Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
B

Bertin l'Aîné (Louis François, Bertin, dit), (suite)

Le célèbre tableau d'Ingres, représentant M. Bertin assis de face « comme un César bourgeois » (Théophile Gautier) et exposé au Salon de 1833, immortalise ce personnage qui incarne la réussite sociale des notables.

Bérulle (Pierre de),

théologien (Sérilly, Champagne, 1575 - Paris 1629).

Bien que destiné à la carrière de robe par une famille de la noblesse parlementaire, Pierre de Bérulle s'engage dans la prêtrise. Cette vocation sincère reflète le renouveau spirituel français du « demi-siècle des saints ». Le jeune clerc fait partie du cercle de Mme Acarie et déploie une activité tridentine dans le domaine théologique, spirituel et disciplinaire. Le prêtre se démarque de l'humanisme dévot en rejetant le stoïcisme chrétien. D'abord influencé par la théologie abstraite (Bref discours de la perfection chrétienne, 1597), il fonde dans sa maturité une synthèse christocentrique originale, influencée par les Exercices spirituels d'Ignace de Loyola. Dans son traité le plus célèbre (Discours de l'état et des grandeurs de Jésus, 1623), il organise la piété sur une méditation pénitentielle de la vie du Christ, seconde création seule apte à unir le chrétien à la divinité malgré le péché originel.

Mais Pierre de Bérulle est aussi un clerc engagé dans le monde. Il se mêle à la controverse religieuse contre les antipossessionnistes et contre les réformés. Néanmoins, il s'investit davantage dans la réforme du clergé. Il œuvra à l'installation du premier carmel thérèsien à Paris en 1602 et fonde l'Oratoire en 1611, une congrégation de prêtres qui vise à former des clercs souvent peu préparés au sacerdoce. En outre, Pierre de Bérulle est le maître spirituel du parti dévot. Tenant d'une triple alliance avec l'Espagne et Rome contre les États protestants, il s'oppose à la politique anti-habsbourgeoise de Richelieu. En 1627, Urbain VIII le crée cardinal ; mais il connaît la disgrâce royale en 1629, quelques mois avant sa mort survenue au cours de la célébration d'une messe.

Pierre de Bérulle symbolise la réussite d'une école française de spiritualité, mais aussi l'échec du rêve d'une chrétienté européenne désormais limitée par les intérêts nationaux.

Beuvray (mont),

oppidum gaulois, site de l'ancienne capitale des Éduens, Bibracte. Il est situé au sud des monts du Morvan, à cheval sur plusieurs communes, notamment Glux-en-Glenne (Nièvre) et Saint-Léger-sous-Beuvray (Saône-et-Loire), entre Château-Chinon et Autun.

Protégé par sa situation géographique (820 mètres d'altitude), l'oppidum était entouré de deux remparts, dont le plus grand, reconnu sur près de 7 kilomètres, enserrait une superficie d'environ 195 hectares. Pouvant atteindre 4 mètres de hauteur, le rempart interne, du type murus gallicus, était constitué d'un parement de pierre, d'une armature de poutres clouées et d'un bourrage de terre. On pénétrait dans la ville par plusieurs portes - sans doute une dizaine -, dont la plus grande, au nord-est, large de près de 20 mètres, était munie d'un système d'entrée en tenaille.

Les vestiges d'occupation retrouvés à l'intérieur datent, pour l'essentiel, du Ier siècle avant notre ère. Ils révèlent un urbanisme très organisé : plusieurs rues, dont la principale atteint 14 mètres de large, et des quartiers spécialisés. Les artisans, notamment émailleurs, forgerons et bronziers, possédaient des demeures modestes, à proximité des remparts, dans la partie nord-est. La zone des sanctuaires se trouvait au sud. Au centre de l'oppidum, au milieu de la rue principale, a été découvert un grand bassin ovale en pierres appareillées, dont la fonction était sans doute religieuse. Les notables occupaient les quartiers résidentiels, au sud-ouest ; leurs riches demeures, construites selon un plan romain - avec atrium, péristyle, bains, jardins intérieurs -, et parfois décorées de fresques, étaient implantées le long de rues bordées de trottoirs et de galeries. Cette influence romaine tient aux rapports pacifiques, essentiellement commerciaux, qui liaient les Romains et les Éduens, proclamés « frères du peuple romain » dès 125 avant J.-C. Les milliers d'amphores à vin romaines retrouvées au mont Beuvray témoignent de l'importance des échanges.

C'est pourtant à Bibracte que Vercingétorix est proclamé, en 52 avant J.-C., chef de la coalition de tous les peuples gaulois révoltés contre César. L'hiver suivant, ce dernier y rédige la Guerre des Gaules, après sa victoire d'Alésia. Mais, au début du Ier siècle après J.-C., le site, dont la position élevée et retirée s'avère malcommode, est progressivement abandonné au profit d'une nouvelle ville fortifiée fondée par l'empereur Auguste : Augustodunum, l'actuelle Autun.

Redécouvert au XIXe siècle, le site a fait l'objet de fouilles menées par Bulliot, de 1867 à 1887, puis par son neveu, le grand archéologue Joseph Déchelette, de 1897 à 1901. Ce dernier, comparant le matériel découvert ici avec celui trouvé sur d'autres sites à travers l'Europe - et jusqu'en Bohême -, a ainsi défini la période finale de la civilisation celtique, dite de « La Tène ». Depuis 1985, des fouilles de grande ampleur ont entraîné la mise au jour de nombreux vestiges. Un musée de la civilisation celtique a été créé sur le site même.

Bèze (Théodore de),

théologien et écrivain protestant (Vézelay 1519 - Genève 1605).

Après des études juridiques à Orléans et à Paris, Théodore de Bèze mène une existence mondaine ; il publie même un recueil de poèmes amoureux. Converti au protestantisme (1548), il s'enfuit à Genève, où il est accueilli par Calvin. Toute son existence sera désormais consacrée à la Réforme. Jusqu'en 1558, il enseigne le grec à Lausanne. Chef de la délégation protestante au colloque de Poissy (1561), il prend part à la première guerre de Religion. C'est en 1564, à la mort de Calvin, qu'il devient chef de l'Église réformée de Genève. Jusqu'à sa mort, il y traitera les affaires ecclésiastiques avec un remarquable sens de la conciliation. Face aux persécutions qui ensanglantent la France, il coordonne l'action des huguenots ; après le massacre de la Saint-Barthélemy (1572), il lance un vibrant appel à la lutte contre la tyrannie. Durant les dernières décennies du siècle, il échange une correspondance abondante avec les personnalités politiques et intellectuelles de l'Europe entière. Il rédige également une tragédie biblique, Abraham sacrifiant (1550), considérée comme son chef-d'œuvre littéraire.