catholicisme. (suite)
Une présence renouvelée
Privé de l'appui financier de l'État, confronté aux remous que suscitent les condamnations, sur le plan exégétique, du modernisme de l'abbé Alfred Loisy (1907) et, sur le plan politique, du mouvement le Sillon de Marc Sangnier (1910), le catholicisme français va cependant trouver dans le régime de séparation, qu'il a si amèrement combattu, de nouveaux équilibres et des inflexions fécondes. La Grande Guerre, qui réunit dans la souffrance et l'exaltation du sentiment national, autour de la figure et du sacrifice d'un Charles Péguy, « cléricaux » et « anticléricaux », débouche sur une réintégration des catholiques dans la République : Jeanne d'Arc est canonisée en 1920 et les relations diplomatiques avec Rome sont rétablies. L'expansion des mouvements d'action catholique (JAC, JOC, JEC) et du syndicalisme chrétien (CFTC, 1919), la condamnation de l'Action française par le pape Pie XI (1926), précipitent l'évolution des catholiques vers la démocratie, relayée par des intellectuels prestigieux (Jacques Maritain, Georges Bernanos, François Mauriac, Emmanuel Mounier, Henri-Irénée Marrou). L'épreuve de la défaite de 1940 et de l'Occupation, si elle divise profondément les catholiques, voit l'apparition, dans la continuité de mouvements de Résistance (Témoignage chrétien), d'une éphémère démocratie chrétienne à la française avec la fondation du Mouvement républicain populaire (MRP). Certes, le pontificat de Pie XII marque un regain de tension entre la France et Rome (condamnation des prêtres-ouvriers et de Pierre Teilhard de Chardin), mais le deuxième concile du Vatican (1962-1965), qui renouvelle profondément les modes d'expression de la foi catholique, est influencé par des théologiens français (Jacques Maritain, Henri de Lubac, Yves Congar, Marie-Dominique Chenu). Il n'en suscite pas moins une crise profonde dans une Église qui accuse une grave déperdition de ses effectifs (par défection ou désertion) ; il provoque le trouble d'une partie des fidèles (schisme intégriste de Mgr Lefebvre) et une chute sensible de la pratique religieuse chez les femmes et les jeunes. Le tournant restaurateur du pontificat de Jean-Paul II (1978-2005) semble dessiner un regain d'influence de l'épiscopat (les cardinaux Decourtray à Lyon et Lustiger à Paris) et une réaffirmation intransigeante des principes (revue Communio, 1975). C'est dans la continuité de cette tradition de foi et dans les incertitudes du présent qu'il faut replacer les huit voyages de Jean-Paul II en France et la situation actuelle d'un catholicisme qui demeure, pour reprendre la formule si étonnamment moderne du Concordat, « la religion de la très grande majorité des citoyens français ».