Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Berry (Jean de France, duc de), (suite)

Piètre politique, Jean de Berry reste dans l'histoire comme un grand mécène et un collectionneur exceptionnel, qui fait appel aux plus brillants architectes et sculpteurs pour embellir ses châteaux et son hôtel parisien. Grand amateur de livres, il entretient des ateliers d'enluminure dans tous ses domaines. Conservées à Chantilly, les Très Riches Heures du duc de Berry, peintes par Pol et Hennequin de Limbourg, sont le plus luxueux de ces manuscrits.

Berry (Marie-Caroline de Bourbon-Sicile, duchesse de),

fille de François Ier, roi des Deux-Siciles, et de Marie-Clémentine d'Autriche (Palerme 1798 - Brünnsee, Autriche, 1870)  ; épouse du duc de Berry, de vingt ans son aîné et fils du futur Charles X.

L'ultraroyalisme de son mari vaut à celui-ci, en 1820, le coup de poignard fatal de Louvel, qui voulait ainsi provoquer l'extinction de la branche aînée des Bourbons : geste inutile, puisque, quelques mois plus tard, la duchesse mettra au monde un fils posthume, le duc de Bordeaux, futur comte de Chambord et prétendant au trône sous le nom d'Henri V, salué comme « l'enfant du miracle » ; une naissance semble assurer l'avenir de la dynastie.

Lors de la révolution de 1830, Marie-Caroline suit Charles X en exil, puis se lance, en 1832, dans une conspiration qui va ridiculiser la cause légitimiste : elle tente de soulever la Provence, puis la Vendée, pour faire proclamer roi son fils, se cache plusieurs mois à Nantes, y est arrêtée, puis emprisonnée à la citadelle de Blaye, où, pendant sa détention, elle accouche d'une fille ! Libérée en 1833, elle épouse le comte Lucchesi-Palli, diplomate sicilien, qui endosse la paternité de « l'enfant de la Vendée », et lui en fera quatre autres. Par la suite, elle ne joue plus aucun rôle politique, ni dans l'éducation d'Henri V.

La duchesse de Berry avait du courage et un esprit d'intrigue qui lui tenait lieu de sens politique. Sa gaieté anima la cour morose et compassée des derniers Bourbons (elle lança la mode des bains de mer, en 1824, à Dieppe). Son caractère romanesque et généreux l'a rendue assez populaire, et a séduit plusieurs historiens. L'épopée tragicomique de 1832 la fit entrer dans la légende royaliste, où elle incarna, en plein style « troubadour », un renouveau de l'esprit chevaleresque. Son emprisonnement à Blaye et le scandale organisé par le gouvernement de Louis-Philippe autour de sa grossesse irritèrent profondément les légitimistes et contribuèrent à priver la monarchie de Juillet du soutien d'une partie des notables.

Berryer (Pierre Antoine),

avocat et homme politique (Paris 1790 - Augerville-la-Rivière, Loiret, 1868).

Celui que ses contemporains ont considéré comme « le plus grand des orateurs français » (Cormenin, 1838) est lui-même le fils d'un avocat parisien ; il débute au barreau dès 1812 et défend, aux côtés de son père, le maréchal Ney en 1815. Il prend parti, dès la première Restauration, pour la monarchie et se rallie à la branche aînée des Bourbons : par-delà une grande indépendance de caractère, il demeure sa vie durant le plus éloquent porte-parole de la cause légitimiste. Sa longue carrière d'avocat le porte à défendre avec générosité et talent les causes les plus diverses : le général Cambronne en 1815, Lamennais en 1826, Chateaubriand en 1831, la duchesse de Berry en 1832, Louis Napoléon Bonaparte en 1840, les ouvriers typographes parisiens en 1863. Sa carrière politique le range parmi les ultraroyalistes de la Restauration : il attaque violemment Decazes en 1816 et collabore au Drapeau blanc et à la Quotidienne. Député de la Haute-Loire en mars 1830, il soutient le ministère Polignac. Représentant des Bouches-du-Rhône sous la monarchie de Juillet et la IIe République, il est le principal orateur de l'opposition catholique et légitimiste, et défend parfois des positions libérales et démocratiques. Au lendemain du coup d'État de 1851, il est élu à l'Académie française (février 1852). À nouveau député de Marseille en 1863, il siège alors dans l'opposition légitimiste et libérale.

Bert (Paul),

physiologiste et homme politique (Auxerre 1833 - Hanoi 1886).

Issu d'une famille bourgeoise de tradition voltairienne, Paul Bert poursuit de 1852 à 1857 des études de droit. Puis, cédant à sa vocation, il s'inscrit à la faculté de médecine, où il se lie avec Claude Bernard, auquel il succédera à la Sorbonne. Agrégé d'histoire naturelle, docteur en médecine (1863) puis en sciences naturelles (1866), ce futur promoteur de l'enseignement féminin épouse en 1865 une jeune Écossaise de 18 ans, de confession anglicane. Leur mariage est béni à l'ambassade de Grande-Bretagne, ce qui n'empêche pas Paul Bert de se déclarer, peu après, évolutionniste et matérialiste. Sa carrière politique commence au lendemain du 4 septembre 1870. Député gambettiste de l'Yonne à partir de 1872, il devient rapporteur permanent de la commission d'enseignement de la Chambre. Après l'adoption de son projet de loi sur les écoles normales départementales, le 9 août 1879, il soutient fermement la politique de Jules Ferry, qu'il remplace brièvement dans le « grand ministère » Gambetta (14 novembre 1881-26 janvier 1882). Président perpétuel de la Société de biologie, membre de l'Académie des sciences (1881), il prend le temps d'écrire des manuels de vulgarisation. Partisan résolu de l'entreprise coloniale, il est nommé résident général au Tonkin le 31 janvier 1886, et entretient de bonnes relations avec les missionnaires français. Chez le vice-président de l'Union de propagande démocratique anticléricale, l'anticlérical s'est rendu aux raisons du patriote.

Berthelot (Marcelin),

chimiste et homme politique (Paris 1827 - id. 1907).

 Depuis le Collège de France, où il devient, à 23 ans, le préparateur de Balard, jusqu'au ministère de l'Instruction publique et des Beaux-Arts (1886), puis au ministère des Affaires étrangères (1895-1896), la carrière de Marcelin Berthelot, comblé d'honneurs, est exemplaire du rôle dévolu aux savants à l'âge du positivisme triomphant : professeur de chimie organique à l'École supérieure de pharmacie (1859) et au Collège de France (1865), membre de l'Académie des sciences (1873) et de l'Académie française (1901), sénateur inamovible (1881), il entre au Panthéon à sa mort, en 1907.