Les marchés, voués au commerce de proximité, existent depuis l'Antiquité. Quant aux foires, elles sont attestées dès le haut Moyen Âge.
Problèmes de définition.
• La différenciation entre les deux formes d'assemblées est subtile, d'autant que les nuances régionales sont infinies. Et l'étymologie ne nous aide guère sur ce point. Selon certaine tradition, relevée encore récemment par le Dictionnaire historique de la langue française, le mot « foire » est l'aboutissement du latin classique feriae : « fêtes » ou « jours de fête ». L'Encyclopédie lui préférait une autre origine : « Foire, ce mot vient du latin forum, place publique, affirme Turgot ; il a été synonyme de celui de marché et l'est encore à certains égards : l'un et l'autre signifient concours de marchands et d'acheteurs dans des lieux et dans des temps marqués. »
Foires et marchés se distinguent par leur périodicité, leur aire de rayonnement et les produits commercialisés. Les foires ont lieu entre une et douze fois par an, et concernent traditionnellement des échanges à moyenne ou longue distance ; producteurs ou marchands y vendent des produits finis, en particulier textiles, des matières premières ou des bestiaux. Les marchés assurent, une fois par semaine, le gros de l'approvisionnement urbain en denrées alimentaires depuis le Moyen Âge. Ils se limitent donc aux échanges locaux.
L'évolution des fonctions économiques.
• Les deux institutions relèvent du pouvoir du prince, qui favorise leur création pour encourager le commerce. Les marchands y jouissent d'une protection particulière, et, pour attirer les étrangers, certaines grandes foires sont « franches », c'est-à-dire que les transactions y sont exemptées de droits. Jusqu'au XIXe siècle, le réseau des foires et des marchés tend à s'étoffer. Mais leur rôle se transforme, perdant peu à peu de son exclusivité. Les marchés se spécialisent : marchés à la viande, aux légumes, aux grains. Par ailleurs, la concurrence des boutiques, de plus en plus nombreuses à partir de l'époque moderne, contribue à diminuer leur part relative dans les échanges. Toutefois, la surveillance dont ils font l'objet, la publicité des transactions et leur contrôle par les autorités urbaines expliquent l'attachement des consommateurs à cette forme publique d'organisation du commerce. Jusqu'au XIXe siècle, les halles sont périodiquement agrandies, réaménagées ; les règles d'hygiène, renforcées.
Quant aux foires, elles connaissent des évolutions très différenciées. Les foires de Champagne, par exemple, sont devenues précocement des foires de change, suivies, plus tardivement, par celles de Lyon, au XVIIe siècle. Les grandes foires de marchandises, concurrencées par l'essor des approvisionnements directs dans les fabriques et par la vente sur échantillon, connaissent presque toutes des mutations lentes, mais importantes. Au XVIIIe siècle, rares sont celles qui attirent encore beaucoup d'étrangers, comme Beaucaire où Espagnols et Italiens sont assidus. Mais la plupart deviennent des places nationales, voire régionales. Par ailleurs, leur rôle dans le commerce de gros est amoindri : elles drainent la part la plus dispersée de la production, souvent de moindre qualité. Le détail prend en revanche une place croissante. Un public nombreux, comme à Caen et à Guibray, vient y faire ses emplettes et jouir des divertissements et des spectacles qui lui sont offerts. Au XIXe siècle, le chemin de fer et l'essor des formes modernes de distribution rendent irréversible le déclin de ces grands rendez-vous, même si les foires rurales demeurent très vivaces. De plus en plus spécialisées - bestiaux, soie, amandes, huile, etc. -, elles jouent un rôle non négligeable dans la commercialisation des produits, la fixation des prix et, en définitive, dans l'essor agricole de la France au siècle dernier.