Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Guillaume Ier le Bâtard, (suite)

La conquête de l'Angleterre fait de lui le prince le plus puissant d'Occident. En 1066, en effet, le roi d'Angleterre Édouard le Confesseur meurt, qui a désigné Guillaume comme son héritier. Ce dernier entreprend la conquête du royaume que lui a ravi le noble saxon Harold. Soutenu par Philippe Ier, roi des Francs de 1060 à 1108, et par le pape, il mobilise les nobles normands, ainsi que de nombreux chevaliers bretons, flamands et français, et rassemble une grande flotte de type viking, comme le montre la tapisserie de Bayeux. À la suite de sa victoire à Hastings, le 14 octobre 1066, Guillaume est couronné roi d'Angleterre à Westminster le jour de Noël. C'est surtout la reine Mathilde qui gouverne dès lors la Normandie. Outre-Manche, après une difficile victoire sur la grande révolte anglo-saxonne de 1068-1072, Guillaume entreprend une vaste politique de « normandisation » du pays : il fait construire de nombreuses forteresses, confie toutes les hautes fonctions laïques et ecclésiastiques à des Normands, redistribue l'ensemble des terres à l'aristocratie et aux monastères continentaux, et, enfin, instaure un régime féodal rigoureux qui renforce la puissance royale. Fort de l'appui du pape, Guillaume réforme aussi l'Église d'Angleterre avec l'aide de brillants clercs d'origine italienne formés à l'abbaye du Bec-Hellouin, tels Lanfranc (vers 1005-1089) et Anselme (1033-1109). Même si, à sa mort, la Normandie et l'Angleterre sont de nouveau séparées (et cela jusqu'en 1105), la conquête et la politique de Guillaume ont donné naissance aux liens politiques, sociaux et religieux qui assurent l'unité du monde anglo-normand jusqu'au XIIIe siècle, voire au-delà.

Guillaume Ier le Pieux,

comte d'Auvergne et duc d'Aquitaine à partir de 886 ( ? - Saint-Julien de Brioude 918).

Guillaume est le fils unique de Bernard Plantevelue, le fondateur de la maison d'Auvergne, qui fut le personnage le plus puissant au sud de la Loire dans les années 870-880. Ce dernier réussit en effet à regrouper l'essentiel des territoires de l'Aquitaine en mettant à profit sa fidélité au roi. Toutefois, ne pouvant conserver la totalité de son héritage, Guillaume, conscient de sa supériorité sur l'ensemble des grands d'Aquitaine, prend le titre de « duc des Aquitains » (886), même s'il ne contrôle plus que l'Auvergne, le Limousin, le Berry, auxquels il faut adjoindre le Mâconnais et le Lyonnais. Il est probable que la rupture dynastique de 888 (quand, à la mort du Carolingien Charles III le Gros, les grands de la France du Nord désignent comme roi Eudes, comte de Paris) favorise la consolidation du pouvoir de Guillaume, qui ne se prive pas d'accaparer les biens fiscaux et qui fait pression sur les vassaux royaux, tel Géraud d'Aurillac, pour qu'ils entrent dans sa fidélité.

Guillaume acquiert une réputation de piété grâce à ses nombreuses fondations monastiques : Aurillac en 899, Déols en 917 et, surtout, Cluny en 909 ; ces fondations, situées aux marges de ses territoires, ont pour fonction de servir de relais à son pouvoir, et lui permettent aussi de se mettre sur un pied d'égalité avec le roi. L'observance de la règle bénédictine établie à Cluny n'empêche pas Guillaume de rester abbé laïc de Saint-Julien de Brioude, où il est enterré le 6 juillet 918.

Guillaume IV Fierabras ou Bras de Fer,

deuxième comte de Poitou et duc d'Aquitaine de 963 à 990 (vers 935 - vers 994).

Il succède à son père Guillaume III Tête d'Étoupe, qui abdique en 963. Son règne est marqué par les nombreux conflits qui l'opposent aux seigneurs voisins, au premier rang desquels le comte d'Anjou, Geoffroi Grisegonelle, qui lui dispute la place de Loudun. Ses efforts pour doter son duché d'une puissance comparable à celle de l'ancien royaume d'Aquitaine le conduisent à entrer en lutte contre Hugues Capet, dont il refuse, dans un premier temps, de reconnaître la légitimité royale, allant jusqu'à recueillir les enfants de l'ultime prétendant carolingien, Charles de Lorraine. Cependant, il doit finalement se soumettre au roi, confronté à la menace imminente d'un siège de sa capitale, Poitiers. Avant d'abdiquer, en 990, pour se retirer, comme l'avait fait son père, au monastère de Saint-Maixent, Guillaume Fierabras parvient à transmettre à son fils, Guillaume V, un pouvoir solidement assis, tant du point de vue territorial qu'idéologique. De son règne, plutôt mal connu, semblent en effet dater l'usage systéma-tique du titre de dux Aquitanorum et la coutume, pour les ducs d'Aquitaine, de se faire couronner dans la cathédrale de Limoges ; de telles pratiques, développées par ses successeurs, sont le signe d'une politique dynastique désireuse de marquer l'indépendance du duché par rapport au pouvoir royal.

Guillaume V le Grand,

duc des Aquitains et comte de Poitiers, l'un des plus grands princes du royaume au début du XIe siècle (vers 960 - Maillezais, Vendée, 1030).

Après la retraite de son père, Guillaume IV Fierabras, au monastère de Saint-Maixent, en 990, Guillaume hérite de l'Aquitaine, qui fut à plusieurs reprises un véritable royaume. Il domine alors tout le sud du royaume de France et semble, aux yeux de ses contemporains, bien plus puissant que son cousin, Robert II le Pieux (roi de 996 à 1031). Les relations qu'il entretient avec les rois de Castille, de Navarre, d'Angleterre et du Danemark, ou avec l'empereur Henri II, ainsi que ses pèlerinages à Rome et Compostelle, concourent au prestige de ce prince en Europe. Vers 1024, il est même pressenti pour devenir roi d'Italie. Mais sa puissance s'avère très fragile : vigoureusement contesté par les comtes de la Marche et par les seigneurs châtelains poitevins (les Lusignan, les Châtellerault, les Rancogne), son pouvoir ne s'impose guère que dans le comté de Poitiers. Pour faire face à la crise châtelaine, Guillaume recherche l'appui de l'Église. Il fait appel à l'évêque Fulbert de Chartres (vers 960-1028) et soutient le mouvement de la Paix de Dieu : il préside ainsi, après 1010, les conciles de paix de Charroux et de Poitiers. Il encourage aussi la diffusion du monachisme clunisien en Aquitaine et assure l'essor des abbayes fondées par ses parents à Bourgueil et Maillezais, où il prend l'habit monastique peu avant sa mort.