Constitution civile du clergé, (suite)
Une profonde déchirure.
• Lors des débats, certains députés contestent la compétence de l'Assemblée sur une question d'ordre religieux. La réforme suppose, en effet, confusion entre Église et nation. La religion catholique est considérée, de fait, comme religion d'État. Les quelques opposants à la Constitution civile critiquent surtout le système d'élection. Ils proposent la tenue d'un concile national ou l'intervention du pape. Mais la réunion d'un tel concile reviendrait à reformer le clergé en ordre, alors que les ordres ont été abolis en février 1790, et les gallicans s'opposent à toute intrusion de Rome.
Dans les jours qui suivent le vote du décret, il n'y a pas de rupture franche. Si la majorité du haut clergé exprime son opposition dans un texte diffusé en octobre 1790 - l'Exposition des principes sur la Constitution civile du clergé -, elle souhaite éviter le schisme et attend l'avis du pape. C'est également avec le souci de préserver l'unité que le roi accepte le décret, le 22 juillet 1790. Mais, la réforme tardant à être appliquée, l'Assemblée décide de mettre le clergé à l'épreuve. La loi du 27 novembre 1790 exige des ecclésiastiques qu'ils prêtent serment sous huit jours. Le haut clergé est massivement « réfractaire » au serment, mais environ 52 % des prêtres et vicaires se conforment à la loi. La scission entre prêtres assermentés ou constitutionnels et prêtres insermentés ou réfractaires se dessine donc avant que la condamnation tardive de Pie VI soit rendue publique. Les brefs Quod aliquantum (10 mars 1791) et Caritas (13 avril 1791) condamnent la Constitution civile du clergé, mais aussi les principes de 1789. Dès lors, la rupture entre une Église constitutionnelle et une Église romaine est consommée. Les prêtres réfractaires sont tolérés jusqu'au printemps 1792. Puis, avec la guerre et la chute de la royauté, leur situation se dégrade. La vague de déchristianisation de l'an II nuit également à l'implantation du clergé constitutionnel. Malgré la séparation de l'Église et de l'État de 1795, les tensions religieuses ne s'apaisent qu'avec le Concordat de 1801.
Pour certains historiens, la Constitution civile du clergé est la plus grave erreur commise par les révolutionnaires : cette réforme est, en effet, l'une des principales causes d'opposition populaire à la Révolution. Cependant, il faut reconnaître que ce décret n'est pas antireligieux dans la mesure où il s'interdit de toucher au domaine proprement spirituel.