Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Lourdes, (suite)

Bernadette quitte Lourdes en 1866 pour entrer au couvent Saint-Gildard de Nevers, où elle mourra en 1879. Une statue de la Vierge, sculptée par Fabisch, est placée dans la grotte en 1864. Henri Lasserre publie en 1869 Notre-Dame de Lourdes, promis à une immense diffusion. Le pèlerinage connaît un développement spectaculaire grâce au chemin de fer et à la multiplication des hôtels : les pèlerins sont 140 000 en 1873, un million en 1908 ; le premier pèlerinage de malades est organisé en 1874. Des guérisons s'étant produites, un bureau médical (Bureau des constatations) est fondé en 1882, qui transmet ses observations à l'autorité diocésaine, laquelle décide s'il s'agit ou non d'un miracle. La basilique du Rosaire est consacrée en 1889, et la basilique souterraine Saint-Pie X, en 1958. Bernadette est béatifiée en 1925, canonisée en 1933. Le cardinal Pacelli, futur Pie XII, préside les cérémonies de 1937 ; le pape Jean-Paul II s'y rend en personne en 1983. Par ses ferveurs et ses foules, Lourdes se situe au cœur du catholicisme mondial : 5,5 millions de visiteurs, dont 70 000 malades, s'y sont rendus en 1990.

Louvois, (François Michel Le Tellier, marquis de),

ministre de Louis XIV (Paris 1641 - Versailles 1691).

Fils de Michel Le Tellier, secrétaire d'État à la Guerre depuis 1643, issu de la noblesse de robe, François est assuré de succéder à son père ; mais cet héritier, élevé chez les jésuites, n'en acquiert pas moins une formation « sur le tas », comme c'est souvent le cas au XVIIe siècle : reçu conseiller au parlement de Metz en 1658, il s'initie aux affaires de la guerre sous la direction de son père. Ami d'un roi de trois ans son aîné, marié avec une riche héritière, Anne de Souvré, il joue, en l'absence de son père, le rôle de secrétaire d'État à la Guerre. Continuant l'œuvre paternelle, et malgré les critiques de Turenne et des généraux furieux qu'il s'appuie sur des civils - les intendants d'armée -, Louvois achève de transformer l'armée en une troupe disciplinée et en une administration efficace. À ses yeux, « il ne suffit pas d'avoir beaucoup d'hommes. Il faut qu'ils soient bien faits, bien vêtus, bien armés ». Louvois institue les officiers-inspecteurs, introduit les premiers registres signalétiques de soldats, lutte contre la désertion. Les dépôts de vivres et les étapes sont multipliés ; les baïonnettes et les fusils font leur apparition ; l'uniforme est généralisé ; l'hôtel des Invalides est créé. L'avancement des officiers est réglé sur le principe d'ancienneté suivant l'« ordre du tableau » (1675). Des compagnies de cadets sont instaurées, pour former les cadres. Pour résoudre le problème des effectifs, la milice est instituée en 1688. Surintendant des Postes depuis 1668, Louvois y déploie la même activité de rationalisation. Après la mort de son rival Colbert (1683), il hérite, de surcroît, de la surintendance des Bâtiments, Arts et Manufactures, et contrôle désormais la moitié du Budget royal. Entré au Conseil d'en haut en 1672, Louvois y joue le rôle d'un ministre de la Guerre. Il inspire la politique des « réunions », encourage les bombardements d'intimidation (Gênes, 1684), ne recule ni devant le sac du Palatinat (1689) ni devant la révocation de l'édit de Nantes. Il est aussi soucieux de donner à la France des frontières sûres, impulsant l'œuvre de Vauban.

« Altier, brutal, grossier », selon les mots de Saint-Simon, mais grand travailleur, prodigue envers ses amis, rude envers ses ennemis, Louvois ne fut pas le mauvais génie du règne, mais l'exécutant d'une politique voulue par le roi. Son pragmatisme sans remords fit de la France une puissance militaire capable de tenir tête à l'Europe.

Louvre

Le Louvre est aujourd'hui l'un des plus grands musées au monde.

Plus que dans la richesse de ses collections, fruit d'une accumulation séculaire, son originalité réside dans la valeur architecturale et historique du bâtiment qui l'abrite. Simple forteresse devenue résidence royale, le Louvre, de François Ier à Louis XIV, est un laboratoire du classicisme français. Mais ce n'est qu'au XIXe siècle qu'aboutissent les vastes desseins monumentaux alors envisagés pour ce lieu de pouvoir. Entre-temps, à la fin du XVIIIe siècle, le musée a pris pied dans le palais. Deux siècles seront nécessaires avant qu'il n'en devienne totalement maître.

De la forteresse au palais

Le toponyme « Louvre », dont l'étymologie est incertaine, apparaît dans les années 1180-1190. Il désigne une église nouvelle, Saint-Thomas du Louvre, érigée à l'ouest de Paris, sur la rive droite. Lorsque Philippe Auguste lance la construction de l'enceinte de sa capitale en 1190, il décide d'établir, entre l'église et la nouvelle enceinte, un château qui protégerait Paris d'une attaque par la Seine. Le nouvel édifice, progressivement élevé dans les décennies suivantes, prend à son tour le nom de Louvre. C'est un quadrilatère régulier, au centre duquel se dresse un donjon massif, d'une trentaine de mètres de haut. La « grosse tour du Louvre » devient vite le symbole de la suzeraineté du roi. C'est d'elle que tous les fiefs mouvants de la couronne sont supposés relever. Paris ne faisant guère l'objet de menaces au XIIIe siècle, le château sert surtout d'arsenal et de prison (ainsi pour le comte Ferrand, capturé à Bouvines). Philippe le Bel fait transférer le Trésor royal au Louvre en 1295. Il y est durablement centralisé en 1315. Mais le roi y réside rarement : quand il séjourne à Paris, il loge surtout au Palais de la Cité.

Des transformations s'opèrent sous le règne de Charles V : la création d'une nouvelle enceinte sur la rive droite, très au-delà du Louvre, fait perdre à celui-ci une bonne part de son rôle défensif. Dans le même temps, le souverain en fait une résidence princière : d'importants travaux ont lieu aux environs de 1364-1365. De nouveaux logis sont édifiés sur les courtines nord et est. L'aile nord abrite en particulier un escalier de parade, la « grande vis », édifié dans une tour saillante sur la cour. Le décor est soigné, notamment dans les parties hautes. De nouvelles ouvertures sont percées afin de diffuser la lumière. En 1367, Charles V fait installer dans une tour du château sa « librairie » (bibliothèque), qui compte un millier de manuscrits. L'emprise de la résidence déborde rapidement la forteresse, dont les espaces internes sont au bord de la saturation. De grands jardins sont alors aménagés au nord. Grâce à la présence de Charles V et de Charles VI, le quartier du Louvre connaît un premier essor : hôtels aristocratiques et humbles demeures cernent bientôt le château. Mais celui-ci est déserté par les rois pendant un siècle, et la résidence abandonnée redevient prison et arsenal.