Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Oradour-sur-Glane, (suite)

Dès les lendemains de la Libération, Oradour devient le symbole de la barbarie nazie : les ruines du village sont respectueusement conservées ; des visiteurs y affluent. Mais le procès des bourreaux, qui s'ouvre devant le tribunal militaire de Bordeaux en janvier 1953, est difficile : morts ou en fuite, les principaux responsables sont absents ; surtout, parmi les 21 inculpés, on ne compte que sept Allemands contre quatorze Alsaciens, dont douze ont été incorporés de force dans la SS. En vertu de la loi du 15 septembre 1948, ces derniers sont passibles d'un jugement et leur condamnation est réclamée par les rares survivants et l'ensemble de la population du Limousin, mais l'Alsace unie se mobilise en leur faveur, refusant de distinguer leur sort de celui des autres « malgré-nous ». Face aux risques que fait peser sur l'unité nationale l'affrontement de deux mémoires, les responsables politiques privilégient la raison d'État : condamnés à des peines de prison et de travaux forcés par le tribunal, les douze Alsaciens sont aussitôt amnistiés par le Parlement. Seuls les députés communistes se sont prononcés en bloc contre cette amnistie. L'Alsace est soulagée, mais les habitants et les élus de la Haute-Vienne sont durablement meurtris par ce qu'ils jugent être une « trahison » de l'État.

Oratoire de France,

appelé aussi Oratoire de Jésus et de Marie Immaculée, compagnie de prêtres séculiers vivant en communauté sans avoir prononcé de vœu.

L'Oratoire de Jésus et de Marie Immaculée est fondée par Pierre de Bérulle le 11 novembre 1611 et obtient la bulle d'approbation de Paul V - Sacrosanctae - en 1613. Inspirée des oblats de Saint-Ambroise de saint Charles Borromée, la communauté désire « relever l'état de prêtrise ». Son fondateur entend sanctifier le prêtre sur le modèle du Christ, médiateur premier entre Dieu et les hommes. À cette fin, le clerc doit quotidiennement dialoguer en oraison avec le Fils, d'où le nom de la congrégation. Les prêtres doivent chaque jour célébrer la messe, faire une retraite annuelle d'une semaine et une courte retraite spirituelle chaque mois. Des heures sont affectées à l'étude des sciences sacrées. Sous la responsabilité épiscopale, les oratoriens sont appelés à accomplir leur charge en ignorant les choses profanes tels que les bénéfices. Cette volonté de perfection se marque par le port de la soutane à la manière des prêtres romains. Malgré un essor rapide, la compagnie s'essouffle après 1650. En 1702, elle compte 78 communautés et 581 Frères. Son recrutement, sélectif, touche essentiellement les élites urbaines de Paris, de Rouen, de Lyon, du Val de Loire et de la Provence. L'Oratoire est organisé de façon centralisée, autour d'un général élu et d'une assemblée des Pères, qui se réunit tous les trois ans. Son influence dépasse néanmoins son implantation. À travers les séminaires, lors des quatre grandes fêtes religieuses et durant les missions dans les églises paroissiales, l'œuvre des oratoriens irradie l'ensemble du clergé. L'originalité pédagogique de leurs collèges est un atout supplémentaire bien qu'elle ne mette pas en péril la prédominance jésuite. Dans le collège d'Anjou (1624), le catéchisme et les mathématiques sont dispensés en français, et cette langue est tolérée lors des récréations et dans les petites classes. Une place est réservée à l'enseignement de l'histoire et des sciences exactes. Enfin, les régents choisissent plutôt la persuasion que la contrainte disciplinaire. Cependant, au XVIIIe siècle, la crise janséniste et une certaine liberté d'esprit précipitent le déclin de la communauté. Ainsi, les thèses richéristes du Père Quesnel et la lecture critique des Écritures de Richard Simon sont condamnées. En outre, la qualité des nouveaux Pères et des régents s'affaiblit. Toutefois, la congrégation a réussi à imposer durablement l'image du « bon prêtre », relayée par les lazaristes, les sulpiciens et les eudistes. Après sa dissolution en 1792 et plusieurs restaurations au XIXe siècle, le Père Courcoux (1870-1951) organise la reconstitution de l'Oratoire en 1919. La congrégation se consacre désormais à « l'apostolat de la Science ».

Ordonnance de réformation du royaume,

grande ordonnance promulguée en 1254 par Louis IX au retour de la croisade d'Égypte afin de moraliser l'administration royale et l'ensemble du royaume.

L'ordonnance est élaborée par le roi lui-même et par ses principaux conseillers, Jean de Maisons, Pierre de Fontaines et surtout le juriste Gui Foucois, futur pape sous le nom de Clément IV. Elle reprend des textes royaux antérieurs et certaines mesures appliquées dans ses domaines en 1251-1253 par le frère du roi, Alphonse de Poitiers. Elle tient compte des insuffisances de l'administration royale - révélées par l'enquête menée en 1247 - et de la volonté du monarque de gouverner avec un esprit de rigueur religieuse et morale qu'il a acquis au cours de la croisade et au contact de Frères franciscains comme Hugues de Digne.

En premier lieu, l'ordonnance prévoit de nombreuses mesures destinées à assurer la moralité de l'action menée par les baillis et les sénéchaux. Il s'agit pour le roi de limiter les abus de pouvoir et la corruption de ses agents : les baillis et sénéchaux se voient ainsi interdire de contracter des emprunts, d'acheter des biens, de recevoir ou de donner des présents dans leurs circonscriptions, et même d'épouser une femme qui en serait originaire. Ils doivent mener une vie décente, assurer la protection des routes et le transport des marchandises, notamment en période de famine, et procéder publiquement à la nomination de leurs officiers subalternes. Enfin, à la cessation de leurs fonctions, ils doivent demeurer disponibles pour rendre compte de leur gestion et recevoir d'éventuelles plaintes de leurs administrés. D'autre part, l'ordonnance comprend des mesures concernant la « moralité publique » : elle réprime ainsi l'usure, le blasphème, les jeux de hasard ainsi que la prostitution. En outre, elle engage les représentants du roi à pourchasser les juifs et à brûler les bibliothèques rabbiniques. La réforme de l'administration royale s'accompagne donc de la volonté de « purifier » le royaume tout entier.