Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
E

Être suprême (culte de l'),

culte révolutionnaire instauré par le décret du 18 floréal an II (7 mai 1794), et disparu après la chute de Robespierre, en juillet 1794. Contre le mouvement de déchristianisation, dont le culte de la raison marque l'apogée, la Convention nationale, sous l'influence de Robespierre, prend, le 16 frimaire an II (6 décembre 1793), un premier décret affirmant la liberté des cultes, puis instaure, au printemps 1794, le culte de l'Être suprême. Voté en plein cœur de la Terreur, le décret du 18 floréal spécifie, dans son article premier, que « le peuple français reconnaît l'existence de l'Être suprême et l'immortalité de l'âme », et précise, dans le deuxième, que « le culte digne de l'Être suprême est la pratique des droits de l'homme ». Il institue en même temps toute une série de fêtes nationales, dont la plus importante est consacrée à l'Être suprême. Célébrée le 20 prairial an II (8 juin 1794), cette fête est conduite par Robespierre - alors président de la Convention -, qui met symboliquement le feu à une allégorie de l'athéisme, dévoilant celle de la sagesse, puis marche en tête d'une grande procession allant de l'Hôtel de Ville jusqu'à une « montagne » élevée au Champ-de-Mars. Cette cérémonie est imitée dans tout le pays.

Cette « religion nationale », qui repose sur la vertu républicaine, occupe, dans l'esprit de Robespierre, une fonction sociale. Elle met un terme à la déchristianisation menée par les hébertistes, qui sont accusés de faire le jeu des contre-révolutionnaires. Elle est surtout censée assurer la cohésion sociale en maintenant les bases d'une morale publique, en l'occurence civique, et en satisfaisant la religiosité populaire. Mais sans doute a-t-elle une autre raison d'être : en effet, la cérémonie précède de deux jours le décret du 22 prairial, qui renforce la Terreur. Il s'agit donc aussi de rétablir l'idée consolante de Dieu et de la justice divine, désormais liée à la justice révolutionnaire, supposée clémente pour les innocents, et inflexible pour les coupables. Il est difficile de mesurer l'impact qu'a eu cette religion décrétée par l'État, et qui fait ainsi dépendre du droit l'existence de Dieu. Religion naturelle sans églises et sans prêtres qui bannit tant la superstition que l'athéisme, elle paraît sans doute bien abstraite. Le culte de l'Être suprême ne survit pas à Robespierre, renversé le 9 thermidor an II (27 juillet 1794) et présenté par ses adversaires comme un pontife aspirant à la dictature.

Eudes,

comte de Paris, puis roi des Francs de 888 à 898 (vers 860 - La Fère 898).

Trop jeune pour succéder à son père, Robert le Fort, comte et marquis de Neustrie tué à la bataille de Brissarthe en 866, Eudes se voit attribuer le comté de Paris, vers 883, par le roi Carloman. Il s'illustre en défendant la cité assiégée par les Normands d'octobre 885 à septembre 886. Ses qualités de chef de guerre lui valent d'être reconnu par Charles le Gros (empereur d'Occident et roi des Francs) comme le chef de la Neustrie, c'est-à-dire le principal responsable politique et militaire de la partie nord du royaume occidental. C'est la première étape vers la royauté. Charles le Gros, déchu de son titre impérial en 887, meurt en janvier 888. Le 29 février, à Compiègne, une assemblée de comtes et d'évêques du nord du royaume acclame Eudes, aussitôt sacré par l'archevêque de Sens. Si ce premier roi non carolingien est contesté par certains grands du royaume, son autorité est rapidement confortée par la victoire qu'il remporte sur les Normands à Montfaucon-en-Argonne, le 24 juin 888. Elle lui apporte la reconnaissance du roi carolingien de l'Est, Arnulf, et les suffrages des partisans de ce dernier. Mais plusieurs défaites successives d'Eudes face aux Normands font renaître un parti favorable à l'héritier carolingien, Charles le Simple, qui vient d'atteindre la majorité, et qui est sacré à Reims le 28 janvier 893. Après une longue lutte, Eudes finit par reconnaître Charles comme son successeur en 897, avant de s'éteindre quelques mois plus tard.

Eudes Rigaud,

frère franciscain devenu archevêque de Rouen (début du XIIIe siècle - Rouen 1275).

Il est issu d'une famille de la petite noblesse d'Île-de-France, et entre au couvent franciscain de Paris en 1236. Il poursuit des études de théologie, et devient maître de l'Université en 1246. En 1247, il est élu archevêque de Rouen, avec le soutien de Louis IX et d'Innocent IV : à la tête des sept évêchés de Normandie, il est alors l'un des principaux prélats du royaume. Premier universitaire et premier membre d'un ordre mendiant à la tête d'une aussi grande province ecclésiastique, il se consacre activement aux fonctions pastorales de l'évêque telles que redéfinies au concile du Latran IV (1215) : il réunit des synodes et des conciles, promulgue des statuts synodaux, multiplie les visites pastorales... En 1255, il est nommé archidiacre de Pontoise, et devient rapidement un familier du roi. Ce dernier, très proche des religieux mendiants, le sollicite pour les mariages de ses enfants, et l'invite à prêcher ou à célébrer la messe à la Sainte-Chapelle ou à Royaumont. Eudes Rigaud se voit aussi confier des responsabilités politiques : en 1259, il prend part à l'élaboration du traité de Paris entre Louis IX et Henri III d'Angleterre. En 1270, il participe à la croisade de Tunis, et, après la mort du roi, il est chargé des premières informations en vue de sa canonisation. Ainsi, par ses fonctions pastorales comme par son action politique, Eudes Rigaud apparaît comme le meilleur exemple de l'âge d'or épiscopal du royaume au XIIIe siècle.

Eugénie (Eugenia Maria de Montijo de Guzmán, comtesse de Teba, dite),

impératrice (Grenade, Espagne, 1826 - Madrid 1920), fille d'un grand d'Espagne, et descendante, par sa mère, d'une famille écossaise catholique. Eugénie se fait remarquer par sa beauté aux fêtes de l'Élysée en 1851.

Au lendemain du rétablissement de l'Empire, c'est elle que Napoléon III, soucieux d'assurer la pérennité de sa dynastie, choisit pour épouse. La famille Bonaparte et les cours d'Europe sont surprises, mais le peuple, pour sa part, est séduit par ce mariage d'amour présenté par l'empereur comme une simple « affaire privée ». De surcroît, la jeune femme emploie en œuvres de charité les 600 000 francs offerts par la Commission municipale de Paris pour sa parure de mariage. Ce dernier est célébré en grande pompe à Notre-Dame, le 30 janvier 1853. Dès lors, l'impératrice se partage entre les Tuileries, Saint-Cloud et Biarritz. Vite délaissée par son mari, elle donne cependant le jour au prince impérial, Eugène Louis-Napoléon, le 16 mars 1856, et accompagne l'empereur dans plusieurs voyages (Angleterre, Savoie).