Mitterrand (François), (suite)
Comment, alors, ne pas s'interroger sur cette longévité et sur cette étonnante faculté d'adaptation et de rebond : enfant d'une IIIe qu'il raillait, pétainiste-résistant, ministre en vue sous la IVe ; puis président de la Ve après en avoir été le grand pourfendeur... Les paraboles à propos de la monarchie « mitterrandienne » se mettent à fleurir. Cette radicalisation critique rejoint la mythification, de son vivant, de « Tonton », plus souvent comparé à de Gaulle qu'à Léon Blum. La « force tranquille » et le « réalisme », la sérénité du président, ses grands travaux, se conjuguent à son âge pour ébaucher un nouveau portrait : celui d'un président philosophe, bâtisseur, humaniste intraitable, déjà entré dans l'histoire. Il n'en reste pas moins que la gestion politique demeure chaotique. À Michel Rocard, Édith Cresson et Pierre Bérégovoy succède Édouard Balladur, pour une autre cohabitation (1993-1995). Affaires et publications diverses alimentent la chronique des intrigues élyséennes.
La fin de « règne ».
• À partir de 1992, plus européen que jamais, Mitterrand se cantonne à des interventions emblématiques : commémorations, inaugurations, sommets internationaux. On peut croire qu'il espère ainsi ennoblir une disparition qu'il sait proche. L'homme a toujours aimé les symboles, les énigmes, qu'il distille entre deux apartés sur la douleur et la mort. Sa vaillance face à la maladie, son mysticisme, le décalage entre l'image du florentin et celle du notable humaniste provincial et lettré, troublent l'opinion, nourrissant un « mystère » romanesque dont celle-ci se rassasie. On est loin, lors de l'élection de Jacques Chirac en mai 1995, de l'image du président de 1981. En dépit de sa conversion au « réalisme », l'homme est resté fidèle à son éthique, mais il est métamorphosé. Préparant sa mort devant la France, il veut marquer l'histoire. Les biographes se précipitent. Mitterrand lui-même semble avoir entretenu - parfois suscité - ce climat passionnel de fin de règne, comme en témoigne la « présentation » de sa fille Mazarine à la France.
Près de neuf mois après avoir quitté l'Élysée, François Mitterrand meurt, à Paris, le 8 janvier 1996.