Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
S

séparation des Églises et de l'État (loi de),

loi promulguée le 9 décembre 1905.

Elle met fin au système concordataire et institue un régime de liberté religieuse fondé sur la laïcité de l'État, dont le principe est défini dans les deux premiers articles : « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes [...]. La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. »

La fin du système concordataire.

• Ce système avait été mis en place par le Consulat et l'Empire à travers un ensemble de textes (concordat de 1801 avec la papauté ; articles organiques du culte catholique et du culte protestant en 1802 ; décrets de 1808 sur le culte israélite). L'État garantissait la liberté de conscience et de culte, rémunérait les membres des clergés (conséquence de la nationalisation des biens de l'Église gallicane en 1789), prenait en charge les édifices cultuels, et assurait la protection légale des trois confessions religieuses reconnues (catholicisme, protestantisme, judaïsme). En contrepartie, il nommait directement ou indirectement les ministres des cultes (les évêques étaient choisis par l'État, puis recevaient l'investiture canonique du pape), surveillait étroitement la discipline interne aux trois confessions et exigeait des prières pour le gouvernement. En cas de conflit entre clergé, autorités publiques et fidèles, le Conseil d'État était appelé à trancher selon la procédure d'« appel comme d'abus ».

Le système concordataire n'est guère contesté avant le Second Empire, hormis par le mouvement protestant du Réveil (Alexandre Vinet). Mais l'émergence d'une nouvelle génération de républicains, marquée par le positivisme, l'anticléricalisme ou l'athéisme militant, précipite une remise en cause radicale : le programme de Belleville (1869) réclame la séparation de l'Église et de l'État. Arrivés au pouvoir après la démission du président de la République monarchiste Mac-Mahon (1879), les républicains « opportunistes » (Léon Gambetta, Jules Ferry, Paul Bert) procèdent à la laïcisation de l'école publique et de l'État et multiplient déclarations et mesures anticléricales. Cependant, ils n'entendent pas mettre fin au concordat : les années 1880 sont donc l'âge du « discordat », auquel succède brièvement, à la suite du ralliement de l'Église au régime républicain préconisé par le pape Léon XIII, l'« esprit nouveau » des années 1890. Les convulsions de l'affaire Dreyfus, la victoire de la coalition de « Défense républicaine » (1899) puis du Bloc des gauches (1902), la mobilisation du camp laïc (franc-maçonnerie, libre pensée, Ligue de l'enseignement), mais aussi l'impact profond et durable de la déchristianisation et la multiplication des affrontements entre maires, curés et instituteurs rendent la séparation inévitable. La loi Waldeck-Rousseau sur les associations (juillet 1901) permet au ministère dirigé par le radical Émile Combes (1902-1905) de procéder à l'interdiction légale des congrégations et à l'expulsion des religieux ; la France rompt ses relations avec le Saint-Siège (juillet 1904), cosignataire du concordat de 1801.

Le nouveau cadre légal.

• Préparée sous l'égide d'Aristide Briand avec le concours d'un haut fonctionnaire protestant, Louis Méjan, la loi de séparation abolit le système concordataire, supprime le ministère des Cultes, prescrit un inventaire des biens cultuels et impose la création d'associations cultuelles de laïcs, auxquelles seront dévolus les édifices du culte, devenus propriétés de l'État, des départements ou des communes. Si protestants et juifs entrent aisément dans le nouveau cadre légal, la ligne intransigeante l'emporte chez les catholiques, malgré les efforts de conciliation des libéraux (les « cardinaux verts ») ou des démocrates (l'abbé Lemire) : les inventaires donnent lieu à des incidents, cependant limités, dans les terres de chrétienté. En 1906, le pape Pie X condamne la loi comme oppressive ; il considère qu'elle constitue une rupture unilatérale d'un pacte bilatéral (bulles Vehementer nos et Gravissimo). Il faut attendre le second ralliement des années vingt et le remplacement des associations cultuelles par des associations diocésaines, respectueuses de l'autorité épiscopale (encyclique Maximam gravissimamque de Pie XI, janvier 1924), pour que la loi de séparation soit progressivement acceptée par les catholiques. Mais elle ne sera pas étendue aux trois départements de l'Alsace-Lorraine. La laïcité de l'État s'impose au XXe siècle comme l'un des fondements de la République.

Sept Ans (guerre de),

conflit opposant de 1756 à 1763 la France, l'Autriche, la Russie et leurs alliés, d'une part, à l'Angleterre et à la Prusse, d'autre part.

Le jeu des rivalités et des alliances.

• La guerre de Sept Ans est le produit de deux rivalités qui se conjuguent. En Amérique du Nord, Français et Anglais s'affrontent à propos de l'Acadie, de Terre-Neuve et de la vallée de l'Ohio. Parallèlement, l'ancienne alliance franco-prussienne est menacée : en effet, pour empêcher le rapprochement entre la Russie et l'Angleterre, Frédéric II de Prusse s'allie avec celle-ci le 16 janvier 1756. Percevant cette évolution, Louis XV, contre une tradition diplomatique française hostile aux Habsbourg, accepte les propositions de Marie-Thérèse d'Autriche, laquelle, voulant reconquérir la Silésie annexée par la Prusse en 1745, gagne Mme de Pompadour à sa cause. Le renversement des alliances est scellé le 1er mai 1756 : l'Autriche ne s'engage pas contre l'Angleterre, mais chaque contractant doit armer un contingent de 24 000 hommes en cas d'agression prussienne. Dès 1757, la France porte le sien à plus de 100 000 hommes : elle devient un auxiliaire de la politique autrichienne dans une région où elle-même n'a d'autre intérêt que l'éventuelle élection du prince de Conti sur le trône de Pologne.

Les opérations militaires.

• Dès 1755, poussée par les colons américains, l'Angleterre arraisonne, sans déclaration de guerre, 300 bateaux de commerce français. Les hostilités s'ouvrent véritablement en mai 1756, et s'engagent bien pour la France : Minorque est prise aux Anglais. La Russie déclare, quant à elle, la guerre à Frédéric II, qui a envahi en août la Saxe, alliée de l'Autriche. Pendant l'été 1757, les Anglais, battus au Hanovre, songent à cesser le combat malgré la formation d'un gouvernement par l'énergique William Pitt. La victoire de Frédéric II à Rossbach sur les Franco-Autrichiens (5 novembre 1757), redoublée à Leuthen en décembre, retourne la situation. Dès lors, les opérations en Allemagne vont prendre un tour habituel. Régulièrement attaqué par les Russes et les Autrichiens, Frédéric II réussit chaque fois à empêcher leur jonction, même s'il concède quelques lourdes défaites (Künersdorf, août 1759), que les coalisés ne savent pas exploiter. Les Français alternent victoires et échecs, révélant la médiocrité de leurs chefs militaires et leurs rivalités.