confrérie, (suite)
Des confréries de métiers...
• Ce sont elles les plus nombreuses, qui organisent la vie religieuse de leurs membres, renforçant ainsi la cohésion de ces groupes qui reposent sur une activité économique commune. Cependant, les deux structures ne se superposent pas strictement : certains métiers comportent plusieurs confréries, certaines confréries sont ouvertes à plusieurs métiers. Dans tous les cas, la confrérie - qui, à l'instar du métier, est plus ou moins intégrée aux rouages du gouvernement urbain - est investie, dès le XIIIe siècle, par les membres du patriciat urbain, et devient un instrument de contrôle social. Elle garde, jusqu'à l'époque moderne, une dimension politique plus ou moins explicite. En effet, les confréries se donnent pour projets d'assurer la concorde entre leurs membres, et de désamorcer tous les conflits. Le moment essentiel dans la vie confraternelle est souvent, au Moyen Âge, le repas pris en commun, qui constitue un rituel de paix. Certaines confréries ne se manifestent véritablement qu'une fois l'an : on revêt la tenue du groupe, on participe au banquet (souvent financé par les notables), on assiste à la messe solennelle, on célèbre le saint patron, et on s'adonne à divers rites d'initiation et de sociabilité. D'autres encadrent plus strictement la vie religieuse des laïcs, mais la vérité intime du mouvement confraternel s'exprime peut-être dans les statuts de la confrérie du Saint-Sacrement de la paroisse de Coësmes, dans le diocèse de Rennes : « Malheur à celui qui est seul, car s'il tombe personne ne sera là pour le relever. » La confrérie est une famille de substitution, qui permet de se prémunir contre les maux du temps. Pendant la grande crise démographique du XIVe siècle, ce rôle d'assistance morale et matérielle aux pauvres, aux malades, aux veuves et aux orphelins devient central. Certaines confréries - par exemple, dans la région d'Avignon, aux XIVe et XVe siècles - développent essentiellement une fonction d'encadrement de la mort : on paie les funérailles des confrères, on prie pour eux, leur assurant ainsi la certitude d'une « bonne mort ».
...aux confréries spiritualistes.
• C'est sous le strict contrôle de l'autorité ecclésiastique que les confréries connaissent, à partir de la Contre-Réforme, une seconde jeunesse. Elles demeurent fondamentalement des sociétés de secours mutuel, mais revêtent, sur le plan spirituel, les formes les plus variées. Tandis que les confréries des Agonisants se concentrent sur leur rôle funéraire, celles de Charité - en Normandie, par exemple - prennent en charge les pauvres et les indigents. Plus troublante pour l'Église officielle apparaît la spiritualité baroque des pénitents de Provence, qui, encapuchonnés, défilent en procession et mettent en scène leur exaltation mystique. Les confréries de l'Immaculée Conception ou du Rosaire développent le culte marial, tandis que celles du Saint-Sacrement, souvent fondées par des jésuites, rassemblent les dévots du Christ. Ces derniers peuvent tenter de jouer, plus ou moins clandestinement, un rôle politique, comme c'est le cas de la compagnie du Saint-Sacrement, officiellement dissoute en 1666. Le relâchement de la dynamique confraternelle, à la fin du XVIIIe siècle, constitue un indice assez sûr de déchristianisation, ce qui n'empêche évidemment pas que les confréries forment encore, pour le christianisme contemporain, un cadre essentiel de la vie religieuse des fidèles.