonome : par héritage, confiscation ou occupation, il fait entrer dans l'orbite bourguignonne Namur (1421), le Brabant et Anvers (1430), le Hainaut, la Hollande, la Zélande et la Frise (1428-1432), le Luxembourg (1433) et Utrecht (1455). Après s'être allié avec les Anglais lors du traité de Troyes (1420), il revient à l'alliance française et signe avec Charles VII le traité d'Arras (1435), par lequel il est libéré de son lien de vassalité envers le roi de France en échange d'une reconnaissance de la souveraineté de ce dernier sur toute l'étendue du royaume. Émancipé de la tutelle française, Philippe le Bon, surnommé « le Grand Duc d'Occident », gouverne un puissant État depuis sa cour de Bruxelles. Il lui assure une organisation efficace, et le dote des instruments nécessaires à son indépendance et à son rayonnement : les universités de Dole et de Louvain, une monnaie d'or appréciée (le philippus), l'ordre de la Toison d'or. Cependant, privé de continuité territoriale - sa partie flamande est coupée de sa partie bourguignonne par la Lorraine et par l'Alsace -, l'État bourguignon est voué à l'expansion. Charles le Téméraire (1467/1477), fils de Philippe le Bon, occupe donc la Lorraine et l'Alsace, et caresse l'espoir de reconstituer à son profit l'ancienne Lotharingie, dont l'empereur Frédéric III de Styrie le ferait roi. Louis XI a raison de ce rêve et du Téméraire, qui est tué au siège de Nancy, le 5 janvier 1477. L'État bourguignon est alors démembré : tandis que le duché de Bourgogne retourne à la France, le reste de l'État entre dans le patrimoine des Habsbourg lors du mariage de l'unique héritière, Marie de Bourgogne, avec Maximilien Ier. Le royaume de France est enserré pour deux siècles dans la tenaille hispano-impériale.

Bourse,

marché des valeurs mobilières. Il faut attendre 1724 pour que l'État autorise la création d'une Bourse officielle.

Voulant éviter le renouvellement de l'expérience de Law, qui s'était soldée par une spéculation effrénée, puis par une banqueroute retentissante (1719-1721), il impose à la nouvelle institution des règles strictes, faisant appel à l'expérience des agents de change qui, depuis le Moyen Âge, animaient un marché d'effets de commerce. Cette Bourse reste cependant embryonnaire ; seules trois sociétés sont cotées. Sous l'Empire, le retour à l'ordre institutionnel et financier permet de lancer à Paris une Bourse, qui devient bientôt une véritable Bourse des valeurs au comptant et à terme, installée dans le palais Brongniart (1826).

L'essor boursier au xix• e siècle.

L'augmentation de l'épargne bourgeoise, l'essor de la rente publique, la multiplication des sociétés par actions, expliquent le développement de la Bourse dans les années 1840-1870. Malgré quelques crises, le marché financier connaît une expansion grâce à la mobilisation de l'épargne des classes moyennes. Le nombre de sociétés cotées passe de 30 en 1830 à 2 000 en 1900, et Paris devient la seconde place financière mondiale derrière Londres, puis New York. L'État lance de vastes emprunts pour régler l'indemnité due à l'Allemagne après la guerre de 1870, puis pour financer la Première Guerre mondiale et la reconstruction, et, dans les années trente, le déficit public et le réarmement. L'animation du marché repose sur les banques : les syndicats de garantie et de placement permettent la réussite des opérations d'émission de titres ; des syndicats de soutien des cours empêchent la baisse excessive des cours, que la Caisse des dépôts et consignations régularise par le jeu de ses propres arbitrages sur les valeurs de son portefeuille de placements ; les clients des banques obtiennent des crédits (les « reports ») pour leurs opérations à terme. Détenteurs d'une « charge », les agents de change ont le monopole de l'intermédiation boursière à partir de 1885-1890 ; ils réalisent les transactions, administrent le « parquet » (terme désignant le marché) et gèrent des portefeuilles de clients. En province, des Bourses sont créées à Lyon, à Marseille, à Nancy et à Bordeaux. Un marché parallèle, la « coulisse » (hors cote), occasion de spéculations mais facteur de souplesse pour la percée de titres, est institué pour les valeurs moins solides.