« La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. » Cette définition, donnée à l'article 1er de la Constitution du 27 octobre 1946, a été reprise à l'article 2 de celle du 4 octobre 1958.
Si le mot de « laïcité » ne figure dans le dictionnaire que depuis 1871 - et il est significatif qu'il ait été admis d'abord dans celui de Littré, disciple d'Auguste Comte -, le caractère qu'il confère à la République française apparaît donc à la deuxième place, après l'unité, dans les textes qui la régissent depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Déduction logique de la loi du 9 décembre 1905, loi de séparation des Églises et de l'État, dont l'article 2 stipule que « la République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte » - mais cet article même ne faisait que réitérer la décision des députés de la Convention, formulée à l'article 354 de la Constitution de l'an III : « Nul ne peut être empêché d'exercer, en se conformant aux lois, le culte qu'il a choisi. - Nul ne peut être forcé de contribuer aux dépenses d'un culte. La République n'en salarie aucun ». La laïcité a ainsi été jugée indispensable et même consubstantielle à la République pour des raisons qui tiennent à la fois - Claude Nicolet l'a souligné - aux conditions historiques de son enracinement dans le pays et à ses présupposés philosophiques fondamentaux. Ce régime, qui apparaît à presque tous les Français d'aujourd'hui comme le seul garant de leur unité nationale, a mis près d'un siècle à recevoir l'appui de la majorité des citoyens, et quelques décennies encore à réduire ou à surmonter l'opposition de ceux qui en contestaient les principes ou en redoutaient les désordres. Et, tout au long de cette lutte commencée en 1792, l'Église dominante s'est rangée dans le camp de ses adversaires, obtenant d'eux, lorsqu'ils détenaient le pouvoir - sous la Restauration, sous le Second Empire, sous le gouvernement de Vichy -, les moyens de retrouver ou d'accroître son influence. L'alliancetraditionnelle entre le trône et l'autel suffit à expliquer l'intransigeance des laïques à chacune des grandes étapes de la consolidation républicaine. Défense laïque, bloc, puis front républicain : ce vocabulaire de combat, écho d'une mémoire militante, rappelle ce qu'il a fallu de patience et de volonté pour faire triompher l'idée républicaine de l'État-nation.