Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Flandre. (suite)

Cette situation juridique est difficile à accepter pour un prince de l'importance de Charles Quint, né en Flandre et de culture flamande, roi d'Espagne et souverain d'un Empire « où le soleil ne se couche jamais ». Aux traités de Madrid (1526) et de Cambrai (1529), François Ier lui abandonne sa souveraineté sur le comté. À partir de 1525, la Flandre fait ainsi partie intégrante des Pays-Bas espagnols, vaste ensemble de provinces s'étendant de l'Artois à la Frise, pays riches, densément peuplés, bientôt gagnés par la Réforme protestante.

La conquête française.

• Au XVIIe siècle, la partie méridionale du comté de Flandre est conquise par la France, principalement au cours des guerres menées par Louis XIV. Au traité des Pyrénées, en 1659, Gravelines et Bourbourg, villes de Flandre maritime, sont annexées ; trois ans plus tard, Dunkerque est achetée aux Anglais. À l'issue de la courte guerre de Dévolution, le traité d'Aix-la-Chapelle, signé en 1668, accorde à la France Bergues et Furnes, les riches châtellenies de Lille, Douai et Orchies, ainsi que Menin, Courtrai et Tournai, ouvrant ainsi à l'influence française la vallée de la Lys et la haute vallée de l'Escaut. La conquête est parachevée à l'issue de la guerre de Hollande par l'acquisition de Cassel, Hazebrouck, Bailleul et Ypres lors du traité de Nimègue, en 1678.

Une partie de ces conquêtes est néanmoins perdue au traité d'Utrecht (1713) : Furnes, Menin, Courtrai, Ypres et Tournai passent sous domination autrichienne, les Habsbourg d'Autriche ayant pris la succession des Habsbourg d'Espagne dans ce qui restait des Pays-Bas espagnols. La frontière nord de la France est alors fixée dans ses grandes lignes, mais ce n'est qu'à la fin du XVIIe siècle qu'elle est délimitée précisément, lorsque les enclaves françaises et autrichiennes sont échangées en 1769 et 1779.

Le XVIIIe siècle est marqué par l'intégration de la Flandre conquise à l'espace économique, politique et administratif français. Les villes se détachent peu à peu de leurs débouchés naturels demeurés en territoire autrichien, Gand et Anvers, pour se tourner vers le port de Dunkerque et le Bassin parisien. Lors de l'invasion autrichienne de 1792, les populations des territoires flamands expriment, par leur fidélité à la France, leur acceptation de la conquête française au siècle précédent.

Flandre ou Flandres ?

• Avant les conquêtes de Louis XIV, le comté de Flandre s'étendait de la mer du Nord à la Scarpe et à l'Escaut. Le mot « Flandre » - au singulier - possédait un sens politique et géographique mais ne recouvrait aucun ensemble linguistique précis. Avec la conquête française, le pluriel apparaît : une Flandre française se différencie de la Flandre espagnole, possession des Habsbourg.

De 1668 à 1715, la Flandre française est divisée en deux généralités, séparées par la Lys. La Flandre maritime comprend les villes de Dunkerque et de Bergues, ainsi que leurs dépendances, les bailliages de Bailleul, Bourbourg, Bergues, Furnes, les châtellenies de Cassel et Ypres. Cette généralité, dont les habitants parlent principalement une langue d'origine germanique - un des nombreux dialectes flamands -, est aussi appelée au XVIIe siècle « Flandre flamingante », par opposition à la deuxième généralité de Flandre, improprement appelée « wallonne » - le substantif « Wallonie » n'apparaissant qu'au XIXe siècle pour désigner la partie non flamande de la Belgique.

En Flandre wallonne, la grande majorité de la population s'exprime non pas en wallon, dialecte utilisé dans le comté de Hainaut, mais dans une langue romane, le picard. Cette langue sera plus connue au XXe siècle, particulièrement à partir de la Première Guerre mondiale, sous le nom de « ch'timi », en raison de la prononciation des pronoms « ce » (ch'), « toi » (ti) et « moi » (mi). La Flandre wallonne du XVIIe siècle rassemble le Tournaisis, les châtellenies de Lille, Douai, Orchies, des villes non flamandes telles que Valenciennes, Bouchain, Cambrai, Condé-sur-l'Escaut et, enfin, deux petits territoires de langue flamande, Menin et Courtrai. Après le traité d'Utrecht de 1713, les deux généralités sont réunies en une seule, la généralité des Flandres.

La géographie administrative de la Flandre au XVIIe siècle ne recoupe donc en rien les divisions linguistiques entre pays flamands et pays picard - l'État royal et l'Église utilisant d'ailleurs respectivement le français et le latin -, mais elle est en grande partie à l'origine de l'utilisation du pluriel pour désigner « les Flandres », anciens territoires du comté de Flandre.

Lors de la mise en place, sous la Révolution, d'un nouveau découpage administratif, les noms de provinces, considérés comme des vestiges de l'Ancien Régime, sont supprimés ; la Flandre disparaît comme entité géographique et administrative, et le nouveau département du Nord rassemble l'ancienne généralité des Flandres, le Hainaut français et le Cambrésis.

Fleurus (bataille de) [1er

 juillet 1690], victoire remportée par les Français pendant la guerre de la ligue d'Augsbourg.

Entré en Flandre dès le début de la guerre, le maréchal d'Humières fut battu à Walcourt par le prince de Waldeck, commandant l'armée néerlandaise et impériale (1689). Pour la campagne de 1690, ce dernier espère chasser les Français des Pays-Bas. D'Humières s'établit sur l'Escaut, tandis que le maréchal de Luxembourg, disposant d'une provisoire supériorité numérique (41 000 hommes, contre 38 000 aux alliés), se porte rapidement sur la Sambre.

Le 30 juin, Waldeck répartit son armée en trois corps devant le village de Fleurus, au nord-est de Charleroi. Le lendemain, Luxembourg lance ses cinq colonnes à l'assaut. Il feint de porter son effort sur le centre, mais, en fait, sa manœuvre repose sur un large mouvement tournant sur la droite. Son aile gauche fixe la cavalerie ennemie, mais doit céder du terrain après des succès initiaux ; cependant, son centre résiste à l'attaque de Waldeck. Déployant soudain ses forces sur les arrières des alliés, Luxembourg contraint ces derniers à faire volte-face, ce qui les place entre deux feux. La cavalerie ennemie est disloquée, mais Waldeck réussit à se replier en bon ordre, laissant 5 000 morts (contre 2 000 pour les Français), 9 000 prisonniers et 150 drapeaux, qui vont orner les voûtes de Notre-Dame. Luxembourg y gagne un surnom (« le Tapissier de Notre-Dame »). Sa manœuvre tournante, par son audace et sa belle exécution, fait l'admiration des théoriciens militaires. Mais le succès n'a finalement guère d'impact : la guerre ne s'achève qu'en 1697, par la paix de Ryswick.