Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
V

Vichy (régime de). (suite)

Le climat change considérablement au début des années 1970. La mort du Général, l'élection de Georges Pompidou, moins porté à célébrer la geste résistante, les premiers effets de l'affaiblissement du gaullisme et du communisme contribuent à réveiller les vieux démons. La nouvelle génération, surgie des barricades de mai 68, ne se satisfait plus du discours officiel et réclame des comptes à ses aînés. Ainsi, le réveil de la mémoire juive, longtemps étouffée par le culte résistancialiste, s'opère par le biais des « fils et filles de déportés », conduits par l'avocat Serge Klarsfeld. Une série d'ouvrages historiques (dont la France de Vichy, de l'Américain Robert Paxton, 1973) ou de films, d'abord documentaires (le Chagrin et la pitié, de Marcel Ophuls, 1971), puis de fiction (Lacombe Lucien, de Louis Malle, 1974) s'emploient à laminer les mythes d'un Vichy jouant un double jeu ou d'un peuple tout entier résistant. Profitant de cette brèche, une véritable « mode rétro » envahit les écrans, les librairies ou les colloques universitaires, en même temps que Vichy, par le biais de retentissantes affaires (interview de l'ancien Commissaire général aux questions juives Darquier de Pellepoix à l'Express en 1978, début de l'affaire Papon en 1981, procès Barbie en 1987), devient un élément du débat politique. Depuis 1983, la progression du Front national contribue encore à alimenter ces réminiscences.

Cette singulière résurgence, comme l'occultation qui l'avait précédée, s'opère selon un mode sélectif. Le thème de la collaboration, obsessionnel à la Libération, tend à reculer devant la redécouverte du génocide des juifs : dans la mémoire collective, Auschwitz (camp d'extermination des juifs) supplante Buchenwald (camp de concentration pour les résistants) comme symbole du Mal. Ce « retour du refoulé » (Henry Rousso) s'accompagne d'anachronismes qui ne contribuent pas à éclairer le débat politique. Ainsi, une partie de la gauche mène, contre le Front national, le combat de l'antiracisme, assimilé à un « antifascisme » rien moins que nostalgique. Les attaques que subit la mémoire de la Résistance (ainsi, Jean Moulin), au nom d'un anticommunisme revisité à la lumière de la chute du mur de Berlin, manifestent le même anachronisme. Quant aux interférences entre « devoir de mémoire », logique judiciaire, analyse historique et arrière-pensées politiques, elles conduisent à l'enlisement, puis, en 1998, au singulier verdict du procès Papon.

L'ombre de Vichy, toujours présente dans la mémoire collective comme dans le débat politique, souligne la profondeur du traumatisme infligé au peuple français par la défaite de 1940, l'Occupation et la Collaboration.

Vicq d'Azyr (Félix)

médecin (Valognes, Manche, 1748 - Paris 1794).

Membre important de l'establishment médical à la fin de l'Ancien Régime, Vicq d'Azyr est l'un de ces rares médecins qui ont, par leur influence plus que par leurs œuvres, sorti l'art de guérir de ses impasses et lui ont ouvert les portes de la modernité.

Étudiant à Caen puis à Paris, où il est formé par Petit et Daubenton à partir de 1765, Vicq d'Azyr devient docteur en 1774 et est élu la même année anatomiste adjoint à l'Académie des sciences. Esprit multiforme, anatomiste et physiologiste autant que vétérinaire, il est vite reconnu dans le milieu très fermé de la grande médecine parisienne. En 1775, Turgot le charge ainsi de réduire une épizootie qui sévit dans le Midi, ce dont il s'acquitte avec succès. En 1778, il est nommé secrétaire perpétuel de la Société royale de médecine, dont il a été l'un des fondateurs, deux ans plus tôt : à la tête de cette institution, il s'efforce de diffuser des idées nouvelles sur la santé publique ou l'enseignement médical, prônant le rattachement de la chirurgie à la médecine, contre l'avis de la puissante faculté de médecine de Paris. Sa notoriété va grandissant : professeur au Jardin du roi, membre de l'Académie française, médecin personnel de Marie-Antoinette à partir de 1788, il est élu à l'Assemblée constituante, où il fonde le Comité de salubrité. En 1790, il propose aux législateurs un projet de rénovation de l'enseignement médical. Jamais voté, ce projet a été repris par d'autres médecins éclairés et a très largement inspiré la loi de décembre 1794 créant les écoles de santé, dans lesquelles s'est, en grande partie, accomplie la révolution anatomo-clinique d'où est sortie la médecine moderne.

Vidocq (François Eugène),

aventurier et policier (Arras 1775 - Bruxelles 1857).

Pendant les guerres révolutionnaires, le jeune Vidocq mène une vie tumultueuse. Il s'engage dans l'armée française puis autrichienne, déserte à plusieurs reprises, exerce une multitude de petits métiers, abandonne sa femme, fraye avec la canaille. En 1796, il est condamné à huit ans de travaux forcés pour escroquerie. Après plusieurs tentatives infructueuses, il parvient à s'évader du bagne de Brest. Repris puis de nouveau en fuite, il finit par se lasser de cette existence rocambolesque. Il offre alors ses services à la police de l'Empire. Comme il connaît parfaitement l'univers interlope des délinquants, la préfecture de police l'engage. Il met sur pied une brigade de sûreté composée en partie de forçats libérés (1811). Son audace et sa finesse de jugement lui ouvrent de multiples succès. Il remet pourtant sa démission en 1827, et fonde une fabrique de papier et carton. Bientôt ruiné, il est de retour à la préfecture de police, en 1832. Ne se contentant plus dès lors de pourchasser avec ses argousins les voleurs ou les forçats en rupture de ban, il se montre tout aussi efficace dans la répression politique, notamment lors de l'insurrection des 5 et 6 juin 1832. Cette collaboration s'achève brutalement : Vidocq est renvoyé à la fin de l'année 1832 pour avoir organisé un vol. Ses Mémoires (1828), dont il n'est pas l'auteur, ont contribué à forger sa sulfureuse réputation.

Vienne (congrès de),

congrès réuni dans la capitale autrichienne de septembre 1814 à juin 1815, avec pour objectifs principaux la réorganisation territoriale de l'Europe et l'établissement d'une paix durable après plus de vingt années de guerre.