Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
R

Rollon (Göngu-Hrolfr, dit),

chef viking, probablement d'origine norvégienne (mort en 932).

Il s'établit en 912, avec ses guerriers, dans la basse vallée de la Seine, à la suite du traité de Saint-Clair-sur-Epte passé avec le roi Charles le Simple.

Entre 900 et 910, Rollon ravage les vallées de la Seine et de ses affluents. En 911, il met le siège devant Chartres, où il est battu par les armées franques. Il accepte alors les conditions de paix que lui propose le roi, sur le conseil des archevêques de Rouen et de Reims et avec le consentement du marquis de Neustrie. En échange de sa soumission au roi franc, de sa conversion au christianisme et de la promesse de défendre la vallée de la Seine, Charles le Simple abandonne au chef viking la région de Rouen, Évreux et Lisieux : Rollon se trouve alors à la tête d'une nouvelle principauté. En 912, imité par l'ensemble de ses guerriers, il est baptisé sous le nom de « Robert », puis épouse une princesse carolingienne. Il s'appuie largement sur les structures administratives carolingiennes et manifeste son soutien à l'Église en favorisant l'archevêque de Rouen et les moines bénédictins. En 924, en échange de sa soumission au duc des Francs Hugues le Grand, il obtient les cités du Mans et de Bayeux et réalise ainsi la première extension vers l'ouest de la principauté normande. Rollon apparaît comme le fondateur d'une nouvelle principauté territoriale, la future Normandie, creuset d'une fusion progressive entre une population de guerriers venus du Nord - les Normands - et les populations gallo-romaines et franques.

romaine (question).

La question de l'unité italienne et des États pontificaux est au cœur de l'actualité politique et religieuse de la France au milieu du XIXe siècle.

En effet, le pape Pie IX (1846/1878) est encore « souverain pontife » : « souverain », car il règne de Bologne à Rome sur un État de trois millions d'habitants reconnu internationalement ; « pontife », car il est le chef de l'Église catholique (le catholicisme étant, aux termes du Concordat, la religion de la « très grande majorité des citoyens français »). Trois points de vue antagonistes s'affrontent : le pape voit dans l'indépendance et l'intégrité de ses États la garantie de la liberté de l'Église ; Cavour et les patriotes italiens veulent la disparition du pouvoir temporel pontifical afin d'achever la formation de l'Italie, avec Rome pour capitale ; les gouvernements conservateurs français cherchent l'appui de l'électorat catholique dans une politique de soutien de la papauté.

De 1849 à 1870, la question romaine traverse quatre phases. En 1849, la IIe République, présidée par Louis Napoléon Bonaparte et dominée par le parti de l'Ordre, organise une expédition militaire à Rome pour en chasser les républicains : malgré la résistance de Garibaldi, le général Oudinot entre dans Rome le 3 juillet et rétablit le pouvoir temporel du pape Pie IX. En 1859, Napoléon III, allié au Piémont contre l'Autriche (entrevue de Plombières, 1858), décide de recomposer la carte politique de l'Italie du Nord ; mais c'est l'ensemble de la Péninsule, à l'exception de Rome et de Venise, que ses victoires contre l'Autriche (Magenta, Solferino, juin 1859) et l'expédition de Garibaldi en Sicile et à Naples entraînent dans le mouvement unitaire. Malgré sa rapide volte-face sous la pression des catholiques et des conservateurs (armistice de Villafranca, juillet 1859), l'empereur reconnaît le nouveau royaume italien tout en assurant à Pie IX une protection militaire. De 1861 à 1870, la France maintient ses troupes à Rome et s'efforce d'obtenir de l'Italie qu'elle renonce à en faire sa capitale (convention de septembre 1864, qui fixe la capitale à Florence en échange d'un désengagement français). La tentative armée des volontaires de Garibaldi contre Rome est repoussée à Mentana (3 novembre 1867) par une expédition française épaulée par les « zouaves pontificaux », volontaires recrutés principalement dans l'Ouest et le Midi. En 1870, enfin, dès ses premières défaites dans la guerre qui l'oppose à la Prusse, la France retire sa garnison de Rome : le 20 septembre 1870, les troupes italiennes entrent dans la ville par la brèche de la Porta Pia et mettent fin à l'existence de l'État pontifical tandis que Pie IX s'enferme au Vatican.

roman (art).

Trois hauts lieux pourraient résumer l'art roman : Cluny, Compostelle, la Terre sainte.

Autrement dit, l'expansion des ordres monastiques, les routes des pèlerinages, le mouvement des croisades. Trois dynamiques qui ont fait de la France, autour des Xe et XIIe siècles, le riche creuset d'une architecture novatrice aux apports décisifs, d'une forme de sculpture originale et admirée dans l'Europe entière, et dont témoignent la littérature épique et les chansons de troubadours. Trois impulsions qui ont permis à la France, dans la subtilité des échanges politiques, économiques, religieux, pacifiques ou conflictuels entre Latins et Barbares, entre Occident et Orient, d'être le réceptacle fécond de formes anciennes universelles, parfois venues de très loin dans le temps et dans l'espace. Lorsqu'en 1818 l'archéologue Charles de Guerville qualifiait de « romans » les monuments édifiés depuis le VIIIe siècle jusqu'au début de l'époque gothique, il employait à dessein un terme en usage depuis le XVIe siècle pour désigner les langues médiévales issues du latin et pour en souligner l'abâtardissement par rapport aux productions romaines. Le mot ne perd son caractère péjoratif qu'à la fin du XIXe siècle, lorsque l'Antiquité classique est reconnue comme n'étant pas le seul ferment de l'art. En intégrant de façon aussi singulière les tendances et les techniques orientales, byzantines, celtiques, l'art roman ne pouvait plus être considéré comme une simple dégénérescence de l'Antiquité, mais apparaissait comme l'une des manifestations les plus originales de l'Occident chrétien.

Une ère nouvelle

La langue d'aujourd'hui restreint l'usage de l'adjectif « roman » à l'art des deux premiers siècles du deuxième millénaire. En Occident, cette période correspond, du point de vue historique, à la constitution d'une Europe chrétienne avec, à l'origine, l'établissement de deux formations politiques : la monarchie capétienne dans le royaume franc, avec l'avènement d'Hugues Capet (987), et le Saint Empire romain germanique, avec le sacre d'Otton Ier à Rome (967). À cela s'ajoute un concours d'événements essentiels : stabilisation et conversion des Barbares normands et hongrois, reconquête de l'Espagne sur les Maures, sécurité politique et sociale, forte expansion démographique et réouverture des routes de commerce, notamment des comptoirs méditerranéens. À l'orée du second millénaire, une ère nouvelle s'ouvre en Occident.