homme de guerre et connétable (Chantilly 1493 - Paris 1567).
Cadet de l'une des plus anciennes familles d'Île-de-France, filleul de la reine Anne de Bretagne (d'où son prénom), Anne de Montmorency est élevé avec le futur roi, François d'Angoulême. Si l'on excepte sa disgrâce de 1541 à 1547, Anne de Montmorency est, durant presque toute sa vie, l'un des grands officiers de la couronne et l'un des principaux ministres sous François Ier et Henri II, servi en cela par sa fidélité mais également par la force du parti qu'il représente à la cour et dans la noblesse. Ce grand baron est aussi et avant tout un soldat - distingué sur le champ de bataille (à Ravenne, dès 1512), et qui décédera à la suite d'une blessure reçue en combattant les huguenots cinquante-cinq ans plus tard.
S'il devient successivement maréchal de France (1522), grand maître de la Maison du roi (1526), puis connétable de France (1538), son parcours dans le siècle est loin d'être univoque. Il est l'inspirateur d'une stratégie militaire prudente et défensive, mais figure au premier rang lors de deux déroutes retentissantes, à Pavie en 1525 puis, surtout, à Saint-Quentin en 1557 - il est fait prisonnier dans les deux cas. Habile diplomate, il sait, après la défaite, négocier des traités réalistes préservant l'essentiel pour le royaume (à Madrid en 1526, puis au Cateau-Cambrésis en 1559), mais il devient aussi, après 1560, un catholique hostile à toute concession aux réformés, sans trop se soucier de l'affaiblissement de la monarchie, et tout en sachant à l'occasion protéger ses parents huguenots, les Châtillon.
Chef et patriarche d'un véritable clan familial, grand féodal conservateur, imprégné de valeurs chevaleresques, Anne reste fidèle à la couronne, mais ne néglige pas ses intérêts privés : il agrandit ainsi ses domaines par des achats, des spoliations et des « dons » forcés. Sévère et austère, peu à l'aise dans les fastes mondains de la cour, il peut aussi être un mécène éclairé, qui rassemble une remarquable collection d'œuvres d'art et de manuscrits dans ses châteaux de Chantilly et d'Écouen.
Ainsi, Anne de Montmorency a, semble-t-il, toujours choisi, ou accepté, de conjuguer, avec pragmatisme, ses convictions avec les nécessités de son temps, et l'idée qu'il se faisait de sa place ou de sa fonction publique avec la défense de ses intérêts propres. Ce qui lui a permis, en quelque cinquante ans, de faire de sa famille l'égale des plus grandes, la rivale des Bourbons et des Guises.