industriel et homme politique (Bidestroff, Moselle, 1805 - Paris 1875).
Orphelin sans fortune, Eugène Schneider est employé à la banque du baron Seillière, où il a rejoint son frère aîné Adolphe. Le soutien de cette puissante dynastie d'affaires lui permet de mettre en œuvre ses premiers projets : en 1830, il se voit confier la direction des forges de Bazeilles, dans les Ardennes. En 1836, surtout, les frères Schneider rachètent l'ancienne Fonderie royale du Creusot, où avait été fabriqué le premier rail français, mais qui périclitait. Adolphe et Eugène - puis Eugène seul, après la mort de son aîné, en 1845 - vont faire de cette fabrique traditionnelle l'un des plus vastes établissements industriels du monde. Le moment est propice : la naissance du réseau ferré français suscite un besoin considérable en produits métallurgiques, rails et machines.
À l'imitation des entrepreneurs anglais, Schneider se lance dans la construction de locomotives, qu'il vend à l'ensemble des compagnies de chemin de fer françaises. Il produit également les moteurs des bateaux à vapeur qui naviguent sur la Saône et le Rhône. Soumis à une demande sans cesse plus pressante et talonné à partir de 1860 par la concurrence anglaise, l'industriel mène une politique d'investissement - voire de surinvestissement - ininterrompue, qui fait des établissements du Creusot un immense et moderne complexe industriel : c'est dans ses ateliers qu'est installé en 1836 le premier marteau-pilon, pour lequel il dépose un brevet. Après la signature du traité de commerce franco-anglais (1860), Schneider renouvelle son outillage, augmentant le nombre des hauts-fourneaux, introduisant le procédé Bessemer d'affinage pneumatique de la fonte. Il organise parallèlement la vie sociale de son personnel, construisant des cités ouvrières et mettant en place un système de retraite.
Sous le Second Empire, il est le plus grand industriel français possédant, outre les usines métallurgiques de Saône-et-Loire, les houillères de Montchanin et de la Nièvre et des participations dans les aciéries de Jœuf et les constructions navales de la Gironde. Actif au conseil d'administration du PLM, président du conseil d'administration de la Société générale, il devient régent de la Banque de France, où il inspire notamment la loi de 1857 qui fait de cet établissement le prêteur de dernier ressort, garantissant le bon fonctionnement de l'escompte nécessaire au mouvement des affaires.
Eugène Schneider est également un homme politique - député (1845), ministre de l'Agriculture et du Commerce (janvier-avril 1851) –, qui se rallie à Napoléon III après le coup d'État du 2 décembre 1851. Sous le Second Empire, il exerce la charge de président du Corps législatif (1867-1870) et soutient l'évolution libérale du régime. Mais, après la défaite de Sedan, il renonce à l'action publique pour se consacrer, jusqu'à sa mort, à la direction de ses entreprises.